Quel étrange dimanche que celui-ci ! Coincé entre deux grandes fêtes liturgiques, l’Ascension et la Pentecôte, il a l’air tout petit et bien écrasé entre ces deux mastodontes. Et pourtant il a toute la richesse des moments simples et discrets de la vie intime. C’est, selon la Tradition, la période durant laquelle les apôtres et Marie se tenaient cachés dans le Cénacle. Ils avaient tous peur.
Ils étaient considérés comme les complices de ce blasphémateur qui, rempli d’orgueil, avait osé dire qu’il était le fils de Dieu. A tout moment, la foule pouvait à nouveau s’exciter et se précipiter sur eux. Il fallait se cacher parce que même leur façon de parler les trahissait. C’est ce que les serviteurs du grand prêtre avait dit à Pierre terrorisé pendant que Jésus était interrogé : « à coup sûr, tu es des leurs ! D’ailleurs, ton accent te trahit ! » (Matthieu 26, 73). C’est la peur, c’est le repli sur soi, et pourtant c’est un moment rempli d’une étrange fraternité.
Dans l’église Saint-Martin à Havré, près de Mons, il y a dans le chœur un vitrail sur le côté. C’est la Vierge habillée en bleu qui se tenait assise au milieu. Autour d’elle, c’étaient les disciples. Ils avaient l’air tout surpris et épouvantés ! Des langues de feu descendaient sur leur front. Seule, au milieu de ce désarroi, la Vierge restait calme et même souriait. Elle savait que quelque chose allait se passer. Elle avait médité tout cela en son cœur. Elle en avait vu des choses dans sa vie et elle les avait méditées.
Et c’est ce que nous faisons chaque dimanche : nous nous asseyons et nous méditons sur les événements de notre vie. Nous faisons ce bilan non pas sous le signe de la rentabilité et de l’efficacité, mais à la lumière de l’amour de Dieu pour nous. C’est comme dans un couple ou dans une communauté. Il est parfois important de s’arrêter et de méditer sur tout ce qui nous réunit et ce qui nous fait avancer. Ce n’est pas de l’amour, c’est plutôt une certaine complicité. Tout ce que nous avons vécu ensemble nous a montré qu’on pouvait compter l’un sur l’autre et que l’on pouvait s’asseoir l’un à côté de l’autre, sans vouloir avoir raison ni montrer qu’on est le plus fort, mais simplement dans le plaisir d’être ensemble.
Et c’est ce que la Vierge Marie avait coutume de faire : de méditer tout cela en son cœur. Dans l’effroi et l’agitation du moment, elle retrouvait la simplicité et la richesse de la présence de Dieu dans sa vie. Elle pouvait alors recevoir, comme les apôtres, la grâce de l’Esprit à l’heure de la Pentecôte.
La prière ne résout pas les problèmes. Elle nous ouvre à la présence aimante de Dieu dans notre vie. Elle nous prépare à recevoir la force de l’Esprit et surtout de discerner ce qu’Il attend de nous dans telle situation conflictuelle ou devant une décision difficile à prendre. Notre vie prend alors une dimension nouvelle, non plus celle simplement d’un passage rapide sur terre, mais d’une incroyable complicité avec l’Eternel, le Bien-aimé. Retrouvons donc la simplicité et la richesse de la présence de Dieu dans notre vie. Accueillons maintenant la grâce de l’Eucharistie qui, sur le chemin de notre vie, nous apporte la force de continuer et surtout la joie de le faire avec Marie en route vers son fils bien-aimé.