L'AVENT GARDE .... EN EVEIL
Entre chrétiens, nous aurions dû envoyer nos cartes de v½ux cette semaine puisque ce 1er décembre marque pour nous le début de la nouvelle année. Nous ne la commencerons pas par de banals souhaits de « BONNE ANNEE !», émouvants d'espoir inefficace : chrétiens, nous recevons et tentons de vivre et de transmettre l'Evangile que notre Seigneur nous offre par l'intermédiaire de son Eglise.
Au seuil d'une nouvelle étape de notre vie, il dit l'essentiel pour mener une ANNEE BONNE SELON DIEU : - vers quoi ou qui allons-nous ? quel est le but à atteindre ?
- quelle attitude fondamentale prendre aujourd'hui ?
LE TERME DE L'HISTOIRE
Jésus parlait à ses disciples de sa venue :?« L'avènement du Fils de l'homme ressemblera à ce qui s'est passé à l'époque de Noé. A cette époque, avant le déluge, on mangeait, on buvait, on se mariait, jusqu'au jour où Noé entra dans l'arche. Les gens ne se sont doutés de rien, jusqu'au déluge qui les a tous engloutis. Tel sera aussi l'avènement du Fils de l'homme. Deux hommes seront aux champs : l'un est pris, l'autre laissé.
Deux femmes seront au moulin : l'une est prise, l'autre laissée.
Ce texte est extrait de l'ultime grand enseignement que Jésus donne à ses disciples. Alors qu'il va disparaître, exécuté de façon cruelle et ignominieuse, il leur assure qu'il viendra un jour dans la gloire. Le prophète Daniel avait eu une vision sur le déroulement de l'histoire : après la succession des gigantesques puissances qui se seront disputées la maîtrise du monde par l'usage d'une violence féroce où seule règne la loi de la jungle (le plus fort écrase le petit), surviendra pour finir un « Fils d'homme » à qui Dieu remettra la royauté universelle : « Avec les nuées du ciel vient comme un Fils d'homme : il arrive jusqu'au Vieillard (figure symbolique de Dieu). Et il lui est donné souveraineté, gloire et royauté ; tous les peuples le serviront. Sa souveraineté est une souveraineté éternelle qui ne passera pas et sa royauté ne sera jamais détruite » (Dn 7,13).
Jésus affirme que s'il est venu sur terre en condition humble et vulnérable, il est bien ce mystérieux personnage. Lors des tentations dans le désert, il a refusé la royauté universelle que satan lui présentait s'il utilisait, comme lui, le mensonge, la ruse et la violence. Il a payé ce refus de sa vie, mais la croix va devenir son trône ; ressuscité, il recevra de son Père toute puissance (28, 18) et un jour, il viendra dans la Gloire de Dieu.
Dans l'intervalle entre les deux venues, Jésus ne promet pas aux siens une existence facile : ils subiront guerres, épidémies et même persécutions (24, 7-10) mais qu'ils gardent l'espérance. Un monde où les corrompus amassent des fortunes et affament leurs frères, où les pervers torturent les petits, où les orgueilleux sèment la ruine, ne peut subsister. Sinon le mal serait dieu.
Est-ce vrai ? Un condamné qui sera juge ? Un crucifié qui sera vivant ? L'amour qui l'emportera sur la méchanceté et la haine ? Beaucoup achoppent sur la promesse de Jésus : n'est-ce pas qu'un rêve pour nous consoler ? Car on ne voit rien venir. Dans l'incertitude, ne vaut-il pas mieux vivre comme les autres, profiter des opportunités qui se présentent, croquer aux fruits des plaisirs, « cueillir dès aujourd'hui les roses de la vie », faire preuve de force et d'intransigeance ?
Pour nous mettre en garde, Jésus fait appel au vieux mythe de Noé : beaucoup, occupés de l'immédiat, ne perçoivent pas les dangers qui menacent, oublient qu'ils vivent sur une terre fragile, s'étourdissent dans les divertissements. On se moquait de Noé qui préparait un avenir pour les siens, on ricanait sur Jésus, l'utopiste fiché sur une croix qui démentait tout ce qu'il avait annoncé, on se gaussait des apôtres qui prévoyaient la ruine de l'Empire romain, on ridiculise encore les prophètes qui alertent sur le péril des déséquilibres du monde.
LE JUGEMENT
« Un pris, l'autre laissé... » : paroles mystérieuses. Le Fils de l'homme sera juge : cette perspective suscite la peur, l'angoisse, elle a inspiré les images affreuses des damnés rôtissant en enfer. Pourtant Jésus est sobre, il explique peu l'état final. Un jour, dit-il, il y aura jugement en toute justice. Car le Fils de l'homme n'a rien d'un Dieu impitoyable qui comptabilise les fautes, il ne se prononce pas sur des rumeurs, il sait la faiblesse des hommes, il pénètre au plus profond de notre vérité, si déformée à la vue extérieure, il nous perce avec plus de lucidité que nous ne nous jugeons nous-mêmes. Il ne se confond pas avec notre conscience scrupuleuse ou laxiste.
Et puis il est le Seigneur de Zachée le voleur, du bon larron le violent, de Pierre le renégat, des apôtres les lâches. Il réalise ce qui nous paraît toujours incompatibles : l'union de la justice et de la miséricorde. Tout n'est pas recevable mais tout peut se comprendre. Personne ne fut jamais et ne sera jamais pur de tout péché. Nous ne nous fions pas à nos ½uvres mais à notre foi.
L'annonce du jugement demeure une bonne nouvelle.
LA VIGILANCE INDISPENSABLE
« Veillez donc, car vous ne connaissez pas le jour où votre Seigneur viendra. Vous le savez bien : si le maître de maison avait su à quelle heure de la nuit le voleur viendrait, il aurait veillé et n'aurait pas laissé percer le mur de sa maison. Tenez-vous donc prêts, vous aussi : c'est à l'heure où vous n'y penserez pas que le Fils de l'homme viendra ».
Le Jour de l'avènement échappera toujours à toute prévision et tout calcul. Il ne se fixe pas sur une date précise du calendrier mondial puisqu'il s'étend du jour de la Résurrection de Jésus jusqu'à son retour glorieux. C'est pourquoi notre travail de conversion ne doit pas être remis à plus tard : puisque le jour peut survenir demain, c'est chaque « aujourd'hui » qui est le moment d'une lutte urgente, d'un changement nécessaire, d'une confiance sans limites.
Nous devons veiller avec la plus grande attention sur notre foi : autour de nous et même en nous, des forces agissent pour dissoudre nos certitudes, torpiller nos résolutions, instiller le scepticisme. Par millions, des baptisés des pays occidentaux se sont laissé voler « le trésor de la foi ». S'il est prévenu, le propriétaire ne va pas dormir : comme lui, nous sommes prévenus. Non pour nous ronger de remords, ni pour vivre dans l'appréhension, ni pour nous raidir dans une piété morose, ni pour nous détourner de toute joie. Mais pour être éveillés sur l'enjeu réel de l'existence, sur les valeurs à défendre, sur le mal à combattre. « Vigilance » : ultime recommandation du Seigneur.
L'AVENT NOUS GARDE ... EN EVEIL
Sur le seuil de l'année nouvelle, nous voilà bien équipés. Sachant vers qui nous allons, sûrs qu'un nouveau monde de justice et de paix viendra, mis en garde contre les dangers, instruits de l'attitude à garder, nous pouvons entrer en AVENT.
Au c½ur d'une humanité menacée par des périls mortels (nucléaire, pollution, drogues, réchauffement climatique...), les disciples de Jésus partent en avent / en avant. Commencer une nouvelle année aujourd'hui symbolise notre fonction essentielle : nous sommes comme les éclaireurs, les estafettes que le Seigneur envoie pour précéder et entraîner leurs frères. L'AVENT nous garde dans l'éveil.
Notre attente n'est pas celle d'un père Noël rondouillard qui n'appelle qu'à la consommation et à l'ivresse mais celle de la Gloire du Fils de l'homme qui vient glorifier les pauvres que nous sommes.
Et si le Jour final reste à jamais inconnu, le dimanche avec l'Eucharistie est chaque fois « le Jour » où le Seigneur vient à notre rencontre pour nous rassembler (24, 31) dans le partage de son amour. Il a créé son Arche, l'Eglise, dont le mat est sa Croix et où tout homme est invité à entrer. Quelle que soit la violence des tempêtes, les portes en restent ouvertes pour que nous ne restions pas figés dans la piété des « bons pratiquants préservés» mais pour que, inlassablement, nous tendions la main à nos frères et s½urs perdus qui se débattent dans les malheurs du temps.
----------- Ainsi la Parole de Dieu n'est pas un v½u illusoire mais la certitude d'une ANNEE qui sera BONNE parce que vécue dans la confiance de la foi et la dynamique de l'espérance.
1er dimanche de l'Avent, année A
- Auteur: Devillers Raphaël
- Temps liturgique: Avent
- Année liturgique : A
- Année: 2013-2014