4ème dimanche de l'Avent

Auteur: Myriam Gosseye
Date de rédaction: 18/12/16
Temps liturgique: Avent
Année: 2016-2017, 2015-2016

Depuis le début du livre de la Genèse c.-à-d. depuis l’apparente catastrophe arrivée à nos tous premiers ancêtres, tout l’Ancien Testament nous dévoile que Dieu a un puissant désir : celui de sauvegarder l’être humain des dangereuses fondrières dans lesquelles il se met. Son but semble être de nous mener, difficilement, vers le juste chemin qu’Il nous promet.

Ce Premier Testament nous montre combien ce désir de Dieu repose sur la confiance qu’Il veut  mettre plus particulièrement en certains d’entre nous. Et cela, malgré la fragilité et même les faiblesses de ceux-ci.

Il semble donc,  que sans ces personnages-clé, rien ne peut se faire, ou tout au moins rien de l’avancée que Dieu a voulu pour l’humanité, en dépit des difficultés multiples.

Bien entendu, pour que ce dessein divin, qui en même temps repose sur la liberté humaine, fasse son chemin en humanité, ces mêmes personnes doivent donc, à leur tour, mettre leur confiance dans les signes que Dieu leur adresse. Or, il s’agit de  signes  bien souvent infimes ou difficiles à décrypter, à travers lesquels Dieu semble parfois  demander l’incroyable et même l’impossible.

Il en est ainsi d’Abraham, à qui il faudra une fameuse dose de confiance pour accepter de quitter sa terre ancestrale, ses racines, son bien-être, afin de partir là où tout est incertain et même sujet de crainte. En effet, le livre  de la Genèse nous indique qu’à travers une torpeur et une grande terreur, le Seigneur s’adresse ainsi à lui : « Sache bien que ta descendance résidera dans un pays qu’elle ne possèdera pas. On en fera des esclaves  qu’on opprimera pendant quatre cent ans… »(Gn. 15,13).

Il en sera de même pour bien d’autres, tel que Sarah, l’épouse d’Abraham, à qui on annonce une grossesse invraisemblable, ou Moïse qui doit sortir un  peuple hébreu hésitant et récalcitrant, du pays d’esclavage. Ou même ce peuple hébreu lui-même, qui à travers ombres et lumières, doutes et avancées, suivra finalement la route indiquée par Dieu, nous devançant dans ce chemin vers notre destinée en Dieu.

 Ou encore, au seuil du nouveau testament, il s’agit de  Jean le Baptiste qui, malgré ses doutes, nous indique la venue de ce Messie tant attendu.

On le constate en lisant la bible : ces personnages historiques ont, pour la plupart,  comme nous aujourd’hui, une foi  fluctuante, remplacée parfois même par de la peur ou de la défiance.

Arrivent alors Marie et Joseph, personnes centrales aux yeux de Dieu : elles ont pour mission de faire avancer le  dessein d’amour de Dieu au sein d’une humanité souvent fragile sinon carrément rétive : «un peuple à la nuque raide» (Ex. 32,9).

 Dans ce projet de divinisation de l’homme, comme l’affirment certains Pères de l’Eglise,  Marie et Joseph sont essentiels. En effet, la confiance de Dieu a toujours voulu s’appuyer sur la liberté de l’homme et donc, sans leur acceptation libre et totale, pas d’incarnation du Verbe de Dieu  et  pas de salut pour l’humanité, telle que Dieu le veut pour elle.

Ainsi donc, lorsqu’est venu le temps juste pour l’incarnation du Verbe  en notre humanité, Dieu fait reposer sa confiance sur deux personnages, un homme et une femme. Quoiqu’obscurs aux yeux des hommes, ils semblent cependant forts bien ajustés aux désirs de Dieu. Comme on peut le constater, une fois encore,  les critères de Dieu ne sont absolument pas les nôtres, ainsi qu’il nous est affirmé par la voix du prophète Isaïe (15,8) « Mes pensées ne sont pas vos pensées et mes chemins ne sont pas vos chemins».

Joseph, comme Marie avant lui, doit donc  aussi  faire cette démarche,  ô combien difficile,  de remettre tout son destin en jeu, de faire totalement confiance. Et cela, malgré, si je peux m’exprimer ainsi, une  promesse complètement décalée, étrange et dérangeante : celle qu’ils seront les parents  d’un enfant non seulement d’origine divine, mais dont le salut de  toute l’humanité dépend.

De la même manière que Marie, avec le flou du rêve en plus, Joseph doit faire confiance à ce  songe, qu’il va devoir décoder d’abord et prendre au sérieux ensuite. D’où l’importance qu’il ait cultivé préalablement son ajustement à Dieu : Joseph n’est pas appelé homme parfait, mais homme juste!

Mais ce n’est pas tout, Joseph doit aussi accepter de prendre du recul par rapport à toute une culture stricte de la loi: toute femme adultère doit être dilapidée ou tout au moins répudiée ….en secret. On ne joue pas avec la paternité, ni surtout avec la filiation, particulièrement lorsqu’il s’agit de celle du roi David.

 Nous savons tous que sortir d’années d’habitudes enracinées et justifiées par des siècles de culture, ne se fait pas sans mal.

 Alors, qu’est ce qui fait que le  choix de Joseph  se porte vers l’option que l’on voit ? A savoir, croire que l’impossible des hommes n’est pas de la même catégorie que le possible de Dieu.

 Mais aussi, que le désir intense de Dieu pour nous ne se traduit que malaisément  ou même pas du tout en nos mots.

Alors si tel est le cas, si tout est si mystérieux voire obscur et si Dieu semble si lointain, que nous reste-il ?

 Il semblerait bien que, seule, la confiance nous reste. Et si nous décidons de la donner, il faut alors qu’elle soit indéfectible pour résister  à l’ampleur de nos angoisses, de nos souffrances, de nos faiblesses.

Ces personnes si représentatives de notre histoire avec Dieu, sont aussi hautement symboliques de ce que Dieu peut faire en chacun de nous…..avec chacun de nous. Ce sont des personnages modèles, en quelque sorte, qui, quoique porteurs d’une  mission particulière, restent pour la plupart fragiles et sujets aux faiblesses.

Il peut également  être justifié de  penser que, si Dieu est bien ce Dieu qu’annoncent les prophètes et que Jésus Christ affirme incarner, alors, comme il l’a fait tout au long de Son histoire avec nous, Il  a tout pouvoir de passer également dans nos vies. Il peut même nous faire signe de la même manière que par le passé.

Dans ce cas, nous pourrions bien nous demander : que peut bien signifier  un songe ou un ange, dans notre vie aujourd’hui ?

Si tout cela est bien réel, au-delà de la jolie histoire pour les enfants ou du mythe fondateur, alors Dieu pourrait bien aussi nous visiter, nous faire signe d’une manière ou d’une autre. Comment ou à travers qui ou quoi pourrions-nous Le rencontrer ?

Tel est le mystère propre à chacun de nous, propre à notre confiance en nos perceptions bien discernées, mais aussi en Sa capacité à nous rejoindre. Avons-nous cette foi grande, juste comme une graine de moutarde (Lc. 17, 5-6) ?

 Pouvons-nous, voulons-nous, dans nos pertes et nos souffrances, mais aussi dans nos bonheurs, mettre nos vies entre Ses mains et devenir progressivement des femmes et des hommes justes, ajustés.