19ème dimanche du temps ordinaire (année C)

Auteur: Didier Croonenberghs
Date de rédaction: 11/08/19
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2018-2019


Nous sommes au cœur des vacances. Pour certains d’entre nous, cette période estivale est synonyme de relâche et de légitime repos, une période durant laquelle nous prenons le temps de quitter un peu la rentabilité, le faire, les soucis quotidiens… Il y a donc une certaine ironie—au cœur de cet été— d’entendre cette invitation de l’évangile à être prêts, actifs, disponibles, en tenue de service…  Et pour être dans une telle attitude, l’évangile nous invite en plus à être sans crainte : « Sois sans crainte, petit troupeau » !

Mais est-ce vraiment réaliste ? Nous le savons, nos peurs, nos phobies et nos craintes ne se choisissent pas. Elles sont parfois irrationnelles, sans objet, et s’imposent bien souvent à nous. Elles sont autant de réactions qui nous dépassent et nous submergent. Alors pouvons-nous vraiment décider ce qui par essence ne se choisit pas ? Pouvons-nous réellement faire le choix d’être sans crainte ? Cette invitation est-elle finalement crédible ?

La crainte dont il question dans cet évangile est en fait l’opposé de la foi. La crainte est bien l’absence de foi. En ce sens, être sans crainte, c’est suivre l’attitude de la confiance qui voit la vie comme un don, un trésor qui nous est donné à chaque instant. C’est l’attitude du Christ, qui se reçoit entièrement de son Père. Voilà ce qu’il nous faut cultiver, jour après jour. Découvrir que nous ne nous appartenons pas.

Bien entendu, nos peurs touchent ce qui nous est précieux et tout ce nous pouvons perdre… Mais la foi —au milieu de toutes ces peurs bien compréhensibles— nous fait découvrir qu’en Dieu, il est un trésor qu’on ne peut pas perdre. La foi, nous dit la lettre aux Hébreux, est cette « façon de posséder ce que l’on espère », ce « moyen de connaître des réalités qu’on ne voit pas ». Dans la foi, nous découvrons que se trouve en Dieu ce qui semble hors de notre portée, à vue humaine…

La question que l’évangile nous pose aujourd’hui est donc la plus cruciale et radicale qui soit. Elle n’est pas là pour nous culpabiliser, mais pour ouvrir nos yeux. Nous inviter à viser haut ! À quoi nous attachons-nous vraiment ? Où se situe notre vrai désir, c’est-à-dire notre trésor, notre bien le plus précieux ? Quel est le réel moteur de nos actions ? Pour découvrir de la sorte notre véritable trésor, regardons la lampe de notre cœur. Toutes et tous, nous avons au fond de nous comme une lampe divine. Comme tabernacles de la présence de Dieu sur terre, nous avons tous une lampe de notre sanctuaire intérieur, qui éclaire ce qui est pour nous le plus essentiel… Qu’éclaire-t-elle, cette lampe ? Quel est véritablement notre trésor, le moteur de nos désirs, la source de notre énergie ? Quel est notre vrai combat ? Qu’est ce qui veille au plus profond de nous et qui est la source de nos désirs ? L’avoir, le pouvoir, le paraître ? Est-ce la sécurité affective, financière ? La reconnaissance, la connaissance, la justice ?

Face à cette question, l’évangile ne nous confronte pas seulement à nos priorités, mais éclaire ce qui est premier au fond de nous ! Vous l’avez sans doute remarqué : Jésus ne dit pas : « Faites-vous un trésor inépuisable, et vous recevrez ensuite le royaume ». Il inverse la dynamique. Si nous prenons le texte de l’évangile, le mouvement est autre. « Votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume », « faites-vous ensuite un trésor ». Ce qui est premier, c’est bien le don de Dieu. En ce sens, ce que nous cherchons —dans la foi et la prière— nous est mystérieusement et paradoxalement déjà donné. Alors, si le royaume nous est déjà offert, où se situe notre cœur ? Est-ce dans ce Royaume qui nous est donné ? Où dans les petits royaumes narcissiques que nous nous construisons nous-mêmes, et que le temps effacera bien vite ?

Pour découvrir notre vrai trésor, à nous de regarder toutes les clés de ce que nous sommes, en ayant la conviction que le bien le plus précieux est réellement au fond de nous ! Nous n’avons pas à le mériter, seulement à nous rendre disponible pour le recevoir…

Car, si le Seigneur possède bien des clefs, il en est une dont, par amour, par respect de notre liberté, il a tenu à se dessaisir : celle de la porte de notre cœur...  Loin de nos peurs qui nous enferment, à nous de découvrir dans notre cœur ce trésor inespéré, que personne ne pourra nous prendre. Amen.