Lorsque la météo annonce un temps de Toussaint, tout de suite nous imaginons un temps de grisaille, une pluie fine sous un ciel bien gris. Un peu comme si la déprime était au goût du jour. Certains pourraient même aller jusqu'à dire que puisque tout est lugubre et maussade, c'est que c'est vraiment la Toussaint. S'il en est ainsi nous devons reconnaître que la Toussaint est la fête de l'opposition. Opposition à la grisaille, opposition à toute forme de tristesse. En effe,t la Toussaint est une fête qui ne parle que de bonheur, c'est-à-dire la Toussant des Béatitudes. Par neuf fois nous entendons dans l'évangile de ce jour le terme " heureux ". Ce n'est donc pas Toussaint des ambiances de cimetière mais plutôt Toussaint la fête. Notre fête. Alors à toutes et à tous : bonne fête.
Oui, c'est bien notre fête. Par les sacrements, nous sommes devenus Corps du Christ et Temple de l'Esprit. Nous sommes appelés à la sainteté de Dieu. Cela nous paraît peut-être impensable, impossible. Et pourtant telle est notre condition humaine : l'appel à la sainteté. Et le Père, par son propre Fils, nous donne les moyens de réaliser un tel objectif : ces fameuses béatitudes. Le chemin de la sainteté est celui de la réalisation des béatitudes en nous. Si nous essayons de les vivre approchons de ce qui paraît tellement loin de nous. Heureux nous sommes parce que nous avons reçu le plus cadeau qu'il puisse nous être donné : celui de vivre notre vie. Elle peut parfois nous sembler faite d'embûches, de dérapages, c'est vrai. Mais avant tout elle est belle et vaut tellement la peine d'être vécue. Cette vie reçue nous en sommes responsables et c'est la manière dont nous traverserons les événements qui nous permettront de nous rendre compte que nous ne passons pas à côté d'elle, que nous y croquons à pleine dents. Oui, la vie est belle et heureux sommes-nous. Désencombrons nous alors de tout ce qui nous empêche de nous rendre compte d'une telle réalité et retrouvons le sens de nos existences. Pour nous, croyantes et croyants, il passe immanquablement par la foi en Dieu. Un Dieu qui ne nous demande pas de souffrir, de peiner. Un Dieu qui nous demande tout simplement d'être heureux : avec ce que nous sommes.
La sainteté à laquelle nous sommes appelés variera d'une personne à l'autre. En fonction de nos qualités et de nos fragilités nous serons plus à même de commencer à développer une béatitude plutôt qu'une autre. L'essentiel, c'est qu'à la fin du parcours nous ayons comme souci de les vivre toutes. Certains auteurs envisagent les béatitudes comme étant le renversement des dix commandements. Nous ne sommes plus dans l'ordre d'une loi vétéro testamentaire complètement dépassée. Par le Christ, nous entrons dans une ère nouvelle, celle des béatitudes. Une ère qui reconnaît que l'important sur la terre, c'est le bonheur. Et s'il y a plusieurs béatitudes, c'est pour nous rappeler que le bonheur comme tel n'existe pas. Le bonheur se construit chaque jour. Nous seuls pouvons le réaliser. Le bonheur n'existe pas par essence et pourtant nous le vivons. Tout simplement parce que le bonheur est le fruit d'une somme et d'une multiplication. Le bonheur est la somme de tous les petits bonheurs que nous vivons : un sourire, un regard, un geste de tendresse, un acte de solidarité, un refus de juger et de condamner, une parole de compassion voire même de pardon, une oreille attentive, une épaule sur laquelle sécher ses larmes, un souci de paix, un cri face aux injustices. Ces petits bonheurs sont les béatitudes d'aujourd'hui. Celles que nous pouvons vivre quotidiennement. Notre vie en sera complètement transformée. Nous pourrions alors nous contenter d'une telle addition et vivre notre vie. C'est possible mais j'ai l'impression que nous vivrions un fameux manque. Pour nous qui avons reçu le don de la foi, l'addition doit se compléter par une multiplication. En effet, pour qu'il y ait vraiment bonheur, nous devons multiplier la somme des petits bonheurs que nous vivons par le message du Christ Ressuscité. Dieu s'est incarné parmi nous pour que nous ayons la vie et que nous l'ayons en abondance. Vivre sa vie par le prisme de la foi rend la vie plus belle encore car nous lui donnons sens. Dans la foi, nous vivons notre vie en Dieu. Que les béatitudes soient pour chacune et chacun de nous un chemin merveilleux vers la sainteté, notre sainteté ici et maintenant.