En entrant à Jérusalem, en s'installant pendant plusieurs jours (les derniers avant la fête de la Pâque !!) sur l'esplanade du temple, en enseignant le peuple, en osant dénoncer l'hypocrisie et le mensonge de certaines autorités religieuses, Jésus était pleinement conscient des dangers qu'il encourait. Mais "il fallait" parler, proclamer la vérité, dénoncer les ornières du système car la dérive religieuse est pire que l'occupation étrangère, les malversations ou la débauche.
Aux groupes de grands prêtres et d'anciens qui tentent de le déstabiliser, Jésus réplique sèchement par trois paraboles dont nous avons entendu les deux premières : 1ère parabole :"Les deux fils" : dire OUI à Dieu oblige à une conversion coûteuse qui va bien plus loin que la pratique des cérémonies. Toutefois le NON de certains peut se convertir en OUI réel.
2ème parabole : "Les vignerons" : il faut travailler dans la vigne de Dieu, prêter l'oreille à ses envoyés et donner le fruit que Dieu exige : justice et droit. Sinon on sera exclu et remplacé par d'autres.
La 3ème parabole aujourd'hui reprend la même thématique de l'appel mais en éclairant la profondeur d'amour à laquelle nous sommes promis.
DIEU INVITE AUX NOCES DE SON FILS
Le Royaume de Dieu est comparable à un roi qui célébrait les noces de son fils.
Contre le danger de rabaisser l'Eglise au niveau d'une institution (inscription, réunions, rites, vie morale régulière...), il nous est rappelé ici une vision beaucoup plus profonde. Dieu ne veut pas se laisser enfermer dans les idées que nous nous faisons de Lui : divinité lointaine, tyran arbitraire, juge implacable...... Il aime tellement ses créatures humaines qu'il veut s'en approcher au point de s'unir à elles. Ni contrat ni fusion, divinité et humanité s'unissent en des noces mystiques en Jésus. Moïse et les prophètes (comme tous les enseignants) demeuraient séparés de nous : Jésus, Fils de Dieu et fils de l'homme, peut nous rejoindre dans l'être.
Prétention exorbitante mais qu'il osait proclamer clairement lorsqu'il avait le front de dîner chez Matthieu en compagnie des publicains pécheurs et qu'il avait lancé aux pharisiens scandalisés : " Les invités à la noce peuvent-ils être en deuil et jeûner tandis que l'Epoux est avec eux ?". ( Matth 9, 15). Le projet de Dieu étant la réalisation de ce "mariage" et celui-ci ne pouvant s'accomplir que dans la liberté des partenaires, Dieu ne cesse d'inviter, d'appeler, de convoquer...Mais hélas, il se heurte à notre résistance :
Il envoya ses serviteurs pour appeler à la noce les invités, mais ceux-ci ne voulaient pas venir. Il envoya encore d'autres serviteurs dire aux invités : " Voilà : mon repas est prêt, mes b½ufs et mes bêtes grasses sont égorgés : tout est prêt : venez au repas de noce !". Mais il n'en tirent aucun compte et s'en allèrent, l'un à son champ, l'autre à son commerce. Les autres empoignèrent les serviteurs, les maltraitèrent et les tuèrent.
Quelle tristesse ! Si nous sommes invités dans un château, chez une vedette du spectacle ou du sport, nous tressaillons de joie, nous nous préparons avec soin, nous nous pressons, le c½ur en fête, et dès le lendemain, nous n'en finissons pas de raconter tous les détails de cette réception. Par contre, quand Dieu invite gratuitement les hommes à prendre part au banquet le plus extraordinaire - puisqu'il s'agit de partager la VIE DIVINE -, alors beaucoup hésitent, allèguent des excuses, déclinent l'invitation : "Je n'ai pas le temps, j'ai beaucoup à faire, je réfléchirai..." Toutes les personnalités sont intéressantes à fréquenter...sauf Dieu !!!
Et même - le comble ! - il y a des gens tellement excédés par les rappels des messagers de Dieu qu'ils les molestent, les injurient, et parfois les suppriment !
Le roi se mit en colère : il envoya ses troupes, fit périr les meurtriers et brûla leur ville. Comme dans la parabole précédente des vignerons, ceci semble faire allusion à l'événement de l'an 70 lorsque les Romains écrasèrent la révolte juive, détruisirent la ville et incendièrent le temple. On sait en effet que les chrétiens du temps ( donc les communautés de Matthieu ) interprétèrent cette catastrophe comme le châtiment d'Israël qui avait rejeté son Messie Jésus.
Alors le roi dit à ses serviteurs : " Le repas de noce est prêt mais les invités n'en étaient pas dignes. Allez donc aux croisées des chemins : tous ceux que vous rencontrerez, invitez-les au repas de noce". Les serviteurs allèrent sur les chemins, rassemblèrent tous ceux qu'ils rencontrèrent, les mauvais comme les bons. Et la salle de noce fut remplie de convives.
Les hommes ne peuvent pas faire échouer le projet de Dieu : Israël a refusé de croire ? Alors Jésus ressuscité envoie ses disciples dans le monde entier :
" Tout pouvoir m'a été donné. Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit" ( Matth 28, 19).
Désormais l'Evangile est proposé dans toutes les langues, les apôtres s'élancent dans toutes les directions et le peuple de Dieu a pris une dimension internationale, mondiale !
Mais attention ! Il ne faut pas que nous nous rassurions à bon compte et transformions notre vocation en un privilège inamovible. On ne s'installe pas sans façons dans le royaume de l'amour. Aussi pour prévenir le danger de cette folle assurance, la finale va apporter un correctif.
Le roi entra pour voir les convives. Il vit un homme qui ne portait pas le vêtement de noce : " Mon ami, comment es-tu entré ici sans avoir le vêtement de noce ?". L'autre garda le silence. Alors le roi dit aux serviteurs : " Jetez-le pieds et poings liés dehors dans les ténèbres : là il y aura des pleurs et des grincements de dents". Certes la multitude des hommes est appelée mais les élus sont peu nombreux" .
On retrouve la leçon de la parabole du filet (13, 47) : les missionnaires appellent à tous vents, accueillent chacun avec mansuétude, les portes de l'Eglise sont ouvertes, le baptême est conféré...Encore faut-il que le baptisé vive dans la lumière symbolisée par sa robe blanche et qu'il respecte ses engagements. Car un jour Dieu lui-même opérera le tri : on ne va pas automatiquement au paradis - ce qui serait un non respect de notre liberté donc un mépris de l'homme.
La note finale nous semble restrictive ? Ne spéculons pas sur le pourcentage des élus et en tout cas ne damnons personne. Et croyons à l'immense miséricorde de Dieu. Mais sans oublier l'avertissement qui nous est lancé.
Ces trois paraboles de ces trois dimanches sont à relire en bloc : elles insistent toutes sur l'importance capitale de l'invitation de Dieu. 1) Il faut répondre un vrai OUI qui soit acte.
2) Ce OUI est une embauche qui oblige au travail, c'est-à-dire à la pratique ardue des exigences du Seigneur et toute jalousie entre nous est interdite. Dieu est BON envers tous.
3) Ce OUI est participation joyeuse aux Noces de l'Agneau. L'appel de Dieu est la Parole la plus essentielle qui nous soit adressée tout au long de notre existence. N'endurcissons pas notre c½ur. Ne remettons pas à plus tard. Si nous ne brûlons pas d'amour, nous risquons de brûler vainement et affreusement d'envie et de déception.
L'appel à venir à la messe du dimanche est l'invitation qui déjà nous permet de vivre l'inauguration du Banquet des Noces. Pourquoi ne pas venir ?....