« Tout le monde te cherche ». N'avons-nous jamais eu droit à cette remarque de la part des autres ? Cela fait plaisir de savoir que « tout le monde » s'intéresse à nous. Evidemment, c'est peut-être pour qu'on nous annonce une mauvaise nouvelle. Peu importe, nous sommes devenus - peut-être seulement pour quelques instants - une personne incontournable. Voilà qui nous donne un sentiment de grandeur, de puissance. Nous aimerions bien être félicité, remercié ou encore sollicité à nouveau. Pensons au médecin tellement réputé, au professeur tellement adoré, ou encore au prêtre tellement demandé. On se bat pour l'avoir, on fait la course pour l'entendre. Vous voilà investi d'une bien lourde responsabilité. Il ne faudrait pas décevoir ou paraître choquant.
Dans l'évangile, le texte ne donne pas les sentiments des disciples lorsqu'ils retrouvent Jésus dans un endroit désert. Sont-ils inquiets ? ou furieux ? ou seulement étonnés ? La place est laissée au travail de notre imagination. Toutefois, le contexte nous donne des indices. Jésus commence à se faire connaître (nous sommes au premier chapitre de l'évangile selon Marc) par sa parole et par ses actions thérapeutiques. Il a commencé par guérir la belle-mère de son ami Simon, et ce n'était qu'un prélude à une multitude de guérisons et d'exorcismes. Le résultat est là : toute la ville de Capharnaüm, tout au long de la soirée, se presse autour de Jésus. Le matin, les gens sont de nouveau là pour de nouvelles guérisons. Mais le principal intéressé s'est volatilisé pour prier à l'écart, au calme. Les disciples sont probablement contrariés par cette absence de l'acteur principal. Jésus fait faut bon.
La réponse ne s'est cependant pas faite attendre. « Partons ailleurs... ». Comme si Jésus n'était pas là d'abord pour être un thérapeute populaire. Il est plutôt l'homme qui marche, le pèlerin qui brûle d'impatience d'annoncer une nouvelle. Il veut aller dans d'autres lieux, dans d'autres villages, pour proclamer la Bonne Nouvelle. Jésus n'est pas venu pour être adulé ou même pour soigner tous les malades de la région. Il porte un message et les actions éclatantes viennent pour donner du poids à sa parole. Il n'attend pas qu'on le félicite, qu'on l'adore. Il n'a pas le temps pour cela, comme si justement son temps était compté. Sans doute, il éprouve de la satisfaction personnelle en apportant du bonheur aux autres. Comme chacun de nous, il est content de faire du bien aux autres. Mais il n'a pas le temps de se complaire, sa mission le presse d'avancer.
Nous aussi, nous sommes invités à vivre notre vie de telle manière qu'elle soit porteuse de la Bonne nouvelle. La foi en Dieu nous pousse à suivre le Christ sans chercher les honneurs. La foi se vit dans le service des autres, en se moquant du regard d'autrui. Il ne s'agit pas tant de faire des choses que de vivre pour les autres. Notre satisfaction sera grande si nous arrivons à nous oublier un peu pour laisser l'autre continuer sa marche vers Dieu. C'est quelque chose que les disciples ont dû apprendre à Capharnaüm déjà. Amen.