34ème dimanche ordinaire (année B)

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 25/11/18
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2017-2018

La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si nous avons encore besoin d’un roi.  Je ne parle pas au niveau politique : je suis un fervent royaliste et monarchiste.  Mais je me posais la question en entendant tous les discours actuels sur la formation des jeunes et des enfants.  Près du couvent, il y a une antenne de l’ONE. Et sur les affiches de cet organisme on peut lire que l’enfant doit pouvoir trouver par lui-même les jeux et les activités qui lui conviennent.  A l’université, on parle de plus en plus de parcours personnalisés et de choix faits par les étudiants pour l’organisation de leurs études.  On parle d’ailleurs de moins en moins d’études, mais de formations.

Tout cela me paraît être en réaction avec une philosophie de la formation qui existait jusqu’il y cinquante ans environ.  C’était une formation organisée par des savants et imposée aux enfants.  C’est à cette époque que Gilbert Cesbron écrivait : « c’est Mozart qu’on assassine » (1966), c’est-à-dire qu’il n’y avait plus de place pour la créativité et que c’est ainsi qu’on pouvait tuer de petits génies en herbe.  Mais actuellement je me dis que c’est l’orchestre qu’on est en train d’assassiner.  A force de privilégier la formation personnelle, on en oublie l’organisation du groupe et de la communauté.  Il n’y a plus de violonistes, il n’y a plus que des solistes. 

Cette exaltation des qualités personnelles peut en effet aboutir au chaos.  Les jardiniers savent très bien qu’il ne faut pas laisser les plantes croître et se développer sans contrôle.  Un jardin abandonné, livré à lui-même devient un terrain vague.  Les mauvaises herbes étouffent les bonnes herbes.  Ce n’est plus l’harmonie, c’est l’anarchie.  Il en est de même pour les forêts.  Les gardes forestiers sont là aussi pour aérer la forêt, renouveler les essences, combattre la prolifération de nouvelles plantes nuisibles.  Le libre épanouissement personnel de chacun aboutit à l’anarchie et surtout à la domination des plus forts sur les plus faibles.  S’épanouir n’est pas un but en soi, c’est le résultat d’un don de soi à un but ou à une personne. 

Il suffit pour cela de relire la Bible.  Quand Moïse se présente à Pharaon pour libérer son peuple de l’esclavage, il ne veut pas pour cela en faire un grand peuple qui pourra dominer les autres.  Non, il veut conduire son peuple au Sinaï pour pouvoir rencontrer le Seigneur et recevoir de Lui la Loi et les commandements.  La libération hors d’Egypte conduit à une nouvelle soumission, celle-ci volontaire, à la volonté de Dieu.

Il en est de même pour la belle-mère de Pierre.  Elle était malade, alitée et Jésus est venu la sauver.  Que fait-elle ? Aussitôt elle se met à Le servir, parce que, quand on a rencontré Dieu, on n’a plus qu’un seul désir : rester auprès de Lui, goûter Sa présence, Le servir parce qu’Il est tellement merveilleux.

Mais, vous me direz que c’est là une tâche infinie et bien ingrate : qui se soucie et qui respecte ceux qui servent ? Vous avez raison et c’est ce que Jésus se dit depuis deux mille ans : « peuple ingrat que celui des hommes sur la terre, se dit-Il, ils ne voient pas jusqu’où je suis allé pour leur dire comme je les aime ».  Et c’est là que se trouve la véritable royauté de Jésus-Christ, non pas dans l’autorité, mais dans une séduction faite de patience et de service.  Voilà peut-être une piste à suivre pour l’avenir dans nos familles et nos communautés.