Comme nous le savons, depuis le 29 juin 2008, l'Eglise consacre une année entière pour fêter le 2000ème anniversaire du grand Apôtre (qui serait né vers l'an 8 de notre ère- ?). C'est pourquoi, exceptionnellement, en ce 3ème dimanche de l'année, nous célébrons la fête du 25 janvier : " la CONVERSION DE SAINT PAUL". Voilà un Juif dont on ignore bien des détails de sa vie - à commencer par les dates précises de sa naissance et de sa mort - et on n'a conservé de lui que 7 PETITES LETTRES dont le total ne fait pas 100 pages : or elles sont traduites dans des centaines de langues, étudiées dans les universités du monde, critiquées par certains, proclamées partout dans les liturgies chrétiennes et suscitant un flot ininterrompu de commentaires. Il y a bien peu d'auteurs qui ont autant marqué l'histoire des civilisations.
L'EVENEMENT DU CHEMIN DE DAMAS
Jeune pharisien doué de Jérusalem, Saül, de son nom hébreu, entra en rage devant l'expansion irrésistible des premiers groupes de disciples de Jésus. Pour lui et ses confrères, il était évident que Jésus (qu'il n'avait jamais rencontré) avait été condamné à juste titre par le Sanhédrin en tant que blasphémateur. Colporter qu'il était ressuscité et qu'il était le Messie était une fable ridicule, une supercherie inventée par ses disciples. Il fallait de toute urgence stopper la contagion d'une secte qui mettait en péril la sainte tradition d'Israël. Un jour, raconte saint Luc, Saül, accompagné de quelques compagnons, prit la direction de Damas en Syrie, où était signalée une nouvelle communauté de ceux que l'on allait bientôt appeler "chrétiens", avec la ferme intention de les arrêter. Que se passa-t-il sur la route ?...Toujours est-il que Saül se présenta en larmes, écrasé de honte et submergé de joie, demandant son adhésion à ceux qu'il voulait supprimer ! Il était bien arrivé mais il était ..."retourné" !!
"Il approchait de Damas quand soudain une lumière venue du ciel l'enveloppa de son éclat. Tombant à terre, il entendit une voix : " Saül, Saül, pourquoi me persécutes-tu ? -- Qui es-tu, Seigneur ?" demanda-t-il. - Je suis Jésus, c'est moi que tu persécutes. Mais relève-toi, entre dans la ville et on te dira ce que tu dois faire ". Ses compagnons entendaient la voix mais ne voyaient personne. Saül se releva ; les yeux ouverts, il n'y voyait plus rien. On le fit entrer en ville...
MEDITONS CET EVENEMENT
-- Il s'agit donc d'un événement foudroyant, imprévisible, d'une initiative du Seigneur qui tout à coup surgit dans la vie d'un persécuteur acharné. "Il m'a appelé par sa grâce", dira-t-il. Nous ne devons jamais désespérer ni de nous ni de personne : le pire peut être radicalement transformé.
-- Révélation extraordinaire : Jésus, que Saül déclarait mort, est vivant ! Non pas "réanimé" comme Lazare ou la fille de Jaïre. Mais passé dans un état tout à fait prodigieux. Ressuscité, il vit dans la Lumière de l'au-delà, dans la Gloire divine. Il est Seigneur. Donc la croix n'était pas une affreuse ignominie mais le sommet de l'amour, la porte du Ciel !
-- Et en même temps, il demeure dans ses disciples puisqu'il dit : "Pourquoi ME persécutes-tu ?". Lyncher le diacre Etienne (scène à laquelle Saül a assisté récemment) ou jeter en prison les chrétiens, c'est ATTAQUER JESUS. On ne peut dire : Je suis chrétien mais je refuse l'Eglise.
-- Qui donc est ce Jésus qui a été crucifié comme un malfaiteur, et qui, maintenant, est, simultanément, SEIGNEUR DE GLOIRE et PRESENT DANS LES SIENS qui l'avaient abandonné...donc à qui il a aussi fait miséricorde ????... On ne peut le réduire à un prophète, un héros !
-- Ce Seigneur pourrait châtier durement son persécuteur, le foudroyer dans sa colère : au contraire il le relève, lui parle avec douceur, lui révèle l'ignominie de ce qu'il est train de faire ! Donc nous devons avoir la même conduite à l'égard de nos ennemis : non les enfermer dans leur mal mais leur ouvrir les yeux.
-- Et non seulement le Christ pardonne à Saül mais il l'embauche ! Il transforme son persécuteur en prédicateur. Pour cela, il l'envoie à la communauté : c'est là qu'il recevra la tradition sur Jésus. La relation au Christ n'est jamais affaire privée : le converti se doit de demander l'entrée dans l'Eglise, dans une communauté afin d'y recevoir le baptême, les enseignements de l'Evangile, la tradition sur le Repas du Seigneur.
Ainsi Paul nous apprend que la foi chrétienne n'est pas d'abord une coutume héréditaire, une instruction, une morale, un rituel mais la rencontre de QUELQU'UN. C'est cette rencontre bouleversante qui a transformé Saül : il ne sera pas d'abord un enseignant mais un homme habité par une Présence, un homme aimé ! Ses lettres, ses exhortations, ses colères ne se comprennent que comme réponse, élan d'un amour passionné pour ce Jésus, vrai Messie, vrai Fils de Dieu.
"Ma vie présente dans la chair, je la vis dans la foi au Fils de Dieu qui m'a aimé et s'est livré pour moi" (Galates 2, 20).
LA MISSION = FONDER PARTOUT DES EGLISES
Paul (de son nom romain) ne deviendra donc pas un rabbin, un grand maître entouré de disciples. Abandonnant tout, il va se lancer sur toutes les routes : il ira à Antioche de Syrie, puis à Chypre, puis en Macédoine, puis à Corinthe, puis à Ephèse. Son ultime projet dont il fait mention dans sa dernière lettre, sera de se rendre en Espagne, au bout du monde connu de l'époque. Il n'est pas sûr qu'il ait pu réaliser son rêve : arrêté à Jérusalem, il sera jeté en prison, puis emmené à Rome où il sera condamné, en tant que citoyen romain, à la décapitation ( années 66-67 ?) "Malheur à moi si je n'évangélise pas !" : Paul est certain d'avoir été choisi pour accomplir la tâche la plus essentielle de l'histoire des hommes : proposer à chaque personne - Juifs d'abord puis païens- la Bonne Nouvelle. Jésus a offert sa vie pour le pardon des péchés ; il nous donne son Esprit pour que nous vivions de la Vie divine, pour que nous devenions vraiment des enfants de Dieu. "Nous ne sommes plus sous la Loi mais sous la grâce...Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé...Il n'y a plus ni Juif ni Grec, ni homme libre ni esclave, ni l'homme et la femme : tous, baptisés, nous sommes UN en Jésus-Christ ! "
Partout Paul rencontre scepticisme, moquerie, colère, haine. Coups, prisons, fouet, faim, froid... : rien ne l'arrête. Au c½ur des grandes cités païennes, Thessalonique, Corinthe, Ephèse, des gens l'écoutent et sont transpercés par sa parole. Non cet homme n'invente pas, il ne cherche ni gloire ni fortune, il est un témoin authentique. Et Paul, partout, fonde des EGLISES, des communautés, luttant pour que les convertis vivent ce pour quoi le Christ avait donné sa vie sur la croix : que, refusant racisme et rancune, les personnes de toutes conditions, de toutes cultures, de tous âges, s'accueillent, animés du même Esprit, priant ensemble : "NOTRE PERE...". Et chaque 1er jour de la semaine, on se réunit afin de partager dans l'allégresse le Repas du Seigneur : " Ceci est mon corps...". On fait mémoire de la croix, on vit en Christ, on espère son retour : Maranatha ! Viens, Seigneur Jésus ! On se réconcilie comme membres de ce Corps qui était l' EGLISE. Les 1ers chrétiens n'ont créé aucune institution, n'ont jamais pris le pouvoir, n'ont rien imposé, rien construit, n'ont pas résolu les problèmes sociopolitiques du temps : simplement ils ETAIENT UNE COMMUNAUTE FRATERNELLE animée par la charité, l'agapè, l'amour du Christ créant UN CORPS ! Combien étaient-ils ? Paul ne parle jamais du nombre, de la quantité : seule comptait pour lui la qualité, la vérité, l'authenticité des communautés. Qu'elles vivent l'Evangile, qu'elles deviennent l'Evangile vivant, manifeste...
En terminant en ce jour la semaine de prière pour l'Unité des chrétiens, nous prions l'Apôtre pour que, enfin, il n'y ait plus qu'une seule Eglise visible, pour que l'unité des chrétiens conduise à l'unité du monde dans la Paix de Dieu. Et pour que, à notre tour, avec le même zèle, nous poursuivions son ½uvre : annoncer la Bonne Nouvelle.