Poursuivant la lecture continue de l'évangile et nous situant encore dans les premières journées inaugurales du ministère de Jésus en Galilée, l'évangile de ce dimanche met en scène la guérison d'une maladie cataloguée « impure » par la législation juive (la lecture du Lévitique l'illustre sur mesure). Ce geste de guérison intervient dans un contexte plus général de guérisons (souvenez-vous des deux dimanches précédents). Jésus se soucie de restaurer la santé des corps, des c½urs et des esprits. C'est ainsi qu'il inaugure sa mission. Sa parole de Salut ne gagnera en effet toute sa portée que si elle est étayée par des gestes concrets de Salut. Cette leçon vaut évidemment pour nous aussi. Mais ici, outre l'aspect de guérison, Jésus touche à la question du pur et de l'impur. D'un côté, Jésus se situe en rupture totale d'avec la manière juive de voir les choses : pour lui, l'impureté n'est pas une affaire d'objets, d'apparence ou de biologie mais d'attitude morale intérieure. Comme les prophètes, il spiritualise entièrement cette notion. Mais, d'autre part, comme on le voit ici, Jésus joue le jeu de la législation juive : Jésus renvoie le lépreux au prêtre du Temple. Il tient en effet à ce que son ½uvre messianique (car la guérison de la lèpre était considérée comme un signe messianique) soit dûment constatée par le judaïsme lui-même. L'ordre de silence (pour signifier la difficulté de réception du message) est à nouveau en concurrence avec la « force irrésistible » qui pousse à proclamer à tout vent ce Message efficace de Salut.
La prise en considération du contexte immédiat de l'extrait de l'épître aux Corinthiens nous aide à faire le lien et à enrichir notre réflexion sur le pur et l'impur. En effet, notre extrait est la conclusion de toute la controverse sur les idolothytes (ces viandes consacrées à des divinités païennes et donc impures). La question était : un chrétien peut-il consommer ces viandes ? La réponse de Paul est double : oui, vous pouvez consommer ces viandes puisque ces sacrifices ne signifient rien pour nous. Mais, si le fait de consommer ces viandes signifie pour vous que vous continuez à vous associer au culte des idoles (ou que cela pourrait être interprété comme tel par vos frères), alors n'en mangez pas. Comportez-vous en hommes libres par rapport à toutes ces pratiques idolâtriques. N'y prêtez pas attention comme telles mais prêtez attention à n'être pas une occasion de scandale pour ceux qui vous entourent. Acceptez donc de limiter volontairement votre liberté, non par considération de pureté ou d'impureté tenant aux objets mais par considération pour votre entourage, par charité.
La lecture du Lévitique n'est là que pour marquer le contraste avec l'attitude de Jésus. Dans le judaïsme sacerdotal, le pur et l'impur n'étaient pas d'abord des catégories morales. A preuve, de simples rites externes ou de simples délais temporels effaçaient la plupart des impuretés. La classification comme « impur » pouvait tenir à différents facteurs : considérations purement hygiéniques, distanciation par rapport à des pratiques païennes et idolâtriques environnantes, conscience du caractère particulier de tout ce qui touche au cycle de la vie et de la mort. Dans tous les cas non automatiques (comme la lèpre), c'était le prêtre qui faisait le constat d'impureté et de son effacement. Retenons de l'attitude de Jésus qu'il nous faut effacer toute ségrégation, surtout si c'est au nom d'une mythologie du pur et de l'impur mais retenons qu'il y a du mal, de l'impur, dans la nature humaine ou dans les coutumes et que notre mission, à la suite du Christ, est de rendre pur l'impur.