La liturgie de ce dimanche des Rameaux est un peu compliquée, mais riche en enseignements. Elle associe deux événements fort différents : l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem et sa pathétique crucifixion. En fait, aujourd’hui, dimanche, il ne faudrait célébrer que l’entrée triomphale de Jésus. C’est vendredi que nous célébrerons la crucifixion. Mais les organisateurs de la liturgie savaient que les gens travaillent le vendredi et que donc les chrétiens n’auraient pas la possibilité d’entendre le récit de la Passion. Et cette concomitance de ces deux célébrations aujourd’hui est riche d’enseignements théologiques.
Il y a tout d’abord cette proximité entre la gloir et le succès d’une part et d’autre l’échec et la mort. Ne dit-on pas que la roche tarpéienne est proche du Capitole ? Cela rappelle un événement dans l’histoire de la République romaine. Tarpeia avait sauvé Rome en entendant les oies crier à l’arrivée des envahisseurs, mais il prit une orientation politique qui révolta le peuple, et il fut précipité du haut d’une roche qui porte son nom, la roche tarpéienne. Cruelle dérision que la destinée humaine ! L’échec et l’humiliation sont bien proches du succès et de la gloire.
Et c’est là la deuxième leçon de cette liturgie. L’entrée solennelle de Jésus n’a duré qu’un bref instant : à peine dix lignes dans le texte sacré de l’Evangile. La Passion et la mort de Jésus ont duré bien plus longtemps : presque dix pages. Et c’est vrai que les lauriers de la gloire se fanent bien vite sur notre tête tandis que les cruelles blessures de nos échecs et de nos erreurs restent longtemps, bien longtemps douloureuses et sensibles.
Et c’est cela que Jésus, le Fils de Dieu, a voulu partager avec nous : la gloire éphémère de nos succès et la cuisante blessure de nos échecs. Elle est bien lourde à porter, cette mauvaise réputation – justifiée ou injustifiée – que certains se plaisent à rapporter et à entretenir contre chacun d’entre nous. Mais le plus beau personnage dans toute cette tragédie, n’est-ce pas le bon larron ? Ecrasé par la souffrance, rejeté et abandonné de tous, il a encore la force de faire confiance en Jésus, cet inconnu. « Souviens-toi de moi quand tu seras dans ton royaume. » N’est-ce pas là la plus belle que nous puissions dire à Dieu : « souviens-toi de moi » ? Et tout sera transformé.