27e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Puis-je vous inviter à imaginer la situation cocasse suivante : tout à coup, chacune et chacun d'entre vous êtes pris d'un désir immense de m'offrir un cadeau. Comme vous souhaitez que celui-ci me plaise, vous vous renseignez sur mes goûts, sur ce que je n'ai pas encore. Au terme de cette recherche, vous prenez ensuite le temps d'aller dans un magasin pour acheter ce que vous avez choisi de m'offrir. Et tout heureux de cet achat, vous venez vers moi avec votre cadeau. Vous me l'offrez et je vous remercie chaleureusement et je vous montre à quel point je suis touché de cette attention. Devant vous, je l'ouvre et je me réjouis de ce que je viens de recevoir. Puis, soudainement, je prends votre cadeau et je le remets à la personne qui se trouvait à côté de moi et que vous ne connaissez même pas en lui disant : « regarde ce que je viens de recevoir, c'est un cadeau merveilleux. Je l'aime tellement qu'en signe d'amitié, je te le donne ». Vous risquez, non seulement d'être ébahis de mon geste, mais sans doute aussi un peu déçus. Vous aviez tellement réfléchi et pris votre temps et voilà que ce cadeau ne reste pas plus de quelques secondes entre mes mains. Pourtant, puisque vous me l'avez donné, il est à moi. J'en fais donc ce que je veux. Vous ne pouvez pas le reprendre. Comme le souligne l'adage : « donner, c'est donner ; reprendre, c'est voler ». Je n'aurais donc pas de compte à vous rendre. Rationnellement sans doute, émotionnellement, je crois que c'est plus compliqué car entre le donneur et celui qui reçoit, il existe une relation. Tout cela n'est pas neutre. Dépenser beaucoup pour quelqu'un que nous aimons, nous dérange souvent moins que dépenser peu pour un cadeau d'obligation. La valeur mise dans l'objet dépend souvent de l'intensité de nos sentiments.

S'il en est ainsi pour nous, qu'en est-il de Dieu ? Lui aussi nous a offert quelque chose de merveilleux : la Création, la possibilité d'offrir la vie et ensuite de la vivre pleinement, intensément. Et Dieu semble tellement aimer ce qu'il nous a donné, qu'il met tout en ½uvre pour que son bien soit protégé au mieux en l'entourant d'une clôture, en y creusant un pressoir et en y bâtissant une tour de garde. Non seulement, il nous fait don de cette vie reçue mais il cherche à nous offrir le meilleur environnement possible pour que nous puissions à notre tour porter des fruits. Nous pourrions, à son égard, attendre que puisqu'il nous a donné tout cela, au nom de notre liberté personnelle, nous en fassions ce que nous voulons. Cela nous appartient maintenant et lui n'a plus qu'à se retirer sur la pointe des pieds. Un peu comme lorsque le facteur nous apporte notre courrier le matin. Il le dépose et puis, il poursuit sa route car il a accomplit son devoir.

Une différence cependant existe, la Création et la Vie ne sont pas des dons instantanés ; ils sont plutôt continus. Chaque seconde de temps m'est donné à vivre tant que je vis. Puisque ces dons sont continus, Dieu ne cesse d'être à nos côtés et à nous accompagner dans l'Esprit Saint pour que nous prenions soin de ce que nous avons reçu. C'est aussi simple que cela mais pour le comprendre, cela nécessite que nous aussi nous soyons ou nous entrions en relation avec le Père, que nous acceptions que Dieu n'est pas simplement une entité qui a donné quelque chose puis qui s'en est allé vaguer à ses propres occupations sans se soucier de ce qu'il nous a laissé. Dès l'instant de la création de l'humanité, le Père et le Fils dans l'Esprit cherchent à entrer en relation avec nous. Une relation qui se transcende dans nos relations d'amour et d'amitié vécues en vérité. Une relation qui se dévoile au plus intime de notre intime dans la prière qui est cette conversation avec Dieu en qui nous posons nos préoccupations, nos joies et nos bonheurs. Dieu nous a donné quelque chose de merveilleux et il souhaite que nous en profitions. Il est devenu la pierre angulaire de nos vies. C'est cela l'½uvre du Seigneur, une merveille sous nos yeux.

Il est vrai que la vie nous surprend parfois et nous sommes alors confrontés à l'expérience de la souffrance physique, mentale ou encore émotionnelle. Nous nous sentons intimement lier à celle-ci comme si le « je pense donc je suis » de Descartes était devenu en nous « je souffre donc je suis ». Dieu ne veut pas notre souffrance, il ne nous l'impose pas comme une punition ou un chemin vers Lui. Elle est la conséquence pour certains de notre nature humaine faillible, pour d'autres de nos histoires personnelles blessées. Et, le Père vient surgir au c½ur de cette réalité en nous proposant un sacrement de la vie, un sacrement où l'Esprit se donne à celles et ceux qui le souhaitent pour les aider à traverser ce qui est actuellement lourd et douloureux à vivre. Le sacrement des malades qui va être donné dans quelques instants est ce sacrement de l'humilité où nous laissons Dieu venir en nous pour qu'il nous accompagne sur notre chemin de vie. Que celles et ceux qui souhaitent le vivre s'avancent pendant que la communauté ici présente les porte dans sa prière. Amen.