14e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2001-2002

" Mon joug est facile à porter, et mon fardeau léger ". Tellement plus facile à dire qu'à vivre surtout lorsque nous avons l'impression que tout nous tombe dessus, un peu comme si le ciel nous tombait sur la terre pour reprendre l'expression de la grande peur de la tribu d'Astérix et Obélix. Mais nous n'avons pas la chance de ces derniers : boire de la potion magique pour vaincre nos peurs, sauf pour Obélix qui comme vous le savez, était tombé dedans quand il était petit. Non, nous avons pas de potion, nous avons plus que cela : une foi, une confiance en ce Dieu qui se révèle en Jésus Christ et qui nous affirme : " mon joug est facile à porter et mon fardeau léger ".

Mais en quoi le joug de Dieu est il léger ? Me revient en mémoire, cette vielle histoire qui illustre très bien cette conclusion de Jésus. Un jour, un homme voit un petit enfant qui porte sur son dos un autre enfant qui était estropié. Il avait l'air de peiner sous le poids et avançait lentement, très lentement. Et malgré cela, les deux enfants souriaient, riaient. Ils ne semblaient pas heureux. Ils l'étaient et tout leur être rayonnait de ce bonheur. " C'est un bien lourd fardeau que tu portes sur toi " dit l'homme à l'enfant. " Non monsieur, ce n'est pas un fardeau répondit l'enfant, c'est mon petit frère ". La sagesse de l'enfant, de ce tout-petit laissa notre homme pantois. Dans ses mots à lui, l'enfant nous rappelle que ce qui peut nous sembler lourd à porter de manière rationnelle et réelle, est souvent léger lorsque c'est vécu dans l'amour.

Quand l'amour est au coeur de nos efforts, des défis que nous nous imposons pour grandir, parfois même pour survivre, le fardeau n'est plus fardeau mais expérience de vie. Seuls nous ne sommes pas capables de tout porter, c'est vrai. Nous avons besoin les uns des autres c'est-à-dire que nous nous portions les uns les autres. Et ce que le Christ nous invite ce soir (matin) c'est d'accepter de poser en lui les fardeaux qui nous semblent insurmontables.

Si ton joug est trop lourd, pose-le en celles et ceux que tu aimes. En le posant dans leur coeur, tu l'offres à Dieu qui le portera dorénavant avec toi. Bonheurs ou malheurs se posent en Dieu. Si nous le faisons au nom de l'amour, notre fardeau deviendra léger. Sur la croix, Dieu a pris tous nos fardeaux. Il partage avec nous ce poids en les portant. Ce que je vous affirme est clairement de l'ordre de l'irrationnel. Nous sommes au c½ur d'un mystère. Et ce dernier est le coeur de notre foi au coeur de nous-mêmes.

Heureusement pour nous d'ailleurs qu'il reste une part de mystère et d'inconnu dans nos vies. Il y a en effet un danger, un grand danger à vouloir tout comprendre. Le désir de connaissance nous honore mais je ne pense pas qu'il soit pour autant bon que nous nous y enfermions. Nous sommes et resterons toujours des questionneurs de vie, des chercheurs de Dieu. A force de vouloir tout comprendre, nous risquons de tomber dans le piège suivant : celui de penser que nous savons et entrer dans l'ère des certitudes qui nous enfermeront à jamais. Or si nous savons, comme le faisait remarquer à juste titre saint Augustin, nous n'avons plus besoin de croire puisque nous avons acquis la connaissance. Pourtant vivre sa foi, c'est passer sa vie à tenter de comprendre ce que nous croyons mais en reconnaissant que ce qui habite au plus profond de notre être est d'abord et toujours un mystère.

Un mystère qui ne peut se résoudre uniquement par les clés de notre raison rationnelle. Ce mystère se vit d'abord et avant tout au c½ur de nos émotions, de nos intuitions, c'est-à-dire de cette autre intelligence que les sciences humaines retrouvent aujourd'hui. C'est ce que les tout-petits de l'évangile avaient compris, le mystère de la foi se découvre, se dévoile, se révèle peu à peu, pas à pas dans le temps d'une rencontre, d'une relation et pas seulement dans les livres. Comme si Jésus nous disait que le mystère de la foi passe aussi par le coeur de l'être humain. Et c'est normal, puisque c'est à cet endroit précis que Dieu vit en nous. Le coeur est le coeur de la foi. Si ce que je vous dis est vrai, il ne me reste plus qu'à me taire pour que chacune et chacun entrent en soi pour vivre de cette foi.

Amen.