Oui, avouons-le, reconnaissons-le, la fête du Christ, Roi de l’univers, est une fête politique. C’est l’affirmation de la suprématie de la foi sur le pouvoir civil. Il fallait le faire. Quand, en 1925, le pape Pie XI a proclamé cette nouvelle fête, il voulait couper l’herbe sous le pied de Mussolini. Celui-ci venait de prendre le pouvoir en Italie. Il écrasait ses ennemis par la violence. Le peuple italien n’était plus pour lui qu’un troupeau qu’il voulait mener à la gloire de l’empire romain renouvelé. Il envahit l’Ethiopie, en utilisant les bombes à gaz et ses soldats moururent en Lybie, écrasés par la chaleur et desséchés dans le désert.
Mais le Christ, Roi de l’univers, ne serait-il pas lui aussi un dictateur et son Royaume ne serait-il pas une gigantesque prison contrôlée par le clergé ? Eh bien, non ! Parce que le Christ n’est pas venu détruire ses ennemis, Il est venu mourir pour eux. Les chemises noires italiennes couraient dans les rues à la recherche des socialistes et des catholiques. Ils les rouaient de coups et les laissaient mourir sur le trottoir. Les disciples du Christ n’ont pas parcouru le monde méditerranéen pour tuer les Romains qui occupaient leur pays. Ils étaient bien au contraire venus pour les libérer du fanatisme avec lequel ils adoraient l’empereur, un être humain. Ces dictateurs maintenaient leur pouvoir grâce à leur armée et leurs supplices. Face à cela, les chrétiens étaient venus annoncer un nouveau royaume, celui de l’amour et de la liberté.
S’ils étaient prêts à sacrifier leur vie, c’était parce que le Fils de Dieu l’avait déjà fait. Lui, le Roi de l’univers, avait quitté le confort et la sécurité pour venir partager son amour avec toute l’humanité. Il avait agi comme certains parents le font maintenant avec leur enfant révolté. Cet adolescent crie dans la maison, il casse les portes de sa chambre, il renverse les meubles et s’enfuit pendant la nuit. Faut-il détruire cet enfant ? Bien sûr que non. Les parents cherchent mille et une nouvelles façons de pouvoir rentrer en contact avec leur fils rebelle. Ce n’est pas dans la prison qu’ils voudraient le jeter. C’est dans leur bras qu’ils voudraient pouvoir le recevoir.
Et, pendant toute l’histoire de l’humanité, il y a toujours eu des hommes et des femmes qui ont eu le même courage et le même enthousiasme que les apôtres. Ils se sont donnés pour ceux que tout le monde rejetait : saint Vincent de Paul a parcouru la France pour héberger les orphelins et les vieillards, le Père Damien s’est installé à Molokai pour soigner les lépreux, Mère Teresa a sillonné les rues de Calcutta pour veiller sur les mendiants qui agonisaient dans la saleté. C’est le Christ qui les poussait à aller toujours plus loin dans le dévouement. C’était lui, le Roi de l’univers, qu’ils voyaient dans ces yeux éteints, dans ces visages ravagés, dans ces corps décharnés. Au-delà de leur laideur apparente, c’était la splendeur divine qui, caché, ne demandait qu’à être libérée.
Les dictateurs du XXe siècle ont écrasé les hommes sous le poids de la terreur et de l’oppression. Le Christ, Roi de l’univers, est venu seul, sans armée, ni garde du corps. Il est venu rendre à chacun le droit d’être heureux. Le Christ s’est servi de la croix pour soulever le rocher de tristesse et de désespoir qui écrasait le cœur de l’homme. Tout ce poids les empêchait de vivre et de respirer, de recevoir la lumière et la chaleur de l’amour de Dieu
Les dictateurs étouffent. La foi libère.