2ème dimanche ordinaire (année C)

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 20/01/19
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2018-2019

Voilà que l’année liturgique C commence véritablement.  Nous avons suivi jusqu’au bout le temps de Noël et nous avons terminé avec la scène du baptême de Jésus.  Nous allons maintenant suivre pas à pas l’Evangile de Luc.  Et pour commencer cette lecture nous avons le récit du miracle de Cana, c’est-à-dire un passage de l’Evangile de Jean.  Tout cela ne paraît pas fort cohérent et nous invite à aller un peu plus loin que le niveau purement historique de la suite des événements.

            La liturgie nous invite donc à vivre cette année liturgique à la lumière des noces de Cana.  La vie chrétienne serait à méditer sous le signe de la vie conjugale.  L’Ancien Testament nous présente plusieurs aspects de cette forme de vie commune.  Nous en prendrons trois.  Il y a tout d’abord l’histoire du premier couple : Adam et Eve.  L’homme était seul et toute la création ne suffisait pas à lui donner ce dont il avait vraiment besoin, une présence, une compagne à aimer.  Et quand Adam découvrit Eve il s’exclama plein d’admiration : « voici l’os de mes os, la chair de ma chair », c’est-à-dire voici un être qui me touche au plus profond de moi-même et pour lequel je suis prêt à tout donner.  La preuve, c’est que l’Ecriture continue en disant que l’homme quittera son père et sa mère pour s’attacher à sa compagne.  L’homme ne devient véritablement adulte que quand il s’engage profondément pour quelqu’un, ici sa compagne.

            Un deuxième élément sur le mariage est le Cantique des Cantiques, le récit de cette jeune fille, passionnée, perturbée par l’amour qu’elle ressent pour son bien-aimé.  Mais la tragédie de ce poème, c’est que jamais elle n’arrive à saisir son bien-aimé.  Toujours il lui échappe et pourtant toujours il lui donne des signes de sa présence.  L’amour conjugal est basé sur cette insatisfaction permanente : l’autre est inaccessible.  Quand bien même je pourrais étudier sa psychologie, son milieu familial, ses centres d’intérêt, jamais je n’arriverai à épuiser le mystère de ce compagnon (ou de cette compagne) de vie.  L’autre, le conjoint est beaucoup plus grand, beaucoup plus riche, plus complexe que je pouvais l’imaginer. 

            Un troisième passage est le très beau livre de Tobie.  Un jeune homme part dans une terre étrangère et revient avec une épouse.  Il ne s’agit plus ici de passion amoureuse, mais bien au contraire d’un profond respect et d’une immense gratitude.  Un profond respect, puisque, comme vous le savez, les jeunes gens resteront chastes pendant leur première nuit de noces.  De manière imagée, l’Ecriture nous dit que le diable provoquait la mort des jeunes hommes qui voulaient toucher Sara.  C’est une façon de dire que la passion peut détruire l’amour, le vrai amour.  Et la tragédie de Roméo et Juliette illustre bien cet enseignement plein de sagesse.  Dans la passion amoureuse, ce n’est pas l’autre que l’on aime, mais bien soi-même dans cette fougue déraisonnée.  Mais le livre de Tobie insiste aussi sur un autre point, la gratitude.  C’est le Seigneur qui a conduit Tobie dans cette terre étrangère et qui lui a donné de rencontrer Sara.  Et c’est le Seigneur qui guidera Tobie et Sara sur les chemins de la vie.

            Et c’est là sans doute l’un des sentiments qui devrait toujours nous animer, la gratitude pour l’amour que nous avons reçu.  Car l’amour, ce n’est pas quelque chose que l’on crée, mais quelque chose que l’on reçoit.  Et il est plus facile de détruire l’amour que de le construire.  Sans doute faudrait-il avoir parfois le courage et l’honnêteté de dire à son conjoint : « sans doute ma vie n’aurait pas de sens ».  C’est en tout cas ce que, moi, je dis à Dieu tous les jours.