Saint Jean-Baptiste ordinaire, année Aucune

Auteur: Henne Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A, B, C
Année: 2011-2012

Jean-Baptiste est-il un modèle à imiter ? Nous avons tous besoin de repères et certains personnages que nous rencontrons peuvent nous aider à mieux choisir notre façon de vivre.  La question qui se pose est de savoir qui nous voulons imiter, quel genre de vie nous voulons mener.  Un garçon fera tout pour imiter son papa.  Un adolescent fera tout pour ne pas être comme son père.  Un adulte se sent parfois abandonner, sans repères, car tout est possible et plus rien n'est proposé.  Les seuls modèles que l'on ait, ce sont des personnages inaccessibles, des héros, des supermen, des James Bond aux multiples conquêtes ou  des Harry Potter aux multiples pouvoirs.  Nous en sommes loin.  Voyons  donc avec ce que nous sommes ce que nous pouvons imiter chez Jean-Baptiste.
Il faut reconnaître qu'à première vue ce n'est pas un modèle très engageant.  Il vivait de sauterelles et de goutes de miel, retiré dans le désert, vêtu d'une simple peau de bête.  Ce n'est pas vraiment mon idéal de vie.  De plus, il a connu une triste fin.  Arrêté, il entend parler de Jésus et il envoie ses disciples lui demander : « es-tu celui qui doit venir ? »  Le pauvre homme se demande si son sacrifice a vraiment du sens, s'il ne s'est pas trompé, s'il n'a pas gâché toute sa vie.  Et pourtant c'est lui qui a proclamé haut et fort : « voici l'agneau de Dieu qui vient sauver le monde ».  Mais on a beau avoir parfois des intuitions géniales, il n'en demeure pas moins que la vie érode les convictions les plus profondes.  Un jour, on se dit : oui, c'est avec lui, c'est avec elle que je veux passer toute ma vie.  Les années passent, les sentiments s'émoussent, l'ennui s'installe, le doute commence à ronger le c½ur de chacun. 
C'est peut-être en cela que Jean-Baptiste peut être un modèle  pour nous : il a eu l'audace de se remettre en question.  Il n'a pas confondu fidélité avec entêtement.  Et c'est là une question qui se pose dans tous les domaines.  Dois-je garder ce travail alors que les conditions sont  si difficiles ? Dois-je maintenir cette interdiction aux enfants alors qu'ils deviennent grands ? Dois-je m'astreindre à cette obligation alors que tous les autres semblent l'ignorer ? Quelle est la différence entre fidélité et entêtement ? On a vu tant de communautés religieuses s'enterrer vivantes dans le corset de règles étroites et dépassées.  On a vu des communautés se détruire en ne voulant rien changer à leur intuition des années 60 et 70.  L'énergie que l'on met à garder certaines petites règles ou certains grands principes nous empêche parfois d'écouter l'autre qui me parle, d'accueillir le nouveau qui ne comprend rien, d'aimer celui qui est seul et isolé. 
Si l'on regarde Jean-Baptiste, on se rend compte que, s'il a pu faire la différence entre la fidélité et l'entêtement, c'est parce qu'il s'est attaché à une personne qu'il ne connaît pas, qu'il ne comprend pas, qui le dépasse.  L'attitude de Jésus n'était pas celle d'un sauveur politique ou religieux, tel que Jean-Baptiste l'imaginait.  Mais Jean avait fait le saut dans l'inconnu, vis-à-vis d'un Dieu qui le dépasse et Jean est resté fidèle à ce saut dans l'inconnu. 
En célébrant cette Eucharistie, reconnaissons que Dieu a pris un bien grand risque en nous aimant comme il le fait.  Mais lui aussi est resté fidèle à son amour, malgré nos infidélités, malgré notre petitesse, grâce à sa miséricorde.  Puissions-nous, nous aussi, nous laisser entraîner par cet amour fou pour pouvoir jouir de la présence de Dieu pour l'éternité.