Le texte d’aujourd’hui est bien connu. Il a donné la prière que nous récitons tous les dimanches à la fin de la messe, après le Notre Père. Il nous rappelle tout d’abord que la paix du Christ n’est pas n’importe quelle paix. Il y a à ce sujet un très beau rite que les dominicains célébraient avant le concile. Le prêtre, après avoir récité la prière, baisait le calice avant de souhaiter la paix du Christ à toute l’assemblée. Cela nous rappelle une chose importante : la paix, ce n’est pas quelque chose qu’on possède, c’est quelque chose qu’on reçoit. Nous sommes toujours agités par mille petits soucis. On ne peut pas rester cinq minutes devant le Saint-Sacrement sans penser aussitôt au repas du soir, au travail du lendemain ou aux soucis familiaux. Nous sommes sans cesse harcelés. Le danger, c’est de devenir comme une petite feuille arrachée de son arbre et qui virevolte à gauche et à droite suivant la direction du vent. Il n’y a plus de paix, plus de calme.
La paix du Christ, ce n’est pas cela qui va résoudre tous nos problèmes, ni même les faire disparaître. Mais c’est cela qui nous permettra de pouvoir les affronter avec sérénité, non pas parce qu’on se croit plus forts que les autres, mais parce que nous sommes soutenus par l’amour et la confiance que Dieu nous prodigue. Quand on a confiance en soi, on peut faire beaucoup de belles et de grandes choses. Mais, pour avoir confiance en soi, il faut que l’on sente la présence de quelqu’un qui nous fait confiance. C’est une façon perverse, mais efficace, de détruire quelqu’un : c’est de lui dire tous les jours et tout le temps qu’il n’est bon à rien. A la fin, il n’osera plus rien faire parce qu’il y aura toujours quelqu’un pour le rabrouer, pour l’humilier, pour le contredire. Par contre, c’est une très belle mission qui est confiée aux pédagogues qui, comme les salésiens et les salésiennes, travaillent dans les milieux difficiles. Ils sont là non pas pour diminuer les enfants, mais pour leur permettre de réaliser de belles choses. Et c’est ainsi qu’ils retrouvent confiance en eux-mêmes et aussi dans les autres. C’est un peu comme une mère qui est à côté d’un enfant. Le petit garçon essaie de construire une maison avec des petits blocs de bois. Mais la maison s’effondre. L’enfant est prêt à pleurer et à se décourager. Mais il voit sa mère qui le regarde avec confiance. Ce n’est pas elle qui construit la maison à la place de son enfant, mais c’est elle qui l’encourage à recommencer et qui lui dit : « tu peux le faire ».
La paix du Christ, c’est cela, ce regard confiant que Dieu pose sur chacun d’entre nous. C’est cela qui a permis aux apôtres et aux missionnaires de partir loin de chez eux pour apporter la Bonne Nouvelle. C’est cela qui permet à tant de bénévoles d’aller auprès des plus pauvres pour leur apporter non seulement de la nourriture, mais aussi une tasse de café et un moment de rencontre. A ce moment-là, ces pauvres, comme les malades, redeviennent des êtres humains dignes d’intérêt. Pour aller vers eux, certains bénévoles ont parfois peur d’être mal reçus, mais ils savent qu’ils sont portés par l’amour de Dieu et que, si parfois ils peuvent être maladroits, il y aura toujours Dieu qui sera auprès d’eux pour leur dire qu’ils peuvent recommencer, essayer encore une fois.
C’est ce que le Christ lui-même a vécu pendant sa vie sur la terre. Il savait qu’il allait être trahi et qu’il allait mourir dans d’horribles souffrances. Mais il était porté par l’amour de son Père et avec lui tout était possible.
C’est ce que nous sommes appelés à redécouvrir à chaque eucharistie : la présence bienveillante de Dieu dans notre vie, son Corps et son Sang qui nous sont généreusement offerts, et cette certitude de ne jamais être abandonnés. Oui, nous pouvons dire et chanter : « sûrs de ton amour et forts de notre foi », nous goûtons la paix du Christ, la certitude d’être aimés pour l’éternité.