5e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 1998-1999

« Notre Père qui es aux cieux », phrase que nous connaissons toutes et tous puisqu'elle introduit la prière que nous récitons à chacune de nos eucharisties. « Notre Père qui es aux cieux », si nous croyons qu'il est vraiment aux cieux, cela signifie quelque part qu'il n'est plus sur terre. Dieu, aux cieux, les créatures sur la terre. Telle est bien notre situation. C'est parce qu'il est aux cieux, que Dieu non pas nous complimente mais nous rappelle aujourd'hui encore qui nous sommes si nous croyons en lui sur cette terre. « Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde ». Ce ne sont pas des invitations, des projets à notre encontre mais bien des affirmations divines. Un peu comme si Dieu nous disait : vous voyez, moi, je suis ici au ciel, ce n'est que par vous que je peux vivre sur terre. C'est par vous, avec l'aide de l'Esprit évidemment, que le monde me connaîtra, que le monde m'aimera. Et c'est pourquoi tout simplement vous devez être le sel de la terre et la lumière du monde.

Deux affirmations, deux injonctions pour définir ce qu'est la vie chrétienne, une vie de foi. La foi, en tout cas pour Dieu d'après les dires de son propre Fils, n'est pas quelque chose d'incolore, d'inodore et d'insipide. La foi est cette touche qui donne un tout autre goût à la vie, un goût merveilleux puisqu'il est celui du bonheur. Mais est-ce si vrai que cela : la foi nous donne-t-elle vraiment le bonheur. Sommes nous signes et témoins de notre foi, dans nos gestes, nos actes et nos paroles ? Un homme écrivait un jour dans son journal intime, un événement qui lui semblait bien extraordinaire : « aujourd'hui je suis allé à l'Eglise et je n'ai pas été déprimé. C'est vrai, je croirais plus facilement en ce Dieu d'Amour et de Bonté si tous ces gens qui se prétendent croyants n'étaient pas habillés en couleur de tristesse et n'avaient pas des têtes et des comportements de croque-morts ». Ce ne sont évidemment que quelques phrases tirées d'un journal intime qui n'engage que leur auteur. Pourtant, elles me semblent trop souvent encore criantes de vérité, comme si notre foi se résumait au bois de la Croix. Limiter le combat de la vie au combat de la croix est une erreur car la Croix à laquelle nous croyons est une croix fleurie, une croix brillante, une croix de lumière, celle de la résurrection. Nous sommes signes de Dieu, signes de Jésus lorsque nous faisons transparaître cette lumière qui nous habite plutôt que la pénombre de nos inquiétudes et questions. La foi est avant tout confiance. Une confiance en un mystère qui dépasse toute compréhension, une confiance en une vie qui va au-delà de notre vie, et une espérance que le bonheur est déjà à vivre sur cette terre.

Dieu a besoin de nous pour continuer à exister sur cette terre. Il n'attend pas de nous, me semble-t-il, que nous soyons de simples enseignants, transmetteurs d'un savoir d'une génération à l'autre. Dieu attend de nous que par notre bonheur de vivre, par notre épanouissement, notre manière d'être nous donnions aux autres le goût et le désir de croire en ce Dieu qui nous accompagne sur nos chemins même s'il nous semble parfois bien silencieux. Si la foi éclaire nos routes, elle doit également éclairer celles des autres. C'est bien la multitude des lampes que nous sommes qui doit éclairer le monde dans lequel nous vivons. Ni plus, ni moins. Etre lumière du monde, c'est accepter d'être des diffuseurs de joie. Voilà à quoi se résume notre vocation baptismale : être des diffuseurs de joie. Mais pas n'importe quelle joie !

Une joie pure à l'image du sel que nous sommes. En effet, pour les Romains, à l'époque de Jésus, le sel était symbole de pureté puisqu'il provenait selon eux des deux choses les plus pures de l'univers : le soleil et la mer. La joie que nous sommes appelés à diffuser prend sa source dans la pureté de nos intentions, de nos paroles et de nos actes. Elle prend source dans cette pureté de Dieu qui vit au plus profond de nous-mêmes. « Sel de la terre, lumière du monde », non pas ce que nous serons un jour, mais ce que nous avons à être dès maintenant. Amen.