Evangile idéal en cette période du Mondial, même si la Belgique n'en n'est plus. Celles et ceux qui me connaissent savent bien que je ne suis pas un adepte du football loin s'en faut et pourtant ce soir (matin), sans faire de la récupération médiatique, je crois qu'il y a, d'une certaine manière, un lien entre ce sport et ce que nous célébrons. Ils sont d'abord douze disciples et maintenant septante deux à partir deux par deux. Partir. Voilà qu'un mouvement s'installe au coeur de notre évangile, au coeur de notre foi. Il faut bouger, annoncer, partager ce qui nous fait vivre.
L'Eglise que nous formons ne peut s'enfermer sur elle-même. Nous sommes parfois en tension entre un désir de vivre en cocon avec celles et ceux qui partagent nos convictions et une ouverture à celles et ceux qui n'en sont pas encore là. Il peut arriver que cet entre nous, ce bien-être ensemble prenne le dessus. L'élan de l'annonce de notre foi en est fortement diminué. Nous avons à vivre cela comme une faiblesse, une blessure que nous nous faisons à nous-mêmes. En effet, si nous nous enfermons dans une spirale d'absence d'annonce, nous ne penserons plus qu'à tous ceux et celles qui ont abandonné la foi et nous nous mettrons à gémir. Cette attitude est hélas trop facile et peut être même un peu lâche. Comme Jésus nous le rappelle ce soir (matin), nous devons nous lever et nous engager dans cette dynamique de la transmission de la foi en ce Dieu, Père de tendresse et de miséricorde. C'est la dynamique qui fait vivre, qui fait naître de nouvelles choses. La vie va à la vie, comme le dit si bien André Sève ; la vie n'appartient pas aux pleureuses, à ceux qui se confortent dans leurs lamentations. Ca nous donne bonne conscience et surtout, cela ne nous oblige pas à nous remettre en question. Mais voilà, vivre de la sorte, c'est passer à côté de l'évangile du Christ.
La mission des septante deux disciples est là, pour nous rappeler que contrairement à ce que l'on demande aux spectateurs d'un Mondial ou d 'un autre match de foot, nous, nous n'avons pas à nous installer dans les gradins, à y rester le plus calme possible pour ne pas troubler le bon ordre de la représentation. La mission à laquelle nous sommes conviés est tout le contraire. Quittons les gradins du stade et descendons sur la pelouse. C'est à nous, et seulement à nous, chacune et chacun selon ses dons, de jouer. Osons regarder en face notre dynamisme dans l'exercice de la contamination de la foi. Celle-ci est bonne et fait vivre, elle donne un sens à nos existences. La discrétion ne peut dès lors être de rigueur. Cela ne signifie évidemment pas entrer dans une démarche triomphaliste, mais simplement d'oser vivre une rencontre de partage sur l'essentiel de ce qui nous anime. Et, je crois pouvoir dire, qu'ici à Rixensart, nous sommes au sein de nos communautés paroissiales des privilégiés. Cependant n'oublions jamais que même si nos lieux de célébrations sont bien fréquentés durant l'année, ils sont et restent, malgré tout, des îlots dans un océan où Jésus est aujourd'hui encore fort absent.
Notre prière nourrie par la méditation de cet évangile ne doit pas nous conduire à simplement prier pour les vocations, comme s'il ne s'agissait que d'augmenter le nombre de celles et ceux qui assureront certaines tâches spécifiques au sein de nos communautés. Même si cette prière à toute sa valeur, elle risque d'être tranquillisante et démobilisatrice. Elle nous donne, elle aussi, bonne conscience. A toi, Esprit de Dieu de faire le reste. Prier le Père pour susciter des ouvrier n'a de sens, me semble-t-il, que si cette prière fait vibrer la communauté toute entière. C'est-à-dire lorsque celle-ci se sent pleinement responsable de son destin. Une communauté qui fuit ses responsabilités, fait mourir les vocations, par contre une communauté qui s'engage plus en avant les fait naître. Aujourd'hui encore, la moisson reste abondante, alors Père nous te prions : envoie des ouvriers, non pas pour nous permettre d'entrer dans une phase d'oisiveté, mais pour engendrer de nouvelles manières de nous engager au service de la foi. Amen.