Décidément, le Christ nous étonnera toujours. Voilà qu'il fait maintenant l'éloge du détournement d'argent. Cela nous rappelle une première chose essentielle. Dieu dépasse entièrement notre intelligence. C'est déjà compliqué de comprendre son conjoint, son confrère, sa collège. Il y a un immense danger : c'est de vouloir corriger les saintes Ecritures de façon à ce que Dieu corresponde à l'image que nous nous en faisons. Dieu est amour et miséricorde. Il ne peut donc condamner qui que ce soit. C'est sur cette conviction que certains d'entre nous aimeraient bien supprimer certains passages de l'Ecriture. Et aujourd'hui c'est le cas. Jésus aujourd'hui semble faire l'éloge de la roublardise. Admettons que l'explication que je donne est incomplète et en partie insatisfaisante. L'Evangile ne s'explique pas. Il se médite. Il peut nous déranger, nous surprendre.
Prenons maintenant cette perspective. Jésus fait l'éloge de la débrouillardise, de l'inventivité, de la créativité. Combien de fois est-ce que nous ne nous durcissons pas après une dispute. On s'accroche et on se durcit sur ses positions. On défend avec de plus en plus de vigueur sa propre opinion. Et c'est la logique infernale de la destruction. Cela commence par une dispute pour passer à une crise et aboutir à un désastre. Jésus dit au contraire qu'il faut faire preuve de souplesse et d'inventivité. Oui, mais - diront certains - cela risque de nous obliger à renoncer à des choses importantes et essentielles. Jamais nous ne pouvons admettre de nous trahir nous-mêmes. Et voilà que se pose la question de savoir quelle est la différence entre la fidélité et l'entêtement.
On en connaît des personnes qui s'accrochent à leurs idées et leurs positions. Ils sont parfois tellement endurcis que cela en devient une obsession. Alors quelle est la différence entre la fidélité et l'entêtement ? Certainement pas le bonheur ou la joie. Les apôtres et beaucoup de chrétiens - songeons aux chrétiens du Proche et du Moyen Orient - ont été et sont fidèles à la foi chrétienne au point d'être martyrisés et mis à mort. Non ! La fidélité n'est pas toujours source de confort et de facilité. Elle peut être source de souffrance et de renoncent qui aboutit finalement à la résurrection d'une vie toute donnée à Dieu. L'entêtement est source de conflits et de rejets. Toute personne rencontrée devient un ennemi, un opposant à l'idée que l'on défend. Par contre, les apôtres n'ont pas maudit leurs persécuteurs. Jésus lui-même sur la croix a demandé à son Père de donner le pardon à ses bourreaux « parce qu'ils ne savent pas ce qu'ils font ». Les entêtés rejettent et maudissent leurs voisins et même leurs proches. Et c'est là sans doute l'enseignement de Jésus. Face à une difficulté ou un conflit, Jésus nous invite à retrouver l'essentiel : construire une communauté, une fraternité nouvelle. Dieu lui-même a renoncé à ses droits et à son confort. Il a renoncé à son amour-propre pour venir vivre parmi nous et mourir pour nous. C'est à nous aussi de l'imiter. Avec le Christ, retrouvons la joie d'inventer aujourd'hui une manière nouvelle de vivre avec celui ou celle qui nous a trahi, menti, déçu afin qu'avec lui nous puissions vivre la résurrection qu'apporte le pardon.
25e dimanche ordinaire, année C
- Auteur: Henne Philippe
- Temps liturgique: Temps ordinaire
- Année liturgique : C
- Année: 2012-2013