Dimanche de Pâques

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2005-2006

Pour entrer dans le mystère de la Résurrection, le plus simple serait, semble-t-il, d'entrer dans la peau de certains sportifs. Il est vrai que, dans la page d'évangile que nous venons d'entendre, tout le monde court : Marie-Madeleine, Jean puis Pierre. Toutefois, ce n'est pas la course à pied qui devrait nous éclairer. Non, je crois que le sport le plus utile pour comprendre ce mystère est le ski. Dans un premier temps, ayant peur de ce que nous allons trouvé, nous pourrions utiliser la technique du chasse-neige. Nous avançons lentement. Nous ne prenons pas trop de risques. D'autre part, nous pourrions également être plus téméraires, un peu à l'instar de Pierre, c'est-à-dire mettre les skis en parallèle et foncer sans s'arrêter. Le risque d'une telle attitude est grand puisque nous risquons de ne pas être capable d'éviter l'obstacle et surtout, de ne pas voir ce qui se passe réellement. Alors, il nous reste une troisième technique, celle qui est sans doute la plus appropriée pour entrer dans un tel mystère : le retournement. Face à l'obstacle, je mets un premier ski puis l'autre perpendiculaire à la piste. Je prends un angle droit pour éviter le danger dans le sport, pour me détourner de mes certitudes afin de me laisser toucher par ce qui me dépasse.

En effet, Pâques est de l'ordre de l'indicible, d'un mystère qui va au-delà de toute compréhension. Nous ne pouvons appréhender cet événement par nos lois de la raison. La résurrection du Christ ne peut commencer à se comprendre que si nous effectuons nous aussi un retournement sur nous-mêmes. Dans un autre récit évangélique du tombeau vide, Marie-Madeleine se retournera par deux fois : une première fois, pour entendre le message des anges et une seconde fois, pour reconnaître le Christ en personne. Elle vivra un retournement physique. Jean, quant à lui, effectue également un retournement mais cette fois plus de l'ordre du spirituel. La logique aurait voulu qu'il entre directement dans ce fameux tombeau vide. Il n'en fait rien. Il s'arrête. Il prend son temps d'abord pour observer tous ces petits détails, puis il entre et alors, il vit et il crut. Le retournement spirituel était donc nécessaire pour arriver à saisir l'incroyable de l'événement de Pâques : le Fils de Dieu est ressuscité, le Christ a vaincu la mort et nous fait dorénavant participer au don de la vie éternelle. Voilà, la merveille de Pâques. Nous assistons à la mort de la mort ou en d'autres termes, la mort est morte. Cette dernière n'aura plus jamais le dernier mot. Elle n'est plus une fin en soi mais l'instant précis de l'entrée dans l'éternité. Nous ne nous arrêtons pas avec la mort. Non, la mort nous la traversons, elle est cette infime seconde, ce passage vers la lumière divine.

En entrant dans ce tombeau vide, le Christ nous retourne également. Il nous fait quitter le monde de nos certitudes pour entrer dans l'univers de la foi et de l'espérance. Par l'événement de Pâques, chacune et chacun de nous découvrons une nouvelle dimension de notre être : nous sommes devenus des êtres résurrectionnels, c'est-à-dire nous prenons conscience que nous sommes appelés à quelque chose de plus grand encore. Dieu nous veut auprès de Lui. Il nous attend car c'est en Lui que nous nous accomplirons pleinement. Il espère que toute sa création répondra positivement à l'appel de la vie éternelle, don par excellence de toute vie. Nous sommes donc conviés à vivre ce retournement intérieur, à accepter avec humilité que nous ne pouvons pas tout expliquer, tout comprendre. Nous entrons dans un mystère qui ne s'éclaire qu'en le vivant pleinement, passionnément. Notre retournement est signe d'une confiance, malgré certains doutes qui pourront nous traverser, d'une confiance donc au don de la vie éternelle. Par l'événement de sa résurrection, le Christ retourne nos vies pour ouvrir toutes nos portes intérieures vers l'horizon du projet que Dieu a pour chacune et chacun de nous : notre accomplissement en Lui. Et ce qu'il y a de merveilleux dans ce que nous célébrons aujourd'hui, c'est cette promesse que nous pouvons déjà participer dès maintenant à l'événement de notre propre résurrection. D'une manière très simple : le Christ a ouvert son tombeau pour que nous-mêmes nous nous ouvrions aux autres car l'ouverture à l'autre est la possibilité offerte de rencontrer Dieu tous les jours puisqu'il se laisse découvrir dans toute relation d'amour. Répondre à l'invitation de la résurrection, c'est alors prendre conscience que nous sommes des êtres résurrectionnels, c'est-à-dire des êtres qui participent à la réalisation de leur vocation en aimant tout tendrement.

Amen.