23e dimanche ordinaire, année C

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2000-2001

Quand j'étais adolescent, au grand dam de mes parents il est vrai, j'avais une admiration sans borne pour un chanteur français. J'écoutais toutes ces chansons et ma grand-mère, comme toute bonne grand-mère, c'est-à-dire complice de ses petits-enfants, m'envoyait les articles qu'elle trouvait sur ce chanteur. Pour rien au monde je n'aurais raté une de ses émissions de télévision même si nous n'avions que la RTBF en noir et blanc à cette époque-là. Je vous disais au grand dam de mes parents parce que le chanteur était tout simplement Claude François. Pour eux, il n'était pas une référence culturelle et spirituelle absolument nécessaire à mon épanouissement personnel. Ce fanatisme m'est passé, je vous rassure même si aujourd'hui lorsque j'entends une de ces chansons, les paroles me reviennent à l'esprit.

Je ne suis pas sûr que Claude François, de son vivant, ait jamais imaginé qu'un jour il servirait d'exemple pour aider à la compréhension d'un évangile. Et pourtant c'est à cet exercice que je souhaite me livrer. Claude François pour moi, je ne sais qui pour d'autres. A une époque de nos vies, nous avons eu ou nous avons encore des modèles médiatiques que nous admirons. Ces derniers appartiennent parfois au domaine de la chanson, parfois à celui des sports, de la culture ou encore de la politique. Et notre société continue de favoriser cela en proposant des programmes où l'aventure est extrême, à la limite d'une certaine éthique. Nous nous passionnons et nous oublions que ces prouesses spectaculaires supposent souvent des années d'abnégation, d'efforts inconditionnels ainsi qu'une minitieuse préparation physique, psychologique et technique. Il leur a fallu tant de temps à tous ces gens et nous ne pouvons pas nous contenter d'un simple éblouissement. S'il en va ainsi pour nos idoles médiatiques, à plus forte raison fait constater Jésus, il en va de la sorte dans le champ de la foi. La foi que nous sommes invités à vivre, le chemin sur lequel nous marchons ne se décide pas sur un coup de tête. La foi nous a un jour été transmise. Enfant, elle a grandi en nous puis sont venus des temps de doute, de révolte, de discernement. Et puis un jour nous nous sommes assis, nous nous sommes arrêtés pour contempler un mystère qui peut donner sens à nos existences. La route de la foi n'est pas un cul de sac mais une longue route, celle de la vie. Elle demande un effort d'intelligence, d'évaluation de ce que nous sommes, de ce que nous ressentons. Elle se dévoile à l'écoute de nos intuitions, pétris de nos relations. Un peu comme le roi, un peu comme le constructeur de la tour de l'évangile : nous réfléchissons, nous méditons. La foi en Dieu se découvre au c½ur de notre propre mystère, dans ce lieu insondable de nos êtres. Elle s'y révèle dans un silence intérieur. Ce silence-là se trouve en nous. Il est au plus profond de notre intime. Oui, c'est à cet endroit précis que la foi éclot en chacune et chacun de soi. Mais pour se faire, nous devons nous arrêter, nous asseoir face à nous-même pour mieux découvrir et aimer Celui qui a choisi de demeurer à jamais en nous. Ce n'est pas un simple exercice intellectuel mais plutôt la quête d'une émotion qui nous fait saisir que jamais nous ne serons seul. Dieu s'inscrit au c½ur de l'amour que nous vivons, que nous donnons mais aussi que nous recevons.

La foi qui nous a conduit en cette église ce dimanche est un chemin, une longue et belle route mais à condition d'y marcher dessus. En prenant le départ, en reprenant le départ après chacun de nos arrêts, nous acceptons que nous ne connaissons ni la durée, ni le tracé exact du parcours. La vie nous montre simplement que nous traverserons des obstacles mais aussi des surprises merveilleuses. Nous affronterons des moments de doute et de découragement. Nous trébucherons. Puis viendra le temps de l'émerveillement, de la joie d'avoir accompli sa vie. Pour cette performance accomplie, il n'y aura pas de récompense, de caméra. Non au bout de la route, il y a une lumière et derrière celle-ci la promesse et l'espérance d'une rencontre avec Celui qui nous aura toujours accompagné, qui aura été à nos côtés, Jésus Christ Ressuscité. Derrière la lumière, dans la foi, Dieu donnera tout son sens au chemin parcouru. Amen.