4e dimanche de Pâques, année A

Auteur: Van Aerde Michel
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A
Année: 2007-2008

« N'ayez pas peur ! » Voilà la première parole du Christ Ressuscité à ses disciples. Le péché du chrétien est d'avoir peur, alors que la victoire est acquise, que la vie a triomphé, que l'amour est vainqueur. Tout n'est pas fini, la lutte continue, mais la bataille décisive est gagnée. Il n'y a plus rien à craindre : Christ est ressuscité !

Les effets de notre peur sont le repli sur soi, la recherche de sécurité, finalement la paralysie. Peur du mouvement, peur du changement, peur de l'inconnu, peur de l'avenir, peur de la solitude, peur du petit nombre, peur du grand nombre, finalement peur de tout et de rien. Les effets de la peur sont l'enfermement et finalement la mort.

Que fait le bon berger ? Il parle et sa voix tranquillise. Il ouvre la porte et encourage à sortir, à découvrir le monde extérieur, pour manger quelque bonne herbe fraîche et respirer au grand air. Je ne sais pas si vous fréquentez souvent les bergeries ? Un troupeau, quand il est enfermé, sent terriblement mauvais. Sortir, respirer à nouveau, se dégourdir les pattes, c'est le mouvement même de la vie, surtout pour les petits agneaux.

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Dans les « fioretti du bon pape Jean », on lit que Jean XXIII était un jour, - non une nuit !- aux prises avec une insomnie. Vous savez certainement ce que c'est qu'une insomnie. Nombreux parmi vous en sont victimes régulièrement. C'est désirer dormir sans y parvenir. C'est le contraire de la veille, au sens de l'attention à l'inattendu. C'est vouloir fermer les écoutilles et se donner du repos, sans y arriver parce qu'on est trop inquiet. Le pape Jean XXIII était donc inquiet. On le comprend. Quand on est pape, comment ne pas être inquiet ? Inquiet pour le monde, inquiet pour les chrétiens, inquiet pour l'avenir de la foi. Inquiet pour tout et pour rien. Un pape a beaucoup plus de raisons que nous d'être inquiet... Jean XXIII était donc inquiet, jusqu'au moment où la lumière jaillit en son c½ur et qu'il se dit à lui-même : « que tu es bête, Angelo, que tu es bête ! Ce n'est pas toi qui dirige l'Eglise, c'est l'Esprit Saint. Dors ! » Comme le chante le psaume 126 : « En vain tu avances ton lever, en vain tu retardes ton repos. Tu manges un pain de douleur quand Dieu comble son bien-aimé qui dort ! »

« Ce n'est pas toi qui dirige l'Eglise ! C'est l'Esprit Saint ! Angelo, dors ! » Voilà une affirmation de foi, une lucidité de croyant, une conviction qui rétablit la paix intérieure et l'équilibre psychologique profond. Nous le savons, sans la confiance en l'autre et en Dieu, il ne peut y avoir que tension psychologique, durcissement administratif, recherche de contrôle et de pouvoir.

Il faut savoir que tout ne dépend pas de nous, ni de nous individuellement ni même de nous communautairement. Il y a quelqu'un qui dirige l'Eglise, quelqu'un qui oriente le monde depuis sa création. Et même si la responsabilité de l'humanité n'a cessé de grandir, les causes pour lesquelles nous nous battons ne sont pas d'abord les nôtres. Tout ce que nous voulons protéger, animer, développer ne nous appartient pas. Tout ce avec quoi nous sommes parfois tentés de nous identifier parce que nous faisons corps avec ces projets, doit pouvoir se passer de nous, aller au-delà de nous. Et c'est très bien ainsi. Le Dieu vivant est le premier intéressé au succès de ce que nous tentons de réaliser.

Les conseils multiples que nous entendons vont tous dans le même sens : confiance, calme, sérénité, décontraction, lâcher prise, dépossession. Comme chrétiens, nous devrions être les premiers à les appliquer, à témoigner d'une grande paix intérieure, à vivre une espérance à toute épreuve, en assumant les délais. Nous croyons en Dieu. Nous croyons au Christ ressuscité, nous lui faisons confiance et le laissons agir, même si les chemins qu'il choisit ne nous sont pas familiers.

Cette décontraction développe notre efficacité, notre capacité de collaboration avec les autres, notre créativité. Nous ne sommes pas seuls, nous ne sommes pas enfermés sur nous-mêmes et sur nos difficultés. Une énergie nouvelle, extraordinaire, transcendante, divine, nous est communiquée. Quelqu'un veille sur nous, il nous guide et nous communique sa vie en abondance.

L'Esprit du Ressuscité dirige nos vies, tout comme il anime l'Eglise. Aux autres l'angoisse, le volontarisme, la crispation. Nous en sommes définitivement sauvés ! Un autre prend soin de nous. Par delà la mort et toutes les turbulences qui peuvent nous agiter, il y a un berger dans le troupeau, un pilote dans l'avion, un ordinateur qui fonctionne dans le vaisseau spatial, un guide pour la Planète. « N'ayez pas peur ! » « Angelo, ne sois pas bête ! C'est l'Esprit Saint qui nous conduit, dors mon ange, Angelo dors ! »