33e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Coulée André
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2002-2003

Ce texte apparaît, chez St Marc, comme une dernière révélation avant la Pâque dont le récit commence juste après. L'évangéliste veut, dans ce texte, donner un sens à l'aventure de Jésus qui se termine : où va-t-on ? Qu'est-ce qui va se passer. Eh bien, Dieu va se manifester. A cette époque les Juifs et aussi les chrétiens vivent une situation dramatique de menace, à l'instar de la menace qui pesait sur les Irakiens quelques mois avant la guerre 'Iraq : l'ennemi est là, il va attaquer et détruire le temple de Jérusalem (en 70). Cela va être terrible. C'est la fin d'un monde. Et Jésus utilise alors les images habituelles correspondant à la conception de son temps au sujet de l'univers : des étoiles pendent comme des lustres et elles vont tomber, grand branle-bas dans le ciel qui va nous tomber sur la tête ! Aujourd'hui aussi des gens ont vu le ciel s'obscurcir lors de l'explosion de la bombe atomique, le sol s'entrouvrir, les choses disparaître lors de tremblements de terre choses : voilà que les choses apparemment les plus solides auxquelles nous nous raccrochons sont en fait précaires. Alors si c'est à cela que doit aboutir tout ce que Jésus a mis en branle, ça pose question.

En fait, dans la Bible, la manifestation de Dieu apparaît toujours sous des images apocalyptiques : Dieu se fait voir et entendre. Beaucoup de fondamentalistes aujourd'hui nous font croire que le retour de Jésus est proche puisque des événements graves et des catastrophes naturelles en seraient les signes. Mais ne dit-on pas que au milieu des ruines il y a toujours une petite fleur qui pousse, qu'après l'orage il y a toujours un oiseau qui chante, et Jésus quand il parle de signes de sa présence, de sa manifestation, de sa venue nous dit de regarder le figuier qui reverdit et annonce la vie, signe de renaissance printanière et donc de vie. L'apparition de ses bourgeons et de ses premières feuilles est le signal infaillible de la venue des beaux jours. Le message est clair : des signes sont sous nos yeux qu'un nouveau monde est en train de naître.

Jésus discerne dans les craquements d'un monde les signes annonciateurs d'un avenir aux couleurs de Pâque. Ce monde nouveau est celui que Jésus inaugurera lors de son retour ; c'est ce qu'il appelait le Règne de Dieu. Il nous invite donc à découvrir et à nous laisser prendre par les germes de vie qui sont des signes du Royaume, c'est-à-dire de lui-même qui vient pour tout renouveler S'il n'y avait pas le figuier, toute cette description ne pourrait qu'engendrer la peur.

Mais qui regarde un petit figuier quand tout le reste semble écrasant ? Nous faudra-t-il encore bien des cataclysmes pour que, enfin, nous fassions attention au signe du figuier ? Non ! Alors ouvrons-les yeux : que voyons-nous aujourd'hui qui sont, pour notre foi, comme des signes d'un monde nouveau qui naît et grandit. Je pense, par exemple, à tous les essais et les réalisations de dialogue interreligieux, phénomène appelé par certains « tolérance active ». Quand hommes et femmes prient ensemble toutes religions confondues, n'est-ce pas augure de relations fraternelles nouvelles qui font l'essence même du Règne de Dieu. Quand nous croyons et sommes de plus en plus convaincus que Jésus est venu pour sauver tous les hommes et que son Esprit inspire la pureté d'autres religions, qu'il y est à l'½uvre, qu'il y a plusieurs chemins pour être sauvés comme il y a plusieurs demeures dans la maison du Père : n'est-ce pas le début d'un retournement complet où tout sera sens dessus dessous. Et les chocs interculturels, les confrontations ne sont-ils pas des signes précurseurs de la justice de Dieu qui vient, justice caractéristique du Règne, tout comme le pénible travail de l'accouchement est signe de la vie qui apparaît plus criante qu'avant. Toutes les oppositions à la guerre, tous les travaux de préparation de la paix ne sont-ils pas aussi des marques de l'Esprit de Jésus qui est à l'½uvre en notre monde , inspire des personnes de toutes races et cultures et ainsi rend vie et espérance au monde ?

Et si aujourd'hui nous sommes intéressés à ce qui se passe ailleurs et que naissent des solidarités réelles, à partir de découvertes humbles d'autres cultures, de la valeur des autres, n'est-ce pas en partie parce que ce qui se passe dans le monde devient transparent grâce à l'information que par ailleurs nous pouvons souvent décrier de ne donner que des images de mort. L'information bien faite peut être pour nous ce figuier qui annonce le printemps.

Mais il ne s'agit pas d'être des spectateurs passifs, il nous faut provoquer ces signes, les faire naître, les créer. Nous sommes placés devant un choix : construire en connaissance de cause de notre foi, un monde qui devienne signe d'espérance pour tous et ainsi rendre plus proche le règne de Dieu.

Peu importe la date de son retour, l'essentiel est de le faire vivre, et préparer son retour est aussi, d'une certaine manière, rapprocher Jésus et son message de la vie du monde. Nous avons le choix entre le « mangeons et buvons, demain nous mourrons ; la fin du monde arrive » et « vivons et construisons cette société, telle que Jésus la veut et où il fera bon vivre ». C'est une option à prendre. C'est le sens de la mise en garde finale. Et prenez garde nous dit Jésus, soyez éveillés, pas simplement comme des gens qui épient le voleur possible, mais comme des enfants qui, éveillés, inventent toutes sortes de façons de manifester qu'ils vivent. Il ne s'agit pas d'attendre et de voir venir des événements qu'on va subir : Parce qu'on attend vraiment que Jésus arrive, c'est activement qu'il nous faut préparer cette venue, faire voir qu'il est proche en faisant bourgeonner nos vies et annonçant ainsi le printemps de la vie. L'espérance est à ce prix.