1e dimanche du Carême

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 18/02/24
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : B
Année: 2023-2024

C’est bizarre ! Je croyais que Jésus avait été tenté par trois fois au désert, une première fois quand il eut faim, une deuxième fois quand Satan a demandé à Jésus de se jeter depuis le pinacle du Temple, et la troisième fois quand il l’a invité à se prosterner devant lui. Et c’est vrai. On trouve ces trois tentations dans les évangiles selon Matthieu et Luc, mais ici rien de tout cela. Le récit est court, bref. Il y a juste ces quelques mots : Jésus est poussé vers le désert et il est entouré de bêtes sauvages.

Si l’Évangile d’aujourd’hui est si court, c’est parce que Marc veut présenter la plus grande de toutes les tentations, celle de l’exclusion. Oui, Jésus est expulsé (c’est le terme grec qui est utilisé) il est expulsé, comme un foetus est expulsé hors du ventre de sa mère pour être lancé dans le monde extérieur où il devra affronter le froid, la faim, la soif. C’est la première et la plus douloureuse de toutes les expériences pour un homme quand il arrive sur terre: se sentir expulsé, chassé de chez lui. Jésus a vécu jusqu’à trente ans environ à Nazareth. Et voilà qu’il quitte le confort des l’amour de sa mère et de son père adoptif pour connaître la trahison et l’abandon sur la croix.

Car l’abandon, c’est encore pire que la solitude. La solitude, on en a parfois besoin quand il y a trop de bruit ou trop de disputes. Cela fait parfois du bien d’être un peu dans le calme. Mais ce n’est pas la même chose de chercher la solitude et de se sentir rejeté parce qu’on est de trop.

Cela peut arriver dans une famille, quand une mère et son fils, deux frères ou deux soeurs sont tellement unis que le père ou le troisième enfant se sente comme rejeté, exclu de cette complicité qui se crée à côté de lui, sans lui. Il y a alors mille bêtes sauvages qui assaillent alors le malheureux. Jésus a voulu connaître personnellement cette déchirante expérience. Car c’est comme une blessure dans le coeur. C’est une plaie sanglante qui reste béante dans le coeur.

Jésus l’a vécu mais il n’était pas seul: des anges étaient là pour le servir. Et il y a toujours autour de nous des anges qui veillent sur nous. Cela peut être la mère de famille qui voit son grand garçon rester toute la journée sur son lit. C’est la femme, l’épouse qui voit son mari sombrer peu à peu dans la déprime parce qu’il se sent dépassé par les exigences de son travail. Il y a toujours des anges qui veillent sur nous. Et c’est vous, frères et soeurs, qui aujourd’hui soutenez par votre prière ceux qui se sentent rejetés. C’est vous qui pouvez apporter à chacun d’eux le rayon de soleil qui transpercera la nuit de leur exil.

Et nous-mêmes, chacun d’entre nous, en recevant la sainte communion, nous gardons notre coeur ouvert et notre esprit éveillé à cette présence aimante de Dieu dans notre vie de tous les jours.

Le Christ a connu dès le début de sa vie publique la pire des épreuves, celle de l’exclusion. Il l’a dépassée au moment de la résurrection, en recevant la grâce de l’amour de son Père. Et c’est cela qui nous permet à nous aussi de dépasser les épreuves les plus amères.