La fête de l'Épiphanie que nous célébrons aujourd'hui a ses racines historiques dans le fait que les empereurs dans le temps de Jésus faisaient leur joyeuse entrée dans une ville. Ils faisaient leur première apparition en publique. Aujourd'hui c'est Jésus qui se montre au public. Se montrer au public, ce n'est pas si évident en nos jours. Car : qui est ce public ? Qu'est-ce qu'ils attendent ? On dit souvent que l'Église a une mauvaise presse, qu'elle apparaît aux yeux de nos contemporains plutôt comme quelque chose de vieillot ou quelque chose qui n'est plus crédible. Ses points de vue semblent être retardés. Et Jésus ? Il appartient au mémoire collectif, qui est bien chargé des images traditionnelles. Jésus, c'est déjà vu. Sa seule possibilité de survie, c'est d'être actualisé, adapté aux exigences de notre temps. Mais il s'agit dans beaucoup de cas d'une sorte manipulation inconsciente de Jésus. On fait de Jésus une image, une théorie plausible, mais qui parle encore de Jésus lui-même, toujours vivant ? Et qui parle encore à Jésus ? Je pense que l'histoire des trois rois mages n' pas encore perdu son intérêt. Ce sont des gens de tous les temps qui cherchent un sens à leur vie, le sens de la vie, mais en dehors de l'univers biblique, en dehors du christianisme. Ils cherchent un sens dans les étoiles. Cela ressemble un peu à l'horoscope qu'on lit seulement quand il faut attendre chez le docteur ou chez le coiffeur. Mais il y a du vrai dans la recherche d'un sens dans les étoiles. En fait, c'est croire qu'un sens de vie nous est donné, qu'il n'est pas seulement le fruit de notre cerveau ou de notre manière de regarder le monde. Il y a quelque chose qui nous surpasse. Je vois chez les rois mages une authenticité et une recherche sincère. Une recherche sincère, cela veut dire : une recherche qui veut trouver et qui est prêt de quitter ses opinions si la vérité s'avère être autrement. La recherche peut être aussi une sorte de sport intellectuel, un exercice de penser, mais pas plus. Nous vivons un peu, surtout dans des milieux qui ont connu la tradition chrétienne, dans une sorte d'ambiance déconstructiviste : une tradition trop connu, qui dans le temps était devenu trop lourde et étouffante, qui pèse et qui est encore mal digéré à nos jours, surtout, je crois, chez les croyants de traditions. Les gens ne veulent plus de cela et ils jettent le joug. Ils vont chercher ailleurs, ou justement pas : ils se plaisent dans leur attitude de scepticisme et ne veulent justement pas trouver. Jésus, que peut-il encore signifier dans ce climat de pensée ? Mais il faut peut être avoir traversé le nonsense de la vie, et je ne parle pas des problèmes de luxe, mais de l'expérience que la vie et la culture d'aujourd'hui semblent plutôt offrir le vide, pour comprendre l'attitude des rois mages qui cherchaient le sens de la vie un peu partout, même dans les étoiles. Et Dieu ne nous facilite pas toujours cette recherche de sens, surtout lorsque l'univers de notre pensée est fermé, même si cela s'est fait de manière inconsciente. Mais il donne la lumière aux rois mages qui ont le courage de quitter leur vie et de s'agenouiller devant ce qui est le plus invraisemblable : Dieu présent dans l'enfant le plus pauvre de Bethléem. Les rois mages nous ont quelque chose à dire. Ils ne nous disent pas qu'il faut croire aux horoscopes. Ils nous disent : quitte ton pays pour trouver le sens, quitte tes préjugés, tes opinions, tes sûretés, et peut être tu trouveras. Ils nous disent qu'il faut être ouvert à un sens de vie que nous n'avons pas construit nous-mêmes, mais qui nous a été donné. Épiphanie, c'est le moment de se réveiller, de quitter son égocentrisme ; l'épiphanie, c'est le moment où devient claire qu'il ya un Autre qui se laisse découvrir et qui vient à nous à sa manière. Le Dieu du Nouveau Testament n'est pas une invention humaine, car penser le paradoxe de l'incarnation du Fils de Dieu est trop difficile et compliqué. Mais un paradoxe est fait, non pas pour manipuler ou réduire, mais pour ouvrir nos esprits. Puissent nos c½urs également s'ouvrir à Dieu qui se fait paradoxalement proche en Jésus Christ.
Epiphanie
- Auteur: Lens Patrick
- Temps liturgique: Temps de Noël
- Année liturgique : A, B, C
- Année: 2007-2008