L'évangile de ce jour est dans la suite de celui de dimanche dernier. Il se situe pendant ce temps d'intimité de Jésus avec ses disciples au cours du dernier repas qu'il prend avec eux, après la démarche de service et d'humilité du lavement des pieds.
L'évangile commence par cette forte affirmation conditionnelle : "Si vous m'aimez, alors...". Pour Jésus qui a déjà vécu plusieurs années avec ses disciples, se savoir aimé ne sera jamais une certitude. Cela ne dépend pas de lui.
Imaginons la même affirmation dans un couple, entre amis, avec des enfants, dans une communauté ou toute autre structure de relation ! "Si tu m'aimes, alors...". Alors quoi ?...Jésus répond à chacun de ses disciples et à nous-même : Si tu m'aimes, c'est-à-dire si tu aimes, tout simplement, alors tout devient possible car tu es fidèle à mon commandement. Tu rentres alors comme partenaire dans la dynamique, dans la folie du plan de Dieu pour le monde. Jésus annonce son départ, la fin de sa mission, l'aboutissement de la Révélation commencée par les prophètes de l'ancien testament et achevée par sa mort et sa résurrection : "Le monde ne me verra plus mais vous, vous me verrez vivant et vous vivrez aussi. Vous reconnaîtrez que je suis en mon père, que vous êtes en moi et moi en vous. Je prierai le père et il vous donnera le Paraclet". C'est-à-dire l'esprit, le souffle, la force, un défenseur, on pourrait dire aujourd'hui un coach, quelqu'un d'autre pour nous aider à prendre le relais de son fils Jésus dans ce monde toujours en création.
Jésus nous annonce aujourd'hui la venue de l'Esprit saint et nous entraîne avec lui dans ce mystère de la trinité, de cette relation entre père, fils et esprit et avec nous-mêmes qui y sommes associés.
Jésus nous met maintenant sur le chemin. Il nous introduit dans le mouvement, dans la dynamique en nous laissant son esprit qui, intimement lié à notre personne, nous accompagne et sera pour toujours notre force et notre lumière à travers le temps et l'histoire du monde. Jésus, au cours de ce repas, nous partage son immense confiance en nous cédant ce relais pour continuer à aimer, à construire le monde en lui donnant sens et vie. En nous donnant son esprit, Dieu ne nous laisse pas seul sur la route. Il s'associe à nous tout en nous associant à lui. Il nous donne la possibilité de vivre de ce souffle, de l'activer, tout en prenant le risque de le voir s'étouffer.
N'est-ce pas cela la folie de l'amour et alors aussi la folie de Dieu : Accepter de se fragiliser pour prendre ce risque insensé de la confiance. De cette confiance en l'autre qui le fait vivre.
C'est cela, la folie d'être "être vivant", quand Jésus nous dit : "Vous me verrez vivant et, vous aussi, vous vivrez". Le sens de notre vie c'est, avec l'aide de l'esprit, d'aimer, de rendre Jésus vivant autour de nous. Alors, n'essayons pas de comprendre la trinité. Les premiers siècles de l'Eglise ont vu un foisonnement de discussions passionnées, de controverses et de prises de positions sur la structure et la nature de la relation entre père, fils et esprit. La trinité n'est pas un concept, objet de réflexions et discussions. Elle est énergie et mouvement. On n'y entre pas par la raison, mais par la confiance.
Heureusement la trinité, comme l'amour, est et restera un mystère. Quand on aime, on se fait vivre l'un et l'autre avec ce sentiment mystérieux d'être dans quelque chose qui nous dépasse. N'essayons pas de comprendre. Laissons nous emporter dans un tourbillon, ce tourbillon de la relation, de l'amour, de la trinité de Dieu qui nous entraîne bien au delà de nous-même, dans l'infini de Dieu. Aujourd'hui, premier mai, c'est la fête du travail. Du travail qui doit anoblir l'homme et non l'asservir. C'est la fête du travail mais surtout celle des travailleurs, de ceux qui par leur travail, quel qu'il soit, s'inscrivent dans cette histoire de relation humaine et divine qu'est le plan de Dieu pour notre monde. C'est la fête de ceux qui ont l'audace et l'humilité de travailler, comme le dit saint François : "Au nom du père, par le fils et avec l'esprit".
Amen