3ème dimanche ordinaire

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 22/01/17
Année: 2016-2017, 2015-2016

L’Evangile d’aujourd’hui ressemble étrangement à un article de journal sur l’activité d’un terroriste en fuite.  Regardez : « quand Jésus apprit l’arrestation de Jean Baptiste ».  Eh oui ! Jean a été arrêté.  Pourquoi ? Parce qu’il a commis un crime ? Non, il n’a tué personne.  Parce qu’il a commis un vol ou exercé un chantage ? Non, il n’a volé personne.  Il a été arrêté parce qu’il portait atteinte à la sûreté de l’Etat.  Et comment ? Eh bien, tout simplement, en accusant le roi Hérode d’avoir volé la femme de son frère, en accusant les chefs religieux d’être des hypocrites, et en accusant de hauts fonctionnaires politiques d’avoir détourné de l’argent et d’avoir touché de trop gros salaires.  Incroyable ! Comment peut-on dire, comment peut-on imaginer de telles choses ? Et Jean-Baptiste a été mis en prison, et Jésus a eu peur d’être lui aussi arrêté.  Pourquoi ? Il n’a rien fait  Il n’a pas eu le temps de faire quelque chose puisqu’il vient juste de sortir de son village et de se faire baptiser par Jean.  Ça suffit.  Il a participé à une réunion avec Jean, et d’ailleurs il est de la même famille, de la même tribu, du même clan : c’est son cousin.  Donc, par prudence, on ne sait jamais, il est suspect et il peut être arrêté.  Il vaut mieux en arrêter un de trop que de laisser l’un ou l’autre courir et faire des bêtises.  Et d’ailleurs, vous voyez, à peine sorti de son village, il recrute déjà Pierre et André, Jacques et Jean.  Il a déjà une petite équipe autour de lui.

            Et c’est alors que se pose la question de savoir quelle est la différence entre une secte terroriste et une communauté religieuse.  Ne riez pas ! C’est une question sérieuse.  Dans ces deux groupes, on trouve le même endoctrinement religieux, la même structure hiérarchique autoritaire.  La différence, on la trouve exprimée chez les premiers chrétiens.  Au début de l’Eglise, les premiers chrétiens ont dit à leurs persécuteurs : nous, on n’est pas ici pour tuer, mais pour se faire tuer.  Regardez Jésus, Pierre et Paul, et tous les apôtres : ce ne sont pas eux qui ont tué les autres, mais ce sont eux qui se sont fait tuer.  Oui, mais vous me direz : il ne faut pas oublier les croisades et l’Inquisition.  Et moi, je vous dis : entièrement d’accord, et c’est pourquoi je suis parfois un peu sceptique et prudent quand j’entends certaines réflexions.

            Oui, vous me direz, mais ce n’est vraiment un idéal de vie que de se faire tuer.  Et moi je vous réponds : entièrement d’accord, je ne suis pas tellement pressé de me faire tuer comme Jésus, Pierre, Jacques et Jean, quoiqu’on dise que la vie religieuse, c’est un long, très long martyre.  Mais ce que j’aimerais signaler dans cet Evangile, c’est que, pour sauver sa peau, Jésus part, ailleurs, loin de chez lui.  Lui qui est  né à Bethléem et qui a grandi à Nazareth, il part aux bords de la mer de Galilée.  Il a toujours vécu dans les montagnes, il n’a jamais vu la mer et le voilà qui parle à des pécheurs, comme Pierre et André.  Il y a rupture.  Tout est rupture et séparation dans la vie : l’enfant quitte le ventre de sa mère, le jeune homme quitte ses parents et fonde un foyer.  Et où va-t-il, Jésus ? A Knokke ou au Zoute ? Non, il va dans le pays de Zabulon et de Nephtali, au carrefour des païens.  Quel pourrait être aujourd’hui, en Belgique, le carrefour des païens ? Ce n’est pas un quartier international comme le quartier européen à Bruxelles.  Non, ce pourrait être une petite commune bruxelloise dont on a beaucoup parlé en Belgique et à l’étranger en relation avec des jeunes gens enthousiastes au niveau religieux, qui en ont recruté d’autres pour tuer.  Oui, c’est la toute la différence entre une cellule terroriste et une communauté religieuse.  C’est de savoir si nous apportons des paroles de vie ou des paroles de mort, si nous apportons des gestes de résurrection et de pardon, ou des jugements de condamnation et de mépris.  Jésus guérissait les malades et apportait une vile nouvelle aux pécheurs et aux publicains.  Puissions-nous être comme lui, des fontaines de vie, d’espoir et de résurrection.