Ils étaient trois à avoir choisi de quitter le domicile familial pour s’envoler de leurs propres ailes. Ils décidèrent de construire chacun leur maison. Le premier, quelque peu écervelé en fit une en paille. Le second, plus bricoleur, choisi alors d’en construire une en bois. Quant au troisième, le plus réfléchi d’entre eux, il prit le temps d’en construire une en pierre avec de belles fondations. Un jour le loup passa par là. Il souffla sur la première qui s’écroula aussi tôt. Il s’en prit à la deuxième et l’écroulement fut tout aussi rapide.
S’étant réfugiés, chez le troisième, les trois observèrent le loup qui s’essoufflait contre la maison de pierre. Ce dernier décida de passer par la cheminée où l’attendait un chaudron bouillant. Il s’enfuit et personne ne le revit. Je suppose que vous aussi vous avez entendu cette histoire ou mieux encore vous l’avez racontée un jour à vos enfants. Si je me permets de la reprendre aujourd’hui, c’est tout simplement parce que la suite de l’évangile de ce jour, nous raconte la parabole de la maison construite soit sur le sable, soit sur le roc. Cet évangile nous pouvons régulièrement l’entendre lors d’une célébration de mariage. Or cette parabole n’a de sens que si nous lisons ce qui la précède, c’est-à-dire tout ce que nous venons d’entendre aujourd’hui.
Tout être humain a en lui ce désir de construire sa vie sur le roc. Et souvent, nous nous demandons ce qu’il y a lieu de faire pour y arriver. La solution est éminemment simple. Il suffit d’ouvrir l’évangile de Luc au chapitre 6 ou l’évangile de Matthieu au chapitre 7 puisque ces deux évangélistes relatent les mêmes propos. Non seulement de l’ouvrir mais de vivre toutes ces attitudes qui font grandir l’humanité de tout être humain au point que sa part divine en devient visible. Il y a toutefois cette phrase de Jésus : « Ce que vous voulez que les autres fassent pour vous, faites-le aussi pour eux » qui est interpelante parce que nous la retrouvons dans toutes les grandes traditions religieuses du monde. En effet, dans l'ancien Mahabharata hindou, nous pouvons lire : « quelqu’un ne doit jamais faire à quelqu’un d'autre ce qu'il considère comme injurieux pour lui ». Dans le Sutta Nipata bouddhiste nous lisons : « comme une mère s'occupe de son enfant chaque jour, de la même manière l’esprit de l’homme devrait être donné entièrement à toutes les choses vivantes ». Dans un écrit taoïste, nous pouvons lire que « l’homme bon verra les gains des autres comme s’ils étaient les siens et leurs pertes de la même manière ». Les écritures zoroastriennes déclarent : « la nature est seulement bonne lorsqu’elle ne fait pas à un autre ce qui n'est pas bon pour elle-même ». Dans le Talmud juif nous lisons : « ce qui est détestable pour toi, ne le fais pas à tes pairs. Ceci est le tout de la Torah ». Et enfin, dans le Hadith de l’Islam nous découvrons les mots du prophète Mohammed : « aucun homme n’est un vrai croyant à moins qu’il ne désire pour son frère ce qu’il désire pour lui-même ». Toutes ces phrases font ainsi écho à la règle d'or entendue dans l’extrait d'évangile de ce jour et qui résume tout l'enseignement du Christ. Cette réalité nous invite à prendre conscience que toute religion, toute philosophie qui cherche le bien-être de l’humanité de l’être partage une même finalité. Aucune ne peut donc prétendre avoir le monopole du savoir. Par notre présence en cette église, nous nous inscrivons dans les traces du Christ qui précise à sa manière ce que cette phrase signifie en nous donnant un ensemble de directives à suivre. Ce qui fait sa spécificité, c’est que le Fils de Dieu ne nous invite pas à nous contenter de certaines valeurs, de certains comportements de vie. Il nous convie chacune et chacun, dans la mesure des possibilités et des limites qui nous constituent, à aller plus loin de ce qui, à première vue, nous paraitrait raisonnable. Un peu comme si le dépassement était une attitude à adopter. Ne jamais se contenter, ne jamais être repu, ne jamais être comblé de tout ce que ne faisons. Le Fils de Dieu vient nous dire aujourd’hui encore, la tâche est phénoménale. Nous participons de la sorte à la venue du Royaume de Dieu dès ici et maintenant. Ce n’est pas compliqué. Il nous suffit de mettre en œuvre ce que le Christ nous demande au chapitre 6 de saint Luc ou au chapitre 7 de saint Matthieu. Ne tardons pas, le Royaume de Dieu est proche. Bonne méditation du chapitre 6 ou du chapitre 7, et pourquoi pas, voire des deux. Avec Dieu, la modération n’est jamais de mise.
Amen