Fête de la Pentecôte

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2012-2013


Dans son journal intime, Etty Hillesum, jeune juive qui mourra dans un camp de concentration fin 1943, écrivit ceci le 25 août 1941 : « Il y a des gens, je suppose, qui prient les yeux levés vers le ciel.  Ceux-là cherchent Dieu en dehors d'eux.  Il en est d'autres qui penchent la tête et la cachent dans leurs mains.  Je pense que ceux-ci cherchent Dieu en eux-mêmes ».  Cette réflexion n'est-elle pas dans la droite ligne de la fête de la Pentecôte ?

De toute éternité, Dieu devait s'incarner.  De toute éternité, les êtres humains allaient un jour vivre l'expérience de l'effusion de l'Esprit Saint.  Telle est la merveille de ce que nous célébrons en ce jour.  Le Ciel n'est plus au dehors de nous.  Il s'est installé au plus profond de nous.  Ne cherchons plus Dieu dans les hauteurs de sa Création mais partons à sa rencontre là où il réside dorénavant : au c½ur de chacune et chacun d'entre nous.  Par le don de l'Esprit Saint, Dieu n'est plus extérieur à nous.  Il est en nous.  Il vit en nous.  Nous sommes les Tabernacles vivant de sa présence au c½ur de sa propre création.   Rencontrer Dieu devient ainsi d'une simplicité déconcertante.  Il suffit de se rendre au plus intime de son être ou encore de se tourner vers le c½ur de celles et ceux qui nous entourent.  Dans l'événement de la Pentecôte, plus encore qu'avant, nous sommes devenus parcelles divines à l'½uvre en notre monde.  Dorénavant, nous affirme saint Paul, nous vivons sous l'emprise de l'Esprit puisque « l'Esprit de Dieu habite en nous ».  Il y a donc du divin en tout être humain.  Cette affirmation anthropologique est une invitation qui nous est faite pour que notre regard se transforme.  Il est vrai que dans la vie, il nous arrive de croiser des personnes avec lesquelles nous pouvons nous sentir moins en sympathie.  Nous accrochons moins, pourrions-nous dire.  C'est un fait et pourtant, elles aussi sont habités de la présence de Dieu et mérite que notre regard et notre attitude évoluent pour qu'à notre tour, nous arrivions à voir cette parcelle divine présente en chacune d'elles.  Le tout de notre être ne peut toutefois se résumer à se reconnaître comme simple résidence terrestre de notre Dieu.  En effet, poussés par l'Esprit de vérité, par notre Défenseur, nous sommes partis à la rencontre du Fils.  Ce dernier nous propose un véritable chemin de vie.  Il nous convie à mettre nos pas dans ses propres traces et à devenir des êtres justes, c'est-à-dire des personnes ajustées à la volonté divine et qui, par ce biais, accomplissent leur destinée au cours de leur pèlerinage terrestre. Tous comme les premiers apôtres nous sommes priés de devenir, à partir des dons différents que nous avons chacune et chacun reçus, des êtres contagieux de Dieu.  L'Esprit Saint est un esprit de feu qui embrase l'humanité entière.  Toutefois, en un jour comme celui-ci, il est utile de se rappeler que l'Esprit Saint ne peut pas se passer de nous.  Il passe par nous.  Dans l'événement de la Pentecôte, nous devenons l'Esprit de Dieu à l'½uvre dans le monde.  Nous sommes des êtres cocréationnels dans le Père, des êtres résurrectionnels dans le Fils et nous devenons des êtres actionnels dans l'Esprit.  Les fruits de l'Esprit se découvrent dans « l'actionalisation » de nos vies.

L'actionalisation ne consiste pas à faire pour faire.  Cela va bien au-delà des actes que nous posons car ces derniers s'inscrivent à jamais dans la manière dont nous permettons à Dieu d'½uvrer parmi nous.  Comme nous avons pu en faire l'expérience, Dieu n'intervient plus à temps et à contretemps de manière directe dans les affaires de notre monde, au gré des prières que nous lui adressons.  Dieu nous accompagne sur la route de nos vies et sa présence est davantage de l'ordre d'un dynamisme de vie en tout être humain, dynamisme qui le fait agir dans le sens de l'amour tel qu'il nous a été révélé dans le Fils.  L'événement de la Pentecôte nous rend ainsi pleinement participants chaque fois que l'amour est le moteur de nos existences  et que par cet amour donné, certains se sentent réconfortés dans les difficultés qu'ils peuvent traverser.  Le Père, le Fils et l'Esprit demeurent à jamais auprès de nous.  Pour le découvrir, il suffit tout tendrement d'aimer le Tout Autre qui se révèle dans tous ces autres qui marchent avec nous sur la route de la Vie.  Bienheureux sommes-nous alors d'être habités de cette présence divine qui nous pousse à toujours chercher à aimer, aimer et aimer.

Amen