Voilà une scène qui apparaît choquante : une femme adultère est menacée de mort et on ne dit rien à propos de son complice. Celui-ci aurait-il été pardonné et la punition serait-elle réservée à la femme ? Non, c’est beaucoup plus simple que cela : l’homme a déjà été mis à mort. Dans la loi juive, pas de discussion pour l’homme : il est coupable et fautif. Il doit mourir. Pour la femme, il y a un doute : peut-être a-t-elle été forcée, soit physiquement, soit psychologiquement, à aller avec un homme. C’est pourquoi les pharisiens posent cette question à Jésus : que faut-il faire de cette femme ? Que peut répondre Jésus ? Il ne connaît pas cette femme, ni son histoire, ni les circonstances de cet adultère. Quoi qu’il dise, il y aura toujours un pharisien pour lui dire qu’il n’y connaît rien et qu’il dit des bêtises. Et d’ailleurs, qu’est-ce que Jésus pourrait dire ? Les pharisiens sont excités. Ils ne peuvent rien entendre. Ils sont trop énervés pour réfléchir, pour peser le pour et le contre. Toute la foule est là. Elle veut du sang. Elle veut la mort de cette femme. Tout le monde crie qu’elle est coupable et qu’elle mérite la mort.
Nous vivons parfois dans de telles situations, sans les cris de haine et la volonté de tuer, mais avec des jugements courts, rapides et tranchés. « Un tel, ah oui !, tu te souviens, c’est un divorcé et tu sais bien pourquoi : il avait été avec une autre femme alors qu’il était encore marié », « celle-là, elle a eu un grave accident de voiture et personne ne sait très bien qui était responsable, tu vois ce que je veux dire. » Cet homme ou cette femme ont beau avoir fait de grandes et de belles choses : soigner leurs parents quand ils étaient vieux, éduquer leurs enfants quand ils étaient seuls avec eux, se battre pour leur donner de bonnes études et une bonne éducation, tout cela ne sert à rien : ils sont marqués au fer rouge de la bêtise qu’ils ont faite un jour, ils sont à tout jamais écrasés par ce jugement que tout le monde porte sur eux. Si jamais ils disent une bonne idée, tout le monde les regardera, en disant : « oui, mais il ne faut pas oublier qu’ils ont commis de graves erreurs et qu’on ne peut pas leur faire confiance. » Ils sont enterrés vivants par le jugement de leurs proches et jamais ils ne pourront vivre libres, débarrassés de cette faute du passé.
Et c’est là, le grand défi que Jésus lance à la femme adultère. Il lui fait confiance : « va et ne pèche plus. » Ecrasée par les méchantes langues autour d’elle, rongée par les regards méprisants qui tombent sur elle, elle n’avait jamais plus la possibilité de faire quelque chose de bien. Il n’y croyait plus. Elle croyait ce que les autres pensaient d’elle : elle était une méchante fille. Elle ne pourrait jamais faire quelque chose de bien.
C’était cela que le fils prodigue avait vécu : rencontrer son père qui lui rendait sa place et lui donnait une nouvelle chance de vivre auprès de lui. C’était la même chose que Jésus ressuscité offrit à Pierre au bord du lac de Galilée : en lui demandant trois fois « m’aimes-tu ? », il l’invitait à retrouver l’essentiel dans sa vie, non pas les fautes du passé, mais la joie de connaître quelqu’un qui lui offrait un nouveau départ, ensemble.
Ces paroles de résurrection, nous en avons tous besoin. Préparons-nous à les recevoir lors de la célébration de la Semaine Sainte et de Pâques cette année. Et surtout une fois réconciliés avec le Christ, offrons, nous aussi, à tous ceux qui vivent avec nous une nouvelle chance de vivre ensemble une histoire d’amour.