Il avait pris sa plus belle plume d'ange et dans un ciel étoilé, il inscrivit avec des lettres de lumière : Voici que je viens annoncer une bonne nouvelle : aujourd'hui vous est né un Sauveur. Laissons résonner en nous cette musique comme si nous l'entendions pour la première fois. Une bonne nouvelle raconte les astres lumineux. Mais une nouvelle, c'est quelque chose qui vient changer la vie. Une bonne nouvelle, c'est du bonheur prêt à germer. Aujourd'hui, ce qui rend le coeur léger c'est l'annonce d'une naissance : Jésus, Dieu s'est fait homme né d'une femme. Dieu habite dorénavant parmi nous. Il réside en nous. Depuis des millénaires, des générations d'hommes et de femmes ont cherché Dieu à tâtons. Ils ont rêvé, espéré, imaginé un certain type de Dieu. Celui qui évidemment risquait de ne pas trop les remettre en cause, Celui qui leur dirait ô combien ils avaient bien agi jusqu'ici. On attendait un Dieu tout-puissant, un Dieu inconnu, un Dieu de splendeur et de majesté, un Dieu bien éloigné. Un Dieu qui laissait peu de place pour l'imprévu.
Et Marie met au monde un bébé, un petit bout d'homme, fragile comme tous les nouveaux-nés. Cela n'a rien d'extraordinaire : sur notre terre, il y a à chaque seconde une femme qui accouche. Et une naissance change tout. C'est la nouvelle la plus extraordinaire qui soit, c'est la plus belle histoire qui commence puisque c'est celle de la Vie, de notre vie. Cela ressemble même un peu à un conte de Noël ! Mais... nous est-il permis de nous laisser bercer par un conte lorsqu'on songe à l'étrange situation dans laquelle nous nous trouvons ? aux « affaires » qui secouent notre pays depuis des mois ;
aux familles déchirées dans leur amour par un départ, une perte ;
aux foules abandonnées sur les routes de l'exil dans la région des Grands lacs ;
aux réfugiés à nos portes ici à Rixensart ;
à toutes celles et tous ceux que la violence, le chômage, le surendettement plongent dans le désespoir.
Il n'y a donc plus d'avenir pour notre humanité. Noël devient soudainement bien sombre. Pourtant, pourtant tout comme il y a deux mille ans, Jésus vient habiter nos vies et notre monde d'aujourd'hui dans toute leur épaisseur humaine. Alors, dites, dites et si c'était vrai... comme le chantait Jacques Brel. Dites, si c'était vrai que nos fragilités, nos vulnérabilités, nos ténèbres étaient encore et toujours le lieu même où brille l'Etoile de Noël, si c'était vrai que nous devenions la terre où germera celui que nous appelons Sauveur. Comme si, en ce jour, l'Enfant Dieu sommeille en nous et nous entraîne vers l'incroyable, l'inouï.
Noël, un mystère bien compliqué pourrions-nous penser, pourtant il a été révélé à de simples bergers. Et eux, ils ont tout de suite compris le sens de cette Etoile qui a brillé plus fortement que les autres. Quelle drôle d'idée pour Dieu de se faire bébé. Etonnant, surprenant, mais ô combien merveilleux : Dieu aujourd'hui, dans toute sa fragilité de nouveau né, se laisse prendre dans nos bras. Il nous invîte à nous émerveiller. Dieu si petit, si tendre. Dieu qu'on a peur de laisser tomber. Dieu qui nous fait fondre et qui nous laisse vivre nos sensibilités les plus profondes. Dieu qui nous fait vibrer aux cordes de nos paternités et maternités. En cette fête de Noël, Dieu s'offre à nous tout en sentiment. Dieu s'est fait homme et l'homme devient ainsi Dieu. Un Dieu de bonheur fascinant qui nous rappelle que la vie ne s'écrit pas, ne se raconte pas d'abord mais se vit. La vie, ma vie, c'est à moi de la créer. Et Dieu en se faisant homme nous offre une telle possibilité. Je suis l'auteur et le conteur de la plus belle histoire du monde, celle que je ne me lasserai jamais de composer puisqu'elle dit tout simplement un peu de moi et un peu de Dieu. Je n'ai plus besoin de rêver, de jouer à ces super héros adulés. Je peux créer mon histoire avec mon héritage fait de forces et de fragilités. Et pourquoi m'en ferais-je puisque je suis appelé à être Dieu, même dans mon humanité.
Au risque de nous répéter mais Noël est bien ce conte merveilleux. Avec une petite différence : notre histoire, elle s'est vraiment produite, il y a bientôt deux mille ans. Pour nous rejoindre, Dieu a choisi la nuit, la fragilité, l'insécurité. En ce moment de Noël, la toute-puissance de Dieu prend le visage, le corps d'un Enfant tout petit, désarmé, vulnérable... Ces chemins ne seraient-ils pas l'Etoile qui illumine notre aujourd'hui nous qui sommes poussières d'étoiles...
Amen.