7ème dimanche ordinaire

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 19/02/17
Année: 2016-2017, 2015-2016

L’exhortation faite par Jésus paraît bien exagérée et irréalisable.  Dans cette société faite de concurrence, et tout simplement dans le monde dans lequel nous  vivons, il faut pouvoir se défendre et même être parfois agressif.  Vous imaginez dans un magasin un gamin qui vole une pomme.  Vous croyez que le commerçant va lui dire : « c’est très bien ! Prends-en une autre ».  Ou bien vous imaginez dans un conseil d’administration un homme incompétent qui, grâce à des appuis politiques ou familiaux, obtient une place bien rémunérée.  Vous croyez que tout le monde va dire : « c’est très bien ! Prends encore une autre place ».  Non ! Bien au contraire, il faut se battre pour avoir une place.  Et il faut se battre pour la garder.

            Et pourtant chacun d’entre nous, nous réalisons un peu cette recommandation de tendre l’autre joue à celui qui nous a agressés.  Il y a cent ans notre pays a été dévasté par la guerre.  Et cela s’est répété.  Et maintenant nous travaillons, nous commerçons, nous échangeons avec nos pires ennemis.  Ce n’est pas seulement une question de commerce.  C’est aussi et surtout une question de vie.  On n’oublie pas, mais on vit avec.

            Nous le voyons aussi dans la vie de tous les jours.  Il y a des gens qui nous ont blessés, qui nous ont injustement agressés.  Certains, c’était par ambition personnelle ou par méchanceté.  Ils voulaient être les plus grands, les plus forts.  Ils voulaient avoir notre place.  Ils voulaient avoir toute la place.  D’autres, c’est par maladresse ou par incompatibilité d’humeur.  Il y en a qu’on ne peut pas supporter. Mais il faut vivre avec.

            Et c’est là sans doute toute la différence entre Dieu et nous.  Nous, on le fait parce qu’il le faut bien.  Dieu le fait par passion amoureuse.  Regardez le père du fils prodigue.  Le gamin fait sa crise.  Il prend l’argent, il claque la porte et il part.  une fois parti, il n’envoie pas de nouvelle, rien, pas un coup de fil, ni même un SMS.  Et un beau jour il revient.  Et le père l’accueille, fou de joie.  Nous, nous attendons quelques jours, quelques semaines avant de recommencer à parler avec celui qui nous a blessés.

            Il y a pourtant de bons moyens pour se réconcilier.  Il y a tout d’abord le baiser de paix.  Oui, le baiser de paix nous rappelle que nous sommes tout d’abord et avant tout des frères et des sœurs parce que nous venons d’un même Père.  Cette fraternité dépasse tous les liens d’amitié et de sympathie qui peuvent exister.  Comme le Christ qui, sur la croix, pardonnait à ses persécuteurs, nous sommes appelés à pardonner à celui qui nous a blessés.  Il y a ensuite la prière.  Et oui ! Prier pour celui qui nous agressés.  Non pas pour qu’il aille brûler en enfer, mais pour que nous le voyions autrement.  Parfois il est bon de demander à Dieu de nous donner la force de voir les qualités cachées dans le cœur de celui qui nous a blessés.  C’et ce regard-là que Jésus porte que chaque homme et chaque femme qu’il a rencontré au cours de sa vie et qu’il porte maintenant sur chacun d’entre nous.  Et cela nous permet de vivre à nouveau, de ressusciter.

            Tendre l’autre joue, oui, nous le faisons tous les jours un petit peu parce qu’il le faut bien.  Mais Dieu le fait avec tellement de passion que nous en sommes tout transformés.