SE COMMUNIQUER L'AMOUR POUR LA GLOIRE DU PERE
Dimanche passé, nous écoutions le premier volet de la magnifique allégorie de la Vigne qui constitue le centre du discours d'adieu de Jésus à ses disciples. Au moment de disparaître, il leur offre ses ultimes révélations sur ce qu'ils auront à vivre, il leur apprend la profondeur de leur nouvelle identité. Ils ne sont pas un groupement qui conserve le souvenir d'un maître, une secte qui défendra ses intérêts, une organisation à visée hégémonique mais « une communion », comme une vigne et ses sarments.
Aujourd'hui nous écoutons la seconde partie : quel résultat Dieu attend-il de cette Vigne ?
A l'heure où Jésus passait de ce< monde à son Père, il disait à ses disciples :
« Comme le Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés : demeurez dans mon amour.
Si vous êtes fidèles à mes commandements, vous demeurerez dans mon amour comme moi, j'ai gardé fidèlement les commandements de mon Père et je demeure dans son amour.
Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que vous soyez comblés de joie..... »
Jésus ne leur demande pas un examen de conscience ni la comptabilité de leurs bonnes actions mais de prendre conscience de ce qu'il a vécu pour eux : il leur a offert le feu qui l'habitait, l'amour infini de son Père. Parce qu'il les « aime jusqu'au bout » (13, 1), il vient de leur laver les pieds et il va s'engager sur le chemin de la croix. Etre chrétien, ce n'est pas d'abord faire ou mériter quelque chose, c'est être aimé de Jésus tel que l'on est. Et cet amour est proprement et intégralement l'amour du Père.
Encore faut-il « demeurer » dans cet amour. Pour cela, une seule condition, indispensable : observer sa volonté, vivre à la manière qu'il a enseignée, prendre l'Evangile comme code de conduite. La foi doit devenir fidélité ; la dévotion, action ; le rite, pratique ; la parole, engagement ; la ferveur, persévérance. La lutte sera quotidienne tant notre égoïsme cherche à reprendre le dessus, tant les obstacles sont nombreux, tant nous voulons « rester en nous » au lieu de « demeurer en lui ». Il nous faudra sans cesse garder les yeux sur Jésus, connaître l'Evangile pour apprendre comment lui-même a durement appris l'obéissance.
Mais que cet enseignement de Jésus est exaltant ! Ses paroles n'écrasent pas, ne désespèrent pas. Au contraire il nous les dit afin de nous remplir de SA JOIE ! Une joie que le monde ne peut offrir parce qu'elle naît de l'accomplissement total de notre être par un don d'amour, et parce que rien ni personne ne peut nous l'enlever (16, 22) !
Mon commandement, le voici : aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés.
Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis.
Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande.
Je ne vous appelle plus serviteurs car le serviteur ignore ce que veut faire son maître.
Maintenant je vous appelle mes amis
car tout ce que j'ai appris de mon Père, je vous l'ai fait connaître.
Après avoir insisté sur la nécessité de garder l'attachement à Jésus, de ne jamais se détacher du cep, ici, en second volet, Jésus révèle le fruit que la vigne va offrir : l'amour réciproque des membres les uns pour les autres « comme Jésus nous a aimés ». « Comme » : il n'y a pas là seulement un exemple à imiter car nous sommes sortis de l'ancienne Alliance où le croyant essayait de pratiquer ce que la loi ou un prophète lui enseignait. Maintenant nous sommes dans la Nouvelle Alliance : à l'intérieur de la vigne qu'ils constituent comme « Jésus total », les membres (sarments) ne peuvent que se communiquer la sève (L'Esprit-Saint) qui vient du Christ (le cep) et qui les soude les uns aux autres. Si Jésus parle de « commandement », il ne peut s'agir d'un ordre donné par une autorité extérieure. Mais comme nous sommes toujours tentés de définir notre foi par des observances que nous inventons à notre gré, Jésus doit absolument préciser et définir l'essentiel de notre « demeure avec lui » : la charité entre membres.
Cet amour n'est pas de paroles, il ne choisit pas son objet (le membre de la famille, le collègue de travail, le compatriote, le croyant de même sensibilité...). Il ne se réduit pas à des gestes de politesse, ne s'enferme pas dans des limites. Car Jésus conduit son disciple à aimer comme lui, c.à.d. à donner sa vie s'il le faut pour les autres personnes aimées de Jésus.
Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis
afin que vous partiez, que vous donniez du fruit et que votre fruit demeure.
Alors, tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous l'accordera.
Ce que je vous commande, c'et de vous aimer les uns les autres »
Le disciple, l'ami de Jésus, n'a pas à se vanter de sa foi comme d'une initiative intelligente, d'un élan de bonne volonté : le choix par Jésus reste toujours prioritaire. Cela ne signifie pas qu'il soit arbitraire, que le Seigneur appelle un tel et repousse un autre, puisqu'il n'a jamais fondé une secte d'initiés mais a toujours parlé à la foule. Cette « élection » est responsabilité, obligation de donner réponse, de faire du fruit. Les sarments sur le cep sont de différentes dimensions : ainsi les amis de Jésus diffèrent parce que chacun reçoit une mission particulière. Tous doivent « partir » et « donner du fruit » et « un fruit qui demeure » c.à.d. un amour qui persiste jusqu'à la fin, jusqu'au bout. Les ½uvres singulières ne sont pas à comparer, il n'y a pas place pour l'envie, la rivalité et la jalousie. L'essentiel est que la vigne de Dieu prospère et promette une vendange plantureuse.
Pour finir, comme dans le 1er volet de l'allégorie, l'instruction se termine par une allusion à la prière de demande. Si un sarment de vigne bien émondé donne du fruit par processus naturel, le disciple, lui, n'est pas un membre passif, il doit vouloir réaliser sa mission, collaborer à l'accomplissement du projet de Dieu. Donc, à la suite du Christ, lui-même relié en permanence à son Père et sans cesse décidé à lui obéir, le disciple prie, demande, « aspire » l'amour infusé par le cep, se nourrit d'une énergie qui lui fera porter du fruit.
Et le paragraphe se termine comme il a commencé (inclusion) :
CE QUE JE VOUS COMMANDE, C'EST DE VOUS AIMER LES UNS LES AUTRES.
CONCLUSION
Ecartons toute lecture qui flatte notre orgueil (« Tout cela je l'ai fait ») ou nous plonge dans la culpabilité (« je n'ai pas pratiqué cet idéal, je suis en faute»). Cette allégorie est une révélation que Jésus est tout heureux de nous offrir :
nous sommes introduits dans une lumière que tant d'hommes ignorent - nous ne sommes plus « des serviteurs » d'un maître exigeant mais des « aimés du Christ » - nous ne pouvons douter de cet amour reçu puisqu'il s'est manifesté sur la croix - nous ne sommes jamais plus seuls : sarments de la vigne, nous sommes comme des extensions du Christ, reliés les uns aux autres, nous communiquant la même « sève » vitale. - notre devoir, grâce à la prière, est de nous écouter, nous entraider, nous respecter, nous tenir solidaires - bref, nous aimer les uns les autres.
On comprend que le centre de cette page lue en ces deux dimanches soit:
« Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite ».
La messe du dimanche, manifestation locale du Projet du Père, don de Vie du Christ à ses amis, est l'apparition de la VIGNE FECONDE « à la GLOIRE DU PERE « (15, 8) et dans laquelle il n'y a qu'amour et JOIE. ALLELUIA. ALLELUIA.
6e dimanche de Pâques, année B
- Auteur: Devillers Raphaël
- Temps liturgique: Temps de Pâques
- Année liturgique : B
- Année: 2011-2012