33ème dimanche ordinaire

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 30/10/16
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2015-2016

Voilà ! C’est fait ! C’est réussi ! Après les deux terribles guerres juives de 70 et de 130, les Romains ont tout d’abord fermé, puis détruit le Temple de Jérusalem pour y construire un nouveau temple,  celui-là consacré à Jupiter, leur dieu, le dieu suprême de l’Olympe romain.  Et pourtant les Juifs avaient dépensé beaucoup de temps et d’énergie pour la construction de ce temple, le deuxième, puisque le premier avait été détruit par les Babyloniens en 587.  Pour cette reconstruction, les Juifs n’avaient rien négligé.  La base du Temple était assurée par d’énormes pierres, pharaoniques.  On peut encore les voir maintenant.  Elles forment le mur des Lamentations.  Rien ne pouvait le détruire. Et pourtant le Temple a été rasé par les Romains.  Il n’en reste plus rien.  C’est maintenant l’esplanade du Temple, à Jérusalem, où se dresse une mosquée.

            N’est-ce pas là un bel exemple de la tragique destinée de toutes nos entreprises ? Tant d’hommes et de femmes se sont donné tout entiers à entreprendre, à construire, à réussir leur vie.  Des hommes et des femmes, partis de rien, ont petit à petit, patiemment, ardemment, construit leur entreprise qui a grandi, s’est développé, a prospéré.  Et puis vient la maladie, la crise cardiaque, le cancer, et tout s’effondre.  Oh ! Ce n’est pas mieux avec l’Eglise.  Nous avons, nous, de la chance : on est encore nombreux dans cette église.  Mais ils sont nombreux, ces temples sacrés, qui, dans les campagnes et dans les villes, n’accueillent qu’un petit groupe de fidèles frigorifiés.

            Et voilà ! La terrible prophétie du Christ s’est réalisée : le Temple est détruit et l’Eglise continue à sombrer.  On pourrait se consoler en se disant qu’ailleurs, très loin, au Vietnam, en Afrique, de nouvelles moissons de vocations se dressent, de grandes assemblées de croyants se pressent dans des églises beaucoup trop petites pour accueillir tout le monde.  Mais tout cela est bien loin et ils sont tellement différents de nous.  On a envie de leur dire : « Très bien ! Tant mieux pour eux ! » Et on a envie d’ajouter : « laissez-nous tranquilles ! Laissez-nous mourir en paix ! »

            Et c’est vrai que la vie, ça dérange.  Roméo aimait faire la fête avec ses copains.  Il a vu Juliette.  Il en est mort.  Saint Pierre s’ennuyait un peu auprès de son bateau de pêche et de sa belle-mère.  Il a vu Jésus et il en est mort.  Saint Dominique était un chanoine riche et respecté.  Il a vu la misère spirituelle dans le Sud de la France.  Il a tout quitté et il a vécu seul pendant plusieurs années pour prêcher la bonne nouvelle.

            Oui, on pense construire et réussir de belles choses, mais, au bout d’un certain temps, au bout d’un certain nombre d’années, on se rend compte que tout cela est bien vide parce qu’il y manque l’essentiel : cette relation amoureuse, profonde, essentielle avec quelqu’un qui, au-delà de nos réussites et de nos échecs, continue à nous faire confiance et à nous apporter la lumière de la vie.  Et alors, face à tous les problèmes et à toutes les difficultés, nous nous sentons portés, emportés par un amour invincible, celui de Dieu, pour l’éternité.