Cinquième dimanche de Pâques

Auteur: Laurent Mathelot
Date de rédaction: 15/05/22
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : C
Année: 2021-2022

Avez vous remarqué le nombre de fois que ce passage d’évangile parle de gloire : « Maintenant le Fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui. Si Dieu est glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera ; et il le glorifiera bientôt. » Cinq fois en une seule phrase.

Qu’est-ce que la gloire ? Nous venons de chanter le Gloria, mais que disons-nous quand nous chantons « Gloire à Dieu » ?

En Hébreu, la racine du mot ‘gloire’ signifie ‘être lourd, pesant’. La gloire c’est littéralement ce qui donne du poids, de la consistance à une personnalité. Et, dans un sens dérivé, la gloire correspond au poids de la renommée, au poids de la richesse, à celui du pouvoir. Mais quel poids ?

La gloire d’une célébrité de la chanson, celle d’un chef d’état n’est pas celle d’un Charles de Foucauld ou d’une Mère Teresa. Mais on pressent très bien que la gloire reste liée au poids de bonnes actions, au bien que l’on a fait. Nous ne parlerions pas de gloire à propos de quelqu’un de célèbre pour ses méfaits.

Dans l’Ancien Testament, la gloire de Dieu est ce qui rend important et qui impose le respect à l’homme. Le plus souvent, la gloire de Dieu est mentionnée en même temps que sa puissance et sa sainteté. Au fond la gloire de Dieu c’est la force avec laquelle la sainteté se rend visible. C’est ça qui fait pour nous la gloire de quelqu’un, c’est qu’il témoigne quelque part de puissance divine.

Finalement rendre gloire à Dieu c’est reconnaître sa présence et son action bénéfique parmi nous. Et tous, nous sommes dans l’espérance d’être un jour glorifiés, c’est à dire d’avoir part finalement à la sainteté divine.

Ainsi, la gloire de quelqu’un c’est essentiellement l’amour dont il rayonne. On le voit, par contraste, quand telle ou telle personne célèbre tombe de son piédestal à cause de révélations scandaleuses. La vraie gloire c’est ce qui reste du bien que l’on fait par amour. Ce n’est pas simplement être célèbre ou connu. C’est être connu pour le bien. Il y a, dans toutes nos familles, et je l’espère pour tous ici, des personnes de bien qui ont rayonné, dans nos vies, de l’amour de Dieu. Des personnes inconnues de beaucoup, mais qui ont pour nous, un reflet de gloire divine.

 

 

Penchons-nous maintenant sur le moment précis où Jésus prononce ces paroles que nous venons de lire : « Maintenant le Fils de l’homme est glorifié ». Comme dit au début de ce passage d’évangile : on est au cours de la dernière Cène et Judas vient de sortir de la salle pour trahir. L’Évangile insiste beaucoup pour nous faire comprendre que Jésus est pleinement conscient que c’est une trahison à mort.

Il y avait bien eu avant des menaces. D’abord, tout prédicateur qui attirait le regard des foules attirait aussi le regard des autorités, ce qui n’était pas sans risque. Tout le monde le savait. Ensuite, il y eu toutes les polémiques, les fois où Jésus fut chassé, parfois à coup de pierre, accusé de blasphème. Mais l’instant précis du récit où Jésus dit « Maintenant le Fils de l’homme est glorifié » est ce moment crucial où tout bascule irrémédiablement pour lui vers l’inéluctable, c’est à dire la mort.

Alors pourquoi revenir, en plein temps pascal où l’on se concentre habituellement sur les apparitions du Ressuscité et où l’on médite essentiellement sur le retour à la Vie, pourquoi revenir en arrière et relire maintenant un épisode de la dernière Cène ? Pourquoi revenir à ce moment tragique où Jésus voit un ami partir le livrer à la mort ?

Précisément parce que le Ressuscité est déjà présent – authentiquement et pleinement présent – dans cet acte inouï d’amour qui consiste à embrasser celui qui vous tue. C’est dès ce baiser avec la mort, que la vie du Christ déjà triomphe et que la gloire de Dieu est pleinement manifestée.

La résurrection que nous espérons tous n’est pas simplement quelque chose qui pourrait nous arriver au-delà de la mort. La résurrection d’entre les morts, c’est quelque chose qui s’éprouve dès maintenant, à mesure de l’amour dont nous sommes capables.

De même que le désamour tue, l’amour est ce qui nous ressuscite. Voilà la gloire de Dieu.