Nous voici aujourd'hui sur la ligne de départ d'une nouvelle année liturgique : après S.Marc, c'est S.Luc qui va nous guider sur le chemin de l'Evangile. Et comme Luc est l'évangéliste de la prière, je vous propose de consacrer la 1ère période de cette année ( Avent, Noël, Epiphanie) à une méditation sur l'ART DE LA PRIERE.
UNE ACTIVITE TRES ARDUE
Art bien difficile ! Très difficile ! Lequel d'entre nous peut affirmer qu'il sait prier, qu'il prie très bien, qu'il prie assez ? En tout cas pas moi. Déjà il n'est pas toujours simple de parler à quelqu'un car nous avons des opinions différentes, nos mots n'ont pas toujours le même sens, nos passions nous entraînent. Mais du moins l'autre est là devant nous, nous le voyons, nous l'écoutons, nous remarquons ses réactions. Quant à parler à Dieu ? Nous ne le voyons pas, nous ne l'entendons pas, nous ne savons que lui dire, parfois même l'idée nous traverse qu'il n'existe peut-être pas, que nous parlons dans le vide Et puis d'ailleurs nous avons tellement de choses à faire : le travail, la cuisine, les courses, les nettoyages, la TV à regarder. Notre tête est pleine de préoccupations, notre c½ur déborde d'envies. Comment prendre du temps, parvenir à nous recueillir alors que notre esprit est assailli par un flux incessant de pensées, bombardé par les nouvelles du jour, noyé dans les images des télévisions ??
"Je n'arrive pas à me concentrer, à vaincre les distractions" dit-on. Là-dessus, je ne vous donnerai pas de conseils techniques ( Ni la Bible ni Jésus ne fournissent des méthodes de concentration). La prière est d'abord une question de conviction, de foi, de confiance.
LA PRIERE EST CONFIANCE EN UN AMOUR RECU
Je crois en un Dieu. --- Que me révèle-t-il sur ce qui est le plus important dans ma vie d'homme ? Le Seigneur nous a dit : " Le 1er commandement, c'est : Tu aimeras Dieu de tout ton c½ur, de toute ton âme, de toute ta force".
Donc la vie humaine n'est pas obéissance aveugle à des instincts ou à des sentiments mais elle est vocation, réponse à un appel. Notre vocation, c'est l'amour. L'amour n'est pas d'abord un sentiment, une passion, une chose : il est Quelqu'un. Dieu n'est pas un amour qui se substitue aux autres, qui se juxtapose aux autres mais l'Amour qui est la source des autres. Et c'est un amour auquel je peux faire une absolue confiance puisqu'il s'est manifesté, attesté dans l'histoire. "La preuve que Dieu nous aime, c'est qu'Il a donné son Fils qui est mort pour nous" écrit S.Paul. Jésus, son Evangile, sa Croix, sa Résurrection sont la preuve absolue, définitive que Dieu nous aime. Ainsi notre vocation, le sens de notre vie, c'est de recevoir cet amour, de l'accueillir, de nous ouvrir à lui au maximum, de nous laisser envahir par lui....et donc, en retour, de nous en émerveiller, de rendre grâce, de rendre amour pour amour...Et donc d'écouter Dieu et lui parler. Comment nous dire croyants, chrétiens, si nous ne parlons pas à Dieu, si nous ne lui donnons pas du temps, si nous recourons à lui uniquement lorsque nous avons des ennuis ? La conversion à la foi, si elle est authentique, devient conversation. Entre époux, entre amis, l'amour est échanges, rencontres, paroles, discussions. Il en va de même dans la foi. En effet la foi ne se réduit pas à la gentillesse, à l'honnêteté des m½urs, à la bienfaisance, à des cérémonies. Les athées sont très bienveillants, et ils ne croient pas. Les bouddhistes sont très bienveillants et ils ne croient pas en un Dieu : ils ne prient pas, ils méditent.
LA PRIERE DANS LE QUOTIDIEN
Donc un chrétien est quelqu'un qui prie chaque jour. C'est le premier enseignement que Joseph et Marie ont appris à leur enfant Jésus : au lever et au coucher, tu te tourneras vers Jérusalem et tu prieras YHWH ton Dieu. Et pendant la journée, quoi que tu fasses, où que tu sois, tu essaieras de penser à Dieu qui est ton Père des cieux : dans la joie, tu le remercieras, dans la peine, tu l'appelleras au secours, en tout tu le béniras. Au fond la prière est se mettre en état d'éveil- c'est bien ce que nous dit le premier évangile de l'année :
Jésus parlait à ses disciples de sa venue : " Il y aura des signes dans le ciel...Sur terre, les nations seront affolées...Les hommes mourront de peur dans la crainte des malheurs.. Alors on verra le Fils de l'homme venir dans la nuée, avec grande puissance et grande gloire. Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête car votre libération approche. Tenez-vous sur vos gardes de crainte que votre c½ur ne s'alourdisse dans la débauche, l'ivrognerie et les soucis de la vie....et que ce Jour-là ne tombe sur vous à l'improviste. Comme un filet, il s'abattra sur tous ! Restez éveillés et priez en tout temps ainsi vous serez jugés dignes d'échapper à tout ce qui doit arriver et de paraître debout devant le Fils de l'Homme."
La fin d'année est un temps propice à la question capitale :Vers quoi allons-nous ? Vers un temps de jouissance, d'illuminations, de gaspillage, répond notre société qui a gommé le caractère religieux de Noël en substituant au bébé de la crèche un père Noël hilare et jouisseur, symbole d'un monde où certains peuvent tout s'offrir tandis que des millions croupissent dans la misère. L'Eglise, elle, nous met devant la vérité : oui il y aura des chamboulements, des peurs mais nous allons vers Celui qui vient vers nous, le Fils de l'homme, l'Homme qui nous a appris comment il fallait vivre dans son Royaume de pardon et de paix et qui jugera le monde en toute équité. Réjouissez-vous, dit Jésus à ses disciples : votre libération arrive. Mais pour échapper et subsister, un seul remède : RESTEZ EVEILLES...PRIEZ TOUJOURS.
Cela ne veut naturellement pas dire :marmonner des prières sans arrêt, vivre dans l'anxiété, trembler de peur. Au contraire ; priez et vous serez libérés de la crainte, priez et vous vivrez dans la joie, priez et vous serez éveillés. C'est-à-dire vous cesserez d'être des somnambules qui marchent au gré de besoins toujours inassouvis et de jalousies grinçantes. Vous serez éveillés : vous connaîtrez les vraies valeurs, vous saurez quel est l'enjeu de la vie, vous sentirez les décisions à prendre. Vous serez debout et non avachis, debout et non écrasés