Il y a quelque chose de pathétique dans cette longue conversation. C'est la réponse de la Samaritaine : « je n'ai pas de mari ». Or ce n'est pas vrai. Elle en a eu cinq. Et Jésus semble abonder dans son sens, dans ce mensonge : « tu as raison de dire que tu n'as pas de mari. » C'est comme si aucun de ces maris ne lui avait apporté ce qu'un mari doit apporter ou ce que la Samaritaine attendait : le vrai amour. En disant : « je n'ai pas de mari », la Samaritaine dit qu'elle n'a pas rencontré le vrai amour. Et en disant : « tu as raison de le dire », Jésus voit dans le c½ur de la Samaritaine cette blessure, cette souffrance. Et, en ce sens-là, l'humanité tout entière est devant Dieu comme la Samaritaine, à la recherche du véritable amour.
Certes, je crois en la beauté et en la grandeur de l'amour conjugal. Le couple est un lieu de sanctification, car il est le lieu où chacun peut mieux approfondir ce que cela veut dire : Dieu est mort par amour chacun d'entre nous. Mais nous tous, dans un couple, dans une communauté religieuse, dans une paroisse, nous tenons souvent une conversation pareille à celle de cet Evangile. Chacun parle de son monde, à partir de ses soucis, à partir de ses attentes. Jésus parle de l'eau vive qui est l'amour de Dieu pour nous, et la Samaritaine pense à l'eau fraîche d'une rivière qui remplacerait l'eau fétide du puits.
Et c'est là sans doute l'effort libérateur qui nous est demandé pendant ce carême : non pas réclamer ce que nous voulons, mais accueillir avec gratitude ce qu'on nous donne. Car on peut avoir des surprises. La Samaritaine pensait parler avec un Juif un peu entreprenant. Elle apprend à la fin de la conversation que le Messie, celui viendra et qui nous fera connaître toutes choses, c'est Jésus, celui à qui elle parle.
Oui, accueillons avec gratitude tout ce que nous recevons, parce que c'est Dieu qui le donne.
3e dimanche de Carême, année A
- Auteur: Henne Philippe
- Temps liturgique: Temps du Carême
- Année liturgique : A
- Année: 2013-2014