LE VRAI NOËL EUCHARISTIQUE
Histoire vraie. Il y a quelques années, la Ville de Liège décida d'installer au centre de la cité un grand « Marché de Noël » avec des chalets de bois et de grandes illuminations. Réunion du comité. Un membre suggère: « Il faudrait prévoir un chalet avec la crèche ». Réplique immédiate d'un autre : « On ne va pas encore mettre du religieux parce que c'est Noël ?... ». ? ? ? ? ? ?
Oui, le 25 décembre est redevenu ce qu'il était à l'origine dans la Rome antique : la fête du solstice d'hiver, le moment où les jours recommencent à croître. Pour célébrer la victoire du soleil sur les ténèbres, on allumait des feux, on dansait des farandoles, on buvait et on s'échangeait des cadeaux. C'est précisément pour contrer cette festivité païenne (« Sol invictus » : soleil invaincu) que l'Eglise, au 4ème siècle seulement, décréta de fêter la Naissance de Jésus à ce moment-là puisqu'il est « la Lumière du monde », le « Soleil de justice ». Jusqu'alors, et depuis les apôtres et les textes du Nouveau Testament, personne ne s'était jamais soucié de conserver le souvenir de ce jour : nul ne savait quand Jésus était né. Aujourd'hui Noël est une fête païenne de même que Pâques est désormais fête du printemps et temps de vacances.
Mais ainsi se justifie à nouveau la présence du b½uf et de l'âne entourant le nouveau-né. Cette antique tradition vient d'un évangile apocryphe qui l'a reprise au prophète Isaïe. Celui-ci, constatant que Jérusalem ne mettait pas en pratique la Loi de Dieu, qu'elle était une ville remplie d'injustices et de méfaits, transmettait un oracle de Dieu :
« Ecoutez, cieux ! Terre, prête l'oreille ! C'est le Seigneur qui parle. J'ai fait grandir des fils, je les ai élevés et eux se sont révoltés contre moi ! Un b½uf connaît son propriétaire et un âne la mangeoire chez son maître : mais Israël ne me connaît pas, mon peuple ne comprend pas ». (Isaïe 1, 2-3)
Dieu a tant fait pour nous, se lamente le prophète, il nous a libérés de l'esclavage, nous a guidés, nous a comblés de bienfaits et nous ne formons pas une société juste comme il nous le demande. « Malheur, nation pécheresse...ils ont abandonné le Seigneur, ils ont méprisé le Saint d'Israël... ». Alors que des animaux, tels le b½uf et l'âne, reconnaissent toujours leur maître qui les nourrit et qu'ils le servent avec fidélité, Jérusalem, elle, oublie son Dieu.
De même, plus tard, Bethléem demeura aveugle devant l'enfant envoyé de Dieu, l'événement extraordinaire qui venait d'éclore en elle ; la présence de l'âne et du b½uf dans la crèche voulaient rappeler Israël à la fidélité.
Aujourd'hui Liège, Bruxelles, Paris, Berlin, les Occidentaux ne connaissent plus Jésus, le Seigneur, qui leur a donné la Bonne Nouvelle, saint François d'Assise et la petite Thérèse de Lisieux, le père Damien et l'abbé Pierre, les cathédrales et Jean-Sébastien Bach, Giotto et Michel-Ange. Tant de preuves de la tendresse du Père, tant de signes de la miséricorde du Fils, tant de réalisations de la Force de l'Esprit !...
Dans la fièvre, on monte un « village de Noël », esquisse d'un rêve où les guirlandes donnent la lumière dans la nuit, où le sapin vert signe la victoire de la vie, où les échanges de cadeaux manifestent notre quête d'affection, notre désir de rencontres pacifiées, notre recherche de bonheur.
Lumière, Vie, Echanges de Cadeaux, Paix, Joie, Banquets familiaux, V½ux de bonheur. Mais sans place pour la Source de tous ces biens. Un village sans Christ. Ou avec une crèche réduite au niveau du folklore !
« Le b½uf et l'âne reconnaissent leur maître...Et vous m'oubliez ! ». Noël ne signifie plus « naissance »
Nous, chrétiens, n'avons pas à bouder ces fêtes des hommes, à dédaigner cette recherche d'allégresse, de paix, de bonheur familial. Mais nous avons la grâce de reconnaître Celui qui est venu sur terre précisément pour nous offrir paix et justice, joie et réconciliation.
Et l'Evangile que nous écoutons à nouveau en cette nuit nous suggère les véritables attitudes à vivre dans la foi.
DEVENIR LES PERSONNAGES DE NOËL
D'abord ne pas être comme l'empereur de Rome qui s'attribuait un titre sacré (Auguste), se dressait comme un dieu, propriétaire des citoyens qu'il « dénombrait » afin de jouir de l'étendue de son pouvoir et espérer les monceaux d'argent à leur extorquer par le tribut et les taxes.
Mais être comme ces petits bergers qui, pour quelques sous, veillaient la nuit sur les troupeaux. Comme eux, demeurer vigilants, conscients des enjeux de l'heure, refusant d'être assommés par l'alcool, les jeux, les slogans publicitaires et accourant pour voir le bébé de la nuit.
Etre comme les Anges, tout empressés de proclamer l'Evangile ; « Je viens vous annoncer une Bonne Nouvelle, grande joie pour tout le monde : aujourd'hui vous est né un Sauveur ». A quoi le reconnaîtrons-nous ? « Un signe : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire ». Vous inventiez un Dieu impitoyable, lointain, tout-puissant : le voici près de vous, aussi ordinaire et aussi extraordinaire qu'un bébé. Faible, fragile, impuissant. Il ne vous commande rien : il vous presse de l'aimer et de le faire connaître.
Etre comme les Anges qui louent Dieu : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes - non pas des « hommes de bonne volonté », ce qui écarterait les autres - mais « des hommes qu'il aime ». Car c'est la louange qui nous désarme et qui permet la paix authentique, sans mensonge ni hypocrisie.
Etre comme Joseph, le brave artisan, emporté dans une aventure stupéfiante, et qui lutte pour protéger Marie et l'enfant. Car si Dieu nous garde, nous avons à le protéger.
Enfin être comme Marie, la silencieuse. « Quant à Marie, elle retenait tous ces événements et les méditait dans son c½ur ». Car l'Ange de l'annonciation ne lui a rien dit de son avenir et, comme nous, elle découvre peu à peu le chemin. Elle ne comprend pas tout ce qui se passe mais elle retient, elle garde en mémoire, sûre que tout s'éclairera, que tout prendra sens. La foi est une mémoire qui s'éclaire peu à peu.
Et son petit naît dans le village de son ancêtre David dont il fera enfin advenir le Royaume sans verser d'autre sang que le sien. Ce village porte le nom de Beth-Léhem, ce qui, en hébreu, signifie « La Maison du Pain ». Et Marie n'a d'autre berceau qu'une mangeoire parce que son fils, un jour, sera la nourriture, le Pain de Vie que les croyants - bergers juifs et mages païens- peuvent manger.
Alors nous, croyants, nous découvrons la merveille : c'est chaque dimanche que nous courons vers l'Eglise - la Maison du Pain partagé -, que nous formons la véritable « société de consommation juste » sans goinfrerie, sans que certains s'empiffrent tandis que d'autres manquent de tout.
Si, comme le b½uf et l'âne, (le chien et le chat, dirait-on aujourd'hui ?), nous reconnaissons notre Maître, de dimanche en dimanche, nous créerons le VRAI VILLAGE DE NOËL.
Chrétien, fais de ta main une crèche, reçois celui qui se remet à toi pour que tu te remettes à lui et à tes frères. Comme l'âne, tends l'oreille pour écouter la Bonne Nouvelle qui t'apporte la Lumière. Comme le b½uf, rumine, médite la Parole qui te donne la Vie.
Ainsi, peut-être, à Liège et à Bruxelles, à Paris et à Berlin, les Occidentaux redécouvriront la source divine de ce qu'ils cherchent dans la nuit de leurs inquiétudes.
Noël
- Auteur: Devillers Raphaël
- Temps liturgique: Temps de Noël
- Année liturgique : A, B, C
- Année: 2012-2013