La liturgie est faite de surprises et d’inattendus. Comme vous le savez, chaque année nous lisons chaque dimanche une tout petite partie d’un même Evangile, et cette année c’est l’Evangile selon saint Matthieu. Et aujourd’hui pour commencer cette lecture continue nous recevons un extrait de l’Evangile selon saint Jean. Cela n’a rien à voir. Oui, bien sûr, on y parle du même Jésus, mais cde n’est pas la même expérience, ni la même théologie. Saint Matthieu aime bien montrer que Jésus accomplit les Ecritures. Il cite souvent des passages de l’Ancien Testament, surtout des prophètes. C’est pourquoi on pense que saint Matthieu s’adressait plutôt à des chrétiens d’origine juive, tandis que saint Jean insiste sur la relation amoureuse entre Jésus et son Père. Très souvent, dans l’Evangile selon saint Jean, Jésus parle de Celui qui l’a envoyé. Il ne souhaite qu’une chose : nous conduire vers le Père. Jésus aime tellement Dieu le Père qu’il ne souhaite qu’une chose, c’est que nous le connaissions, que nous goûtions son amour. Mais, si ces deux Evangiles sont tellement différents, pourquoi commencer cette lecture continue de l’Evangile selon saint Matthieu par un extrait de l’Evangile selon saint Jean ?
En toute honnêteté, je ne sais pas pourquoi à Rome, au Vatican, les responsables de la liturgie ont décidé cela. Je ne connais pas de document officiel qui l’explique, et je ne connais pas de journalistes qui auraient pu avoir quelques confidences. Alors je vous propose une explication, ou plutôt je vous propose une méditation. Ma théorie est la suivante : avant de commencer le récit des faits et gestes de Jésus, la liturgie nous invite à méditer sur la profondeur de sa personnalité. C’est comme une prière avant le repas. Cela ne sert à rien, mais cela permet de d ire merci au Seigneur pour la nourriture reçue et de la prier de nous donner la nourriture de Sa Parole et de l’Eucharistie. C’est comme prier le matin en se levant : cela sert à dire merci au Seigneur de nous avoir protégé pendant la nuit, de nous donner la vie ce matin et de lui offrir le travail de cette journée comme un cadeau et comme un merci. Tout cela, ce sont des petites choses qui ne servent à rien, mais qui donnent le vrai sens à notre vie. Vivre, ce n’est pas seulement boire, manger et dormir ; c’est aussi et surtout être aimé par Dieu et être soutenu par son amour.
Et c’est ce que l’Evangile d’aujourd’hui nous dit. Jean-Baptiste proclame : « j’ai vu l’Esprit descendre du ciel et demeurer sur lui ». Ce Jésus de Nazareth, ce n’est pas simplement quelqu’un qui fait des miracles et qui racontent de belles choses sur la vie, sur l’amour. C’est le Fils de Dieu. C’est ce que Jean raconte quand il dit qu’il a vu l’Esprit descendre sur Jésus lors du baptême. Car il s’agit du baptême, mais Jean la raconte à sa manière, de manière purement spirituelle. Chez lui, il n’y a pas de ciel qui se déchire comme dans les autres Evangiles. Il n’y a pas de voix qui proclame : « celui-ci est mon Fils bien-aimé ». Il y a tout simplement l’amour de Dieu qui enveloppe Jésus. Et c’est cela l’essentiel. Nous aussi, nous sommes enveloppés par l’amour de Dieu et c’est cela qui nous permet de faire des miracles.