Premier dimanche de l'Avent

Auteur: Philippe Cochinaux
Date de rédaction: 29/11/20
Temps liturgique: Avent
Année liturgique : B
Année: 2020-2021


Depuis quelques décennies déjà, la course après le temps est devenue un sport non seulement national, mais également international. J’irais même jusqu’à risquer de dire que cette course après le temps n’est pas optionnelle.  Elle s’impose à nous en tous lieux et en toutes circonstances.  Et peut-être que nous en prenons encore plus conscience en cette période de confinement où tant de choses ne peuvent plus se vivre au rythme effréné dans lequel nous nous étions enfermés. 

Reconnaissons-le, trop souvent nous nous sentons submergés par tout ce qu'il y a lieu de faire, de planifier, d'organiser. Parfois même une sentiment d'être noyé peut nous envahir. Sans doute, répondons-nous bien généreusement à un certain nombre de sollicitations extérieures. Toutefois, par-delà ce constat, nos agendas ne sont-ils pas pollués d’un ensemble de rendez-vous ou d’activités qui ne participent à la réalisation de notre être se définissant comme fille ou fils de Dieu ? Si tel est le cas, il y a alors un risque sérieux pour celles et ceux qui se reconnaissent dans cette réalité de trébucher, de glisser sans s'en apercevoir dans un ensemble de relations qui ne prennent plus le temps de se rencontrer mais qui cherchent simplement à gérer l'urgence, le fonctionnel, voire parfois le superficiel. Prenons l’exemple suivant, combien de fois ne nous arrive-t-il pas lorsque nous rencontrons une personne en rue de lui demander « bonjour, ça va ? », sans pour autant prendre le temps de nous arrêter pour entendre sa réponse.  Nous poursuivons notre route.  Et je me demande quelle serait notre réaction si sa réponse s'avérait négative.  L’aurions-nous entendue ?  Ou sommes-nous déjà trop loin ?  Devrions-nous freiner nos semelles tellement nous serions surpris par de tels propos et que nous déciderions de nous arrêter pour prendre le temps de l’écouter.

C'est vrai que nous pouvons être submergés par le travail, les attentes de la famille, les désirs des amis voire même de simples connaissances. Mais n'est-il justement pas temps d'également reconnaître que quelque part nous sommes aussi submergés par nos propres attentes. Et peut-être même, qu'en faisant un chemin de vérité sur nous-mêmes, nous sommes sans doute prêts à répondre aux attentes des autres parce que, d'une certaine manière, elles rejoignent les nôtres. L'éventail des possibles est devenu tel qu'il est de plus en plus difficile de choisir, c'est-à-dire de renoncer.

Or la vie dans l'exercice de la liberté n'est-elle pas par définition renoncement ? Dire « non » à l'autre peut déjà être quelque chose de difficile à dire, alors quand c'est pour soi, n'en parlons pas. Nous sommes donc conviés par l'évangile que nous venons d'entendre à vivre une véritable révolution intérieure quant à nos attitudes face à cette course après le temps. Un peu comme si Dieu n'avait que faire de notre « faire ». Ce n'est pas là qu'il nous attend. Il nous accueille d’abord dans notre être.  Voilà la première question qui nous est posée ce premier dimanche de l’Avent : qui ai-je envie d’être ?  Ensuite vient la question suivante : que dois-je faire pour devenir qui je veux être.  Et afin de répondre, à ces deux questions, quittons nos impatiences et prenons le temps de reprendre du temps. 

Le temps ne se rentabilise donc pas. Il se donne à vivre pour que nous découvrions ce qui fait l'essentiel de nos existences. En ce temps de confinement et en ce début d’Avent, n’est-il pas plus que temps de nous offrir à nouveau du temps pour nous-mêmes.  Reprendre le temps de regarder les étoiles pour découvrir l’étoile, reprendre le temps d'admirer le sourire d’un être aimé, reprendre le temps de se réjouir du temps que je m’octroie . Du temps pour soi, du temps pour l'autre, du temps pour Dieu. Puissions-nous prendre ce temps, puisque c'est dans cette veille dont parle le Christ que nous redécouvrons l'essentiel de notre humanité s'enracinant dans la divinité. Le découvrir puis l'accepter afin d'en vivre, n'est alors possible que si nous réapprenons non plus à courir après le temps mais à le perdre. C'est peut-être cela aussi « veiller ».

Amen.

 




Eerste Zondag van Advent

Bernard de Cock