3e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2007-2008

Dites-nous, mon père, quand avez-vous reçu l'appel ? Etait-ce une expérience exceptionnelle ? Pourquoi seuls les prêtres, les religieuses et religieux le reçoivent ? Comment être certain que c'est vraiment Dieu qui vous a appelé ? L'aviez-vous demandé et est-il possible de le refuser ou l'appel est-il si fort que celle ou celui qui le reçoit en perd sa liberté tellement il est convaincu que l'ampleur du message reçu ? Ces quelques questions m'ont été posées la semaine passée encore alors que j'animais différents groupes de jeunes. Je ne sais pas si je les ai déçus dans ma réponse mais j'ai bien dû leur avouer que je n'avais jamais vécu une telle expérience mystique. Personnellement, je n'ai jamais ressenti un appel quelconque comme si une lumière ou une petite voix intérieure me montrait le chemin à suivre. Je n'ai eu Jésus ni au téléphone ni sur mon mail pour me dire de le suivre. Bref, je n'ai donc pas reçu un appel spécifique. Toutefois je suis et reste convaincu que j'ai été appelé. En effet, même si nous n'avons jamais été confrontés à de grands expériences où la vision divine s'impose à nous, toutes et tous nous sommes encore et toujours appelés dans le Christ. L'appel de Dieu est un appel à la vie, à oser la regarder en face avec ses beautés et ses moments plus douloureux, à l'écrire avec une plume trempée dans l'encre de l'amour habité par cette conviction que l'encrier ne se videra jamais puisqu'il prend sa source dans le Fils. Pour prendre conscience d'un tel appel à la Vie, il n'est pas nécessaire d'aller s'enfermer dans un lieu quelconque où notre Dieu se serait caché. L'appel divin se vit dans le quotidien de la vie, au c½ur de nos tâches habituelles. Non pas dans l'exceptionnel mais dans la banalité des actes journaliers et ce, à l'instar des disciples qui s'affairaient au moment où le Christ les appelle : les deux premiers pêchaient, les deux autres préparaient leurs filets. Ils étaient simplement là où ils venaient chaque jour. Le Christ s'est invité dans leur routine comme il continue de s'inviter dans la nôtre. Il nous appelle tels que nous sommes, là où nous en sommes. Ne le cherchons donc pas au loin. Il semble être beaucoup plus proche de nos vies que nous n'aurions jamais pu l'imaginer. Il vient à nous chaque fois que nous le laissons advenir pour que retentisse au plus profond de nous cet appel merveilleux à prendre conscience que tout ce qui se vit aujourd'hui s'inscrit dans le temps de l'éternité divine. Dieu nous attend non seulement au bord de notre chemin mais il ne craint pas non plus nos propres carrefours. En reprenant la citation d'Isaïe, « Galilée, toi le carrefour des païens », Jésus démontre à quel point il accepte de s'exposer à la culture de son temps, au bouillonnement du brassage d'approches de vie ou de foi. Il n'a donc pas eu peur de se confronter à la réalité du monde de son époque. Il était non seulement sur la route mais également aux carrefours des histoires des gens qu'il croisait. Chaque fois que nous sommes nous-mêmes face à des grands choix de vie, nous nous sentons comme à une croisée de chemin, un carrefour et nous espérons que la décision que nous prenons sera celle qui nous conduira toujours vers un mieux être, un plus grand bonheur. Les carrefours de nos vies peuvent parfois nous donner aussi le vertige, surtout lorsque ceux-ci s'imposent à nous et que rien ne nous y préparait. La perte d'un être cher, la maladie sont des carrefours qui surgissent et viennent nous bousculer dans la routine de nos existences. Le destin vint frapper le cours normal de notre destinée. Nous nous retrouvons alors désemparés, dépassés par ce qui nous arrive. Nous ne comprenons pas et la litanie des questions restées sans réponse nous envahit. Nous pourrions nous enfermer dans une forme de désespérance. Heureusement pour nous l'évangile de ce jour souligne le fait que le Christ vient s'installer au c½ur de nos carrefours intérieurs, qu'il ne nous laisse pas seuls et surtout qu'il continue de nous appeler à la Vie pour mieux nous préparer à un jour partager la vie éternelle. Il n'est jamais trop tard pour recevoir et surtout vivre cet appel et ce, quelle que soit notre condition physique ou morale actuelle. Dieu le Fils nous prend là où nous sommes à la croisée de nos vies. L'appel divin reçu ce jour encore est un appel à la lumière. Oui, croyons et osons mettre de la lumière dans nos vies. Celle-ci est composée de nombreux faisceaux qui passent par nos regards, par toute forme de tendresse échangée, par la douceur des paroles prononcées. Alors si parfois notre carrefour intérieur nous semble ombrageux, voire orageux, ne craignons pas de laisser le Christ venir s'y reposer. En confiance, avec lui et avec toutes nos forces de vie, nous pourrons alors chanter à l'humanité entière : « sur ceux qui habitaient dans le pays de l'ombre et de la mort, une lumière s'est levée » et cette lumière, c'est chacune et chacun de nous tendrement illuminé de la présence divine.

Amen