Avec quelques amis, ce samedi 26 mai, j'organiserai la « flèche dominicaine » : une petite randonnée à vélo qui passera par 5 lieux dominicains en Belgique. Le circuit partira du couvent de Bruxelles, puis passera par la ferme de Froidmont, le couvent de Louvain-la-neuve, l'ancien couvent de la Sarte et puis s'achèvera à Liège, ici même ! 134 kilomètres de plaisir ! Personnellement, le moment fort de la course sera l'ascension du mur de Huy... car le cyclisme ne retient vraiment mon attention que quand ça grimpe. Je ne m'intéresse d'ailleurs au tour de France que quand il traverse la montagne et quand il passe à Liège, bien entendu !
Dans les récits bibliques, vous le savez sans doute, les passages clés sont situés bien souvent sur la montage: sur le mont Horeb, au Sinaï. C'est sur la montagne que Jésus proclame les béatitudes tout comme c'est sur le Golgotha que Dieu nous dévoile son vrai visage.
Les deux récits que nous venons d'entendre sont --permettez-moi l'expression-- deux grosses étapes de montagne dans notre chemin vers Pâques. Deux cols 'hors catégorie', mais pas infranchissables pour notre foi!
Le mont Moriah, tout d'abord. Comment ne pas être énervé à l'écoute du récit de la genèse? Comment ne pas juger ce récit totalement absurde puisque Dieu lui-même avait promis sa bénédiction à Abraham! Voilà une fois de plus la figure d'un Dieu pervers qui revient. Et pourtant... si vous lisez le texte hébreu, c'est tout le contraire.
Si vous prenez le texte, vous verrez qu'il y a en réalité trois noms de Dieu,
il y a trois dieux différents.
Le texte nous invite justement à quitter l'image d'un dieu qui nous demanderait des sacrifices, d'un dieu qui nous mettrait à l'épreuve pour nous éprouver,
à quitter aussi les divinités que nous construisons,
pour découvrir un troisième Dieu,
celui-là même qui a révélé son nom sur le mont Sinaï,
le vrai Dieu qui arrête symboliquement la main d'Abraham.
Ce Dieu, c'est celui qui refuse le sacrifice, le déni, la souffrance. La conclusion du texte est donc l'inverse du début : Dieu, s'il est le vrai Dieu, ne nous met pas à l'épreuve. Un Dieu d'amour qui nous mettrait à l'épreuve serait un dieu sadique.
Sur le mont Gogotha, Jésus nous dévoilera l'image d'un dieu qui ne met pas à l'épreuve, mais qui s'éprouve dans un amour donné jusqu'au bout.
Si cette première montagne nous invite à changer notre regard sur Dieu ; l'évangile, nous propose une autre montagne, qui nous invite à changer notre regard sur l'homme. C'est la montagne d'un nouveau départ, d'une nouvelle naissance. Nous pensons souvent n'avoir qu'une naissance, mais nos vies sont faites constamment de moments de croissance et de renaissance.
Un courant psychanalytique parle de quatre naissances. Si vous préférez, il y aurait quatre cols « hors catégorie » dans notre vie....
Qu'il y en ait quatre ou des milliers peu importe. Elles ne sont pas là pour nous mettre à l'épreuve mais elles peuvent nous offrir de nouvelles naissances. Et si, comme les disciples, nous pouvons être traversés par des forces qui nous tirent en arrière ou qui veulent figer l'instant, il ne sert donc à rien de planter la tente de notre nostalgie
pour faire revenir un passé dépassé.
Ce temps de carême est un temps de transfiguration, tendu vers la résurrection,
un temps pour transformer notre regard sur Dieu ;
un temps surtout pour transformer notre regard sur nous-mêmes
et vivre une nouvelle naissance :
Pour certains, il s'agira de vivre un deuil de manière plus apaisée,
pour d'autres de porter un regard non douloureux sur une cicatrice de l'existence,
pour d'autres encore, il s'agira de quitter un projet qui retient en arrière, ou
de passer sur une autre versant de l'existence...
Puissions-nous vivre ce temps du Carême comme une étape essentielle, dans laquelle nous pourrons accepter le défi d'être transfigurés : c'est à dire d'être devant les autres, ce que nous sommes devant Dieu.
Le Carême n'est pas cette parenthèse qui nous invite à changer de vie pour un temps, mais ce temps où nous pouvons changer notre regard sur nous-mêmes et sur notre vie pour nous libérer. Alors, nous seront, pour nous mêmes et devant nos proches, transfigurés
2e dimanche de Carême, année B
- Auteur: Croonenberghs Didier
- Temps liturgique: Temps du Carême
- Année liturgique : B
- Année: 2011-2012
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