Cet Evangile est sans doute une des pages les plus dures de la Bible. On y voit la souffrance du riche, on y entend ses cris désespérés, on y remarque l’apparente indifférence d’Abraham. C’est que le riche est prisonnier de son propre égoïsme. Comme nous le savons, l’Evangile ne condamne pas la richesse en tant que telle. Non, être riche n’est pas un péché. Et la première lecture décrit avec complaisance le luxe scandaleux dans lequel se vautre une certaine aristocratie samaritaine. Et ce n’est pas la jalousie du pauvre par rapport au riche qui anime cette page. C’est la révolte face au manque de solidarité. Et c’est cet aveuglement du riche par rapport au pauvre qui s’exprime même dans la prière du riche. Vous l’entendez à l’intérieur de l’évangile : le riche prie Abraham de lui envoyer Lazare pour qu’il vienne le soulager. Le riche prie d’abord pour lui. Ensuite il prie pour les gens de sa maison. Il n’entend pas ce que lui dit Abraham : « tu as profité de la vie et tu n’as pas vu le pauvre qui était devant ta porte ». Non, le riche continue et prie pour ses frères. Il y a une première chose à noter : c’est que mêmes les damnés prient. Au ciel, les anges et les saints louent Dieu pour sa beauté et sa grandeur. Ils prient aussi pour nous et ils nous soutiennent par leurs prières. Et aujourd’hui, dans cet Evangile, nous lisons que les damnés eux aussi prient Dieu. Mais ils prient pour eux et rien que pour leurs proches, mais pas pour tout le monde. Ils prient pour le petit confort, mais ils ne reconnaissent pas leurs erreurs. Et c’est pour moi une grande question. Je prie Dieu et j’aime prier Dieu, mais est-ce que je ne dis pas des bêtises ? Est-ce que je ne suis pas en train de répéter des formules vides ou – pire encore – est-ce que je ne suis pas en train d’agir comme un sale petit gamin qui tape du pied qui hurle pour la vingtième fois : « je veux ceci, je veux cela », alors que la prière devrait ouvrir mon cœur et mon intelligence à la grandeur et à la beauté du Seigneur ? Lorsque Jésus était au jardin des oliviers, il a tout d’abord dit : « Père, s’il est possible, éloigne de moi cette coupe ». C’est une demande personnelle, mais il a aussitôt ajouté : « mais non pas ma volonté, mais ta volonté ». C’est une attitude de confiance. De même qu’un enfant a confiance en sa mère, même quand celle-ci le conduit chez le dentiste, de même nous sommes invités à nous laisser entraîner par Dieu dans des chemins inconnus, difficiles parfois, mais toujours pleins de sa présence. Oui, le riche reste égoïste même dans sa prière. Ouvrons donc notre cœur et nos yeux aux pauvres qui nous entourent et laissons-nous transformer par leur présence car c’est déjà Dieu qui nous appelle à travers eux.
26ème dimanche ordinaire
- Auteur: Philippe Henne
- Date de rédaction: 25/09/16
- Temps liturgique: Temps ordinaire
- Année liturgique : C
- Année: 2015-2016