Sainte Famille, année C

Auteur: Henne Philippe
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : C
Année: 2012-2013

Entre Noël et Nouvel An, la liturgie nous invite à célébrer la Sainte Famille.  Mais qu'est-ce que cela veut dire ? La Sainte Famille serait-elle le modèle de toutes les familles chrétiennes ? Cela paraît peu vraisemblable.  Josep ne paraît pas être un modèle très attrayant pour les hommes.  Marie est une vierge-mère, ce qui est exceptionnel.  Jésus est Fils de Dieu, ce qui est unique.  Il serait facile de rire et de se moquer de cette fête, mais, si elle nous est proposée, c'est qu'il y a une raison.  De plus, si on réfléchit bien, nous constatons que notre modèle de la famille n'est pas excellent.  On voit bien autour de soi que les familles repliées sur elles-mêmes paraissent souvent étouffantes et que, par contre, les familles dispersées risquent de se vider de leur sens.  Notre expérience personnelle nous invite donc à profiter de cette fête pour nous ouvrir à un sens plus profond de la famille.
Essayons une piste de réflexion.  Supposons que chaque personnage de la Sainte Famille symbolise un aspect de notre vie, de notre salut.  Prenons saint Joseph.  C'est celui qui, par son travail, permet aux autres de vivre.  Par son travail, il nourrit sa famille.  Voilà qui, sans doute, ouvre un beau champ de réflexion : en quoi mon travail contribue-t-il au salut de ma famille, de ma communauté ? Le travail est-il pour moi et pour mon couple une punition ou une source d'épanouissement ? Vous me direz : « cela ne dépend pas de moi.  Je peux tomber sur un chef exécrable ou être soumis à des cadences épouvantables. » C'est vrai, c'est exact, mais, moi, comment je me comporte en famille par rapport aux tâches quotidiennes ? Sont-elles autant de corvées ou autant de possibilités de manifester ma solidarité avec les autre, et pourquoi pas ?, un moyen de me réconcilier ? Après une dispute, il est parfois plus facile de réintégrer le cercle familial par un service rendu exceptionnellement que par des excuses difficiles à formuler. 
Par son travail, Joseph permet aux autres de vivre.  Par sa maternité, Marie donne la vie.  Cela pose naturellement, pour nous chrétiens, mais aussi à tous les humanistes, la question de la vie, que ce soit en lien avec l'avortement ou l'euthanasie.  Mais cela pose aussi la question fondamentale de savoir pourquoi on veut avoir des enfants.  Certaines dictatures voulaient avoir beaucoup d'enfants pour avoir beaucoup de soldats.  Mais nous ne sommes plus à l'âge de croire et de penser qu'il faut faire des enfants pour le bien de la société et du pays.  Et pourtant, le besoin, le désir d'avoir des enfants est profondément inscrit dans l'être humain.  C'est sans doute parce que l'amour est créateur.  Aimer est fécond.  Un amour ne se vit pas replié sur lui-même.  Un amour doit s'ouvrir sur l'univers, doit s'ouvrir sur les autres différents de nous.  Un enfant naît lorsqu'il se sépare du corps de sa mère.  Un homme devient adulte quand il devient capable de fonder un nouveau foyer, une nouvelle vie.  Par sa maternité, Marie donne la vie.  Elle devient la mère de tous les croyants.  Sa fécondité spirituelle est universelle.
Joseph permet aux autres de vivre.  Marie donne la vie.  jésus est la vraie vie.  Il est le Fils de Dieu.  Et voilà que nous découvrons à l'intérieur même de la famille la présence de Dieu.  Cet amour qui est vécu entre époux et entre les générations permet de découvrir non seulement  la générosité de Dieu envers chacun d'entre nous, mais aussi la miséricorde de Dieu à notre égard.  Il nous permet aussi de découvrir toute la diversité de la nature humaine : un homme n'est pas une femme et deux frères peuvent être radicalement différents.  L'amour conjugal et familial nous permet aussi de deviner toute l'étendue de l'amour et de la tendresse de Dieu pour chacun d'entre nous.  La vie en famille n'est pas simplement une vie d'amour, c'est une leçon de catéchisme.
La Fête de la Famille est donc pour nous une merveilleuse opportunité de redécouvrir la perspective chrétienne de toute vie humaine, que ce soit en famille, en couple ou en solitaire.  Joseph montre que le travail, réalisé à la maison ou en communauté, peut être un moyen de créer ou de recréer des liens d'estime et de pardon.  Marie, par sa fécondité, montre que son amour dépasse, et de loin, les limites de la famille.  Marie est la mère de tous les croyants.  Jésus, par sa divinité, nous révèle que chaque rencontre peut être une leçon d'amour venant de Dieu.
En cette période de fête, je vous souhaite d'ouvrir des yeux émerveillés sur ceux qui travaillent,  ceux qui rendent service et ceux qui aiment tout simplement, comme Dieu à notre égard.