La fête d’aujourd’hui, l’Assomption de la Vierge Marie, est bien difficile à comprendre. Tout d’abord, elle célèbre un dogme proclamé en 1950 par le pape Pie XII. Ce n’est donc pas un concile qui promulgué ce dogme, comme ce fut le cas pour la divinité du Fils de Dieu et du Saint-Esprit. C’est le pape qui, fort de son infaillibilité, a proclamé que la Vierge Marie est montée au ciel avec son âme et son corps.
Que Marie soit monté e au ciel avec son âme, on peut le comprendre. Tous les saints monteront au ciel, c’est-à-dire rejoindront le Christ dans sa gloire et jouiront de sa présence. D’accord, mais qua Marie mont au ciel avec son corps, voilà qui paraît plus difficile à imaginer. Et c’est d’autant plus surprenant que ce dogme est basé non pas sur la sainte Ecriture, mais sur un récit apocryphe, c’est-à-dire légendaire : la Dormition de la Vierge. C’est donc un récit qui raconte les derniers jours de la Vierge sur terre. Il a eu beaucoup de succès au début de l’histoire de l’Eglise, mais les papes et les évêques l’ont rejeté de la Bible, comme un récit apocryphe, c’est-à-dire légendaire. Et c’est pourtant sur ce document que le pape Pie XII se base pour justifier la proclamation de ce dogme.
Et c’est vrai que nous avons ici un bel exemple de ce que la piété populaire peut avoir de divin. Comme on le voit, ce ne sont ni les évêques, ni les théologiens qui ont inventé cela. C’est le peuple de Dieu qui, partout, depuis toujours, et sans contestation, a médité ce mystère : la Vierge est montée au ciel avec son âme et son corps. Et cette vérité de la foi est tellement grande que même Luther l’a reconnue comme authentique.
Alors de quoi s’agit-il ? Il s’agit de la transformation complète de notre existence par la présence de Dieu dans notre vie. Je vais vous donner un exemple. Un jour, un jeune homme à Lille m’a dit en riant : « depuis une semaine je ne me lave plus les mains parce que j’ai rencontré Monsieur le Maire et que je lui ai serré la main. » Il y a là une croyance populaire qui n’est pas mauvaise. Il y a partout dans le monde le lit dans lequel la reine Victoria a dormi, le porte-plume avec lequel le général de Gaulle a signé l’un ou l’autre papier. Tous ces objets ont été comme transfigurés par la personne qui les a utilisés. Il en est de même pour l’autel : ce n’est plus une table ordinaire, sur laquelle on pourrait boire un verre ou faire le repassage. L’autel est transfiguré par l’eucharistie qui y est célébrée.
Et de la même façon les premiers chrétiens ont été vite persuadés que le corps de Marie, qui avait porté le Christ, avait été transfiguré par cette présence, et que ce corps ne pouvait pas connaître la corruption, c’est-à-dire pourri. Et ce qui est arrivé à Marie peut nous arriver aussi : être transfiguré par la grâce de Dieu et par l’eucharistie. Nous avons parfois eu la chance de pouvoir rencontrer des gens qui étaient ainsi déjà transfigurés. Ce n’était des hommes et des femmes qui faisaient de grandes choses, mais des personnes qui étaient riches de la présence du Christ dans leur vie, comme la petite Thérèse ou le curé d’Ars. Ou comme Maximilian Kolbe qui était tellement passionné par la Vierge Marie qu’il a donné sa vie pour mourir à la place d’un autre.
Le dogme de l’Assomption ne se trouve donc pas raconté dans les Evangiles canoniques. Il ne vient pas de la réflexion de théologiens installés dans leur bureau. Il vient de la conviction profonde que rencontrer Jésus, ça change non seulement toute la vie, mais aussi toute notre existence, avec notre âme et notre corps. Alors laissons-nous transformer par l’amour du Christ et par l’eucharistie pour devenir, comme Marie, des porteurs du Christ dans notre vie.