La question -fameuse- de Jésus à ses disciples en cette première moitié de l'évangile de Marc est une question qui nous es renvoyée, à nous, chrétiens du 21° siècle : « Pour vous, qui suis-je ? ».
Les réponses étaient déjà variées et indécises du vivant de Jésus, elles l'ont été plus encore dans les premiers siècles du christianisme et jusqu'à nos jours : simple prophète adopté par Dieu, simple apparence humaine de la Parole divine, personnage tantôt homme, tantôt Dieu, pure nature divine... pour en rester aux « classiques » parmi ce qu'on appelle les « hérésies » chrétiennes. Mais il y en eut bien d'autres où des dénominations et des concepts chrétiens, vite devenus incontournables, étaient simplement empruntés et plaqués sur des systèmes philosophico-religieux totalement étrangers et incompatibles dans leur fond par rapport au christianisme. Après 4 siècles d'expériences et de polémiques, l'Eglise voulut trouver les mots pour redire la foi profonde des apôtres. C'est ce qui fait du Credo que nous confessons chaque dimanche un texte devenu un peu obscur parce qu'il date (de l'an 321 pour l'essentiel) et que si peu de chrétiens (ni même l'enseignement religieux) ne s'intéressent à l'histoire de l'Eglise, à l'histoire de la foi, qui ne pourrait pourtant que nous enrichir et nous rendre un peu plus solide.
Car les polémiques sur l'identité du Christ ne sont pas terminées. Elles renaissent sans cesse, les unes procédant d'une honnête volonté de recherche, d'autres volontairement pernicieuses, s'exprimant sous forme d'ouvrages savants, de romans de gare ou de films à scandale. Le New Age n'est sans doute pas le dernier des hochepots pseudo-philosophiques et religieux à s'en emparer. Le chrétien est là, comme le prophète Isaïe. Comme lui, il ne devrait ni se révolter, ni se dérober aux coups et quolibets de ses détracteurs. Il devrait être capable d'accueillir toutes les polémiques, même les plus injurieuses, sans condamner personne à mort mais en acceptant le débat. L'Eglise elle-même n'a pas toujours été fidèle à cette attitude d'ouverture, précisément dans les moments où elle a été plus soucieuse de son ancrage sociologique que de son ancrage biblique.
Cette attitude d'ouverture ne signifie cependant pas ouverture au relativisme ni au laxisme. Le serviteur de Dieu, le disciple, est aussi celui qui ne se révolte ni ne se dérobe devant le contenu et l'exigence de la Parole de Dieu. Il est celui qui écoute cette Parole pour s'en instruire et pour en témoigner. En témoigner « valablement », car il faut être prêt à s'expliquer sur sa foi comme au tribunal ; il faut être prêt à s'avancer soi-même et dire : « comparaissons ensemble ! ». C'est le deuxième pas que veut nous faire faire l'évangile. Il ne suffit pas de rapporter des opinions ni d'y croire que comme à une opinion. Jésus demande que l'on s'implique, que l'on s'engage, personnellement, et non pas seulement par rapport à une opinion mais par rapport à une relation personnelle. Et entre Dieu et l'homme, cette relation personnelle est celle de la foi.
La foi ! L'épître de Jacques complète utilement le tableau qui risquerait, sinon, d'être abstrait. La foi sans les ½uvres est une foi morte ! Non seulement la foi nous implique dans nos convictions, mais elle implique que l'on agisse, d'une action qui soit bien sûr témoignage de l'incarnation concrète du Salut annoncé par le Christ et donc pas de n'importe quel genre d'acte de bienfaisance. Voilà bien pourquoi la question de l'identité du Christ est-elle aussi importante maintenant qu'au 4° siècle ou que quand elle fut posée à Pierre. Toute notre vie en sera marquée (et peut-être même tel morceau de l'histoire du monde) si nous répondons au Christ comme et avec Pierre : « Tu es le Messie ».