« Ah si seulement ton c½ur pouvait devenir crèche,
Dieu, une fois encore, sur cette terre, deviendrait enfant »
UN NOUVEAU SUJET DE CESAR
En ces jours-là, parut un édit de l'empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre -- ce premier recensement eut lieu lorsque Quirinus était gouverneur de Syrie. Et chacun allait se faire inscrire dans sa ville d'origine.
Joseph, lui aussi, quitta la ville de Nazareth en Galilée, pour monter en Judée, à la ville de David appelée Bethléem, car il était de la maison et de la descendance de David. Il venait se faire inscrire avec Marie, son épouse, qui était enceinte. Or, pendant qu'ils étaient là, arrivèrent les jours où elle devait enfanter. Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l'emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n'y avait pas de place pour eux dans la salle commune.
Connaître le nombre immense de « ses sujets », supputer les sommes astronomiques des impôts, programmer la construction de monuments gigantesques, savoir combien d'hommes on pourra mobiliser pour les armées : quelle ivresse d'être l'homme le plus puissant qui ait jamais vécu sur terre ! Et quels triomphes les foules lui rendent pour tant d'années de paix ! Vraiment Octave a mérité son surnom « Auguste » car il est comme un dieu. Cependant « la Ville éternelle » ( ?) ne tiendra que 5 siècles avant de s'écrouler sous les coups des Barbares. Toutes les civilisations sont mortelles.
Or, dans un coin perdu de l'Empire, naît un petit pauvre. Un « sujet » de plus pour César. Comme ses parents, il obéira aux lois civiles, il ne complotera pas contre le Pouvoir. Mais cet enfant si fragile, si pauvre, deviendra SEIGNEUR d'un Royaume de Paix et qui durera jusqu'à la fin des temps.
Avons-nous envie d'un palais ? Sommes-nous fascinés par la force ? Cherchons-nous le bonheur dans la richesse ou dans le partage ? dans la vengeance ou dans le pardon ? .......
Nous nous lamentons sur l'insignifiance de la paroisse ? Notre avenir dort sur la paille d'une crèche.
ANNONCER LA JOIE DE LA BONNE NOUVELLE
Dans les environs se trouvaient des bergers qui passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. L'ange du Seigneur s'approcha, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière. Ils furent saisis d'une grande crainte, mais l'ange leur dit :
« Ne craignez pas, car voici que je viens vous annoncer une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple : Aujourd'hui vous est né un Sauveur, dans la ville de David. Il est le Messie, le Seigneur. Et voilà le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. »
Et soudain, il y eut avec l'ange une troupe céleste innombrable qui louait Dieu en disant :
« Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu'il aime. »
Un « ange » n'est pas un être divin et ailé mais « un envoyé », un messager chargé d'apporter une révélation. Dans le flux des nouvelles de malheur, la BONNE NOUVELLE retentit : le Libérateur est venu. Ce n'est pas l'Empereur romain mais un enfant juif. Il naît de nous (Marie) mais il n'est pas notre ½uvre (Joseph). Il n'est pas victoire des uns sur les autres mais joie pour l'univers des hommes.
Entendre cette Bonne Nouvelle fait de chaque jour un AUJOURD'HUI de grâce. S'éteignent nos remords, nos déceptions, nos inquiétudes, nos résolutions, nos vanités. Et brille l'Evangile.
Du haut de son trône, César ne peut qu'imposer son ordre par la force. A partir de sa crèche - et plus tard de sa croix - Jésus propose sa paix à toute liberté. Sa Paix est mondiale, certaine parce qu'elle n'est pas résultat de conquêtes mais essentiellement GLOIRE RENDUE A DIEU. Un Dieu qui aime tous les hommes et veut les rassembler autour d'un bébé emmailloté à Bethléem avant d'être un homme enveloppé dans un linceul au Golgotha.
Aux hommes toujours en quête des signes de force (palais, armées, luxe, spots, paillettes, Olympia des dieux puis des « stars », délire devant les idoles...), Dieu donne LE SIGNE DEFINITIF.
Silence au milieu des stridences. Lumière parmi les ténèbres. Dénuement dans le torrent de cupidité. « ETRE » authentique dans le déchaînement de l' « AVOIR » fragile et mensonger.
LES BERGERS NOS MODELES
Lorsque les anges eurent quitté les bergers pour le ciel, ceux-ci se disaient entre eux : « Allons jusqu'à Bethléem pour voir ce qui est arrivé, et que le Seigneur nous a fait connaître. » Ils se hâtèrent d'y aller, et ils découvrirent Marie et Joseph, avec le nouveau-né couché dans la mangeoire. Après l'avoir vu, ils racontèrent ce qui leur avait été annoncé au sujet de cet enfant. Et tout le monde s'étonnait de ce que racontaient les bergers.
Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son c½ur.
Les bergers repartirent ; ils glorifiaient et louaient Dieu pour tout ce qu'ils avaient entendu et vu selon ce qui leur avait été annoncé.
La Bonne Nouvelle est-elle usée ? Beaucoup estiment qu'elle a fait son temps. Le pauvre nouveau-né est remplacé par le père Noël au manteau pourpre (comme César jadis !) : au moins voilà quelqu'un qui peut nous rendre heureux en nous comblant de cadeaux ! (sic)
Qui écoute l'Evangile ? Ceux qui ressemblent aux bergers : pauvres sans ressources - éveillés dans la nuit - gardiens des vies contre les attaques des prédateurs.
Méditons leur comportement : aller voir (sortir de sa situation, se déplacer, être curieux) - se hâter - découvrir Jésus, un Sauveur faible - sortir d'une piété fade, gênée et silencieuse pour raconter, échanger, communiquer sur ce qu'on voit, ce qu'on entend, ce qu'on ressent.
Notre paroisse est-elle ouverte aux bergers en quête de vérité, aux hommes désespérés dans la nuit ?
Est-elle Maison du Pain (en hébreu beth-lehem) partagé au milieu des demeures de gaspillage et des temples de la consommation ?
Le pape François nous presse à la mission : « J'aime bien utiliser l'expression « aller vers les périphéries », vers les périphéries de l'existence, tous les pauvres, de la pauvreté physique à la pauvreté intellectuelle...tous les carrefours !...Sortir de nous-mêmes, sortir de nos communautés pour aller là où les hommes et les femmes vivent, travaillent et souffrent, et leur annoncer la Miséricorde du Père...Soyez partout des porteurs de la Parole de Vie dans vos quartiers, sur les lieux de travail...Vous devez sortir. Je ne comprends pas les communautés chrétiennes qui s'enferment dans leur paroisse... Semer n'est pas facile ...mais cette lutte est celle qui revient à tous les chrétiens chaque jour... ». (17.6.13)
MARIE LA CROYANTE
Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son c½ur.
Il lui avait été dit qu'elle aurait un fils qui « aura le trône de David...pour un règne sans fin... », puis Elisabeth l'avait congratulée : « Heureuse toi qui as cru... »- et là voilà à présent, la pauvre, loin de son village, sans autre berceau qu'une crèche pour y déposer son enfant sur lequel se penchent, ravis, quelques bergers pouilleux ! Marie enregistre en son c½ur, au plus profond d'elle-même, cette série d'événements insolites, elle cherche le sens qui y est caché à la lumière des Ecritures saintes. Elle n'est pas femme passive, résignée : elle assume son histoire, elle s'y veut actrice responsable. La foi est un OUI qui cherche à comprendre.
Plus tard, après bien des joies, des épreuves et l'horreur de la croix, elle s'émerveillera que le mort dans le linceul devienne Seigneur de la Vie et que les maisons du Pain Partagé - les églises (beth-lehem)- s'ouvrent dans le monde entier pour y accueillir les pauvres.
Nos communautés sont les nouvelles étoiles où retentit la Bonne Nouvelle, où les descendants des bergers, les veilleurs, n'en finiront jamais de rendre gloire à Dieu.
Afin que le récit de Noël ne soit pas une histoire féérique, vestige incertain d'un passé révolu, il nous appartient d'en faire un AUJOURD'HUI où à nouveau nous recevons la Joyeuse Nouvelle :
LE SAUVEUR NOUS EST NE, JOIE POUR LE MONDE.
« Ah si seulement ton c½ur pouvait devenir crèche,
Dieu, une fois encore, sur cette terre, deviendrait enfant » (Angelus Silesius - 1624-1677)
Noël
- Auteur: Devillers Raphaël
- Temps liturgique: Temps de Noël
- Année liturgique : A, B, C
- Année: 2013-2014