8ème dimanche du temps ordinaire

Auteur: Philippe Henne
Date de rédaction: 28/02/22
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2021-2022

Nous avons eu parfois, ou souvent, la chance de pouvoir rencontrer des personnes rayonnantes.  C’est difficile à expliquer : elles dégagent une espèce de paix et de sérénité.  Elles ont tout vu, mais elles ne sont pas brisées par toutes leurs expériences.  C’est comme cette sœur qui avait vécu beaucoup d’années en Inde.  Elle avait le visage tout plissé.  C’était sans doute dû à l’ardeur du soleil quand elle travaillait dans cette partie du monde.  Cela lui donnait un air sympathique, surtout qu’elle avait de petits yeux pétillants.  Elle était surtout surprenante par certaines de ses réactions.  Nous étions en réunion dans une abbaye remarquable par la beauté de ses bâtiments et la richesse de sa décoration. 

Nous avions commencé la journée par une prière commune dans la chapelle et nous étions en train de faire connaissance.  Je ne pouvais m’empêcher de louer la propreté étincelante de cette petite église.  La religieuse me répondit spontanément : « oui, mais je me suis dit : ‘mon Dieu, comme tu dois avoir froid ici’ ».  C’était à la fois touchant et désarçonnant.  Il y avait tout d’abord cette façon de parler à Dieu.  C’était comme si c’était pour elle un vieux compagnon.  Elle pouvait lui parler de choses et d’autres, sans contrainte, ni peur de mal faire.  Et cela marquait une grande différence avec notre façon de prier.  Nous nous reprochons d’être souvent distraits, de ne pas pouvoir rester deux minutes avec Dieu sans aussitôt penser à autre chose, et surtout à de petites choses banales, comme la nourriture, la température, les réparations à faire pour la voiture ou la maison, etc.  Et nous sommes un peu déçus parce qu’on se dit que ce n’est pas ça prier.  Il faudrait avoir tout le temps de belles pensées pour Dieu.  Il faudrait être toujours tournés vers lui, sans regarder à gauche ni à droite, et surtout sans penser à des choses matérielles.  Et voilà que cette religieuse se dit que Jésus doit avoir bien froid dans cette chapelle.  Et c’est peut-être cela une différence entre prier et réfléchir.  Quand on réfléchit, on est tout seul dans son coin.  Quand on prie, on se place sous la lumière de l’amour de Dieu et on lui explique tout ce qui va et tout ce qui ne va pas, et on lui demande, on se demande ensemble, tous les deux, comment on va faire pour résoudre les problèmes et avancer dans la vie. 

            Je me suis demandé pourquoi cette religieuse trouvait qu’il faisait si froid dans cette église.   Elle était bien propre et même brillante de propreté, mais elle était froide sans doute à cause du marbre qui recouvrait tous les murs, mais aussi parce que tout était figé.  Même les fleurs avaient un petit air raide.  Leurs couleurs ne donnaient pas de véritable gaieté dans l’église.  Il y manquait la chaleur de la vie et peut-être aussi la chaleur de l’amour.  Il y a des maisons qui rayonnent parce qu’on y sent qu’il y a de l’amour, c’est-à-dire ce souci que les gens ont l’un pour l’autre.  Le plus important, c’est de développer cette complicité qui existait entre saint Pierre et Jésus : quand le Christ lui dit de jeter ses filets, Pierre lui répond qu’il a péché toute la nuit, mais qu’il allait essayer de nouveau comme Jésus lui a dit.  Il lui faisait confiance.  Il savait que ce n’était pas un caprice.  Il allait essayer pour voir et ça a marché.  On a chacun ses compétences, mais surtout, avec Jésus, on est avec quelqu’un qui sait ce qui nous convient et on peut y aller avec lui.  C’était sans doute cela qui donnait ce calme et cette sérénité à cette religieuse dans cette église un peu froide.  Elle avait tellement l’habitude de se dire : qu’est-ce que Jésus ferait ici ? Qu’est-ce qu’il dirait maintenant ? Elle pouvait alors facilement imaginer ce que Jésus pouvait ressentir ici et là.  C’est peut-être cela rayonner de l’intérieur.