Assomption

Auteur: Laurent Mathelot
Date de rédaction: 15/08/22
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : C
Année: 2021-2022

Les Évangiles parlent relativement peu de Marie. Essentiellement, dans ce qu’on appelle les Évangiles de l’enfance, dans le récit des noces de Cana et à la Crucifixion. C’est à peu près tout. On la retrouve ensuite dans les Actes des Apôtres ; Paul, quant à lui, n’en parle jamais.

Marie est surtout révérée pour son « oui » inconditionnel à l’inattendu de Dieu. Si on le regarde à la lumière de notre propre confiance en Dieu, peut-être pourrait-on passer à côté du côté tragique du oui. Nous avons tendance, et c’est bien naturel, de nous tourner en confiance vers Dieu pour trouver l’amour, la paix et la joie et si nous le suivons, nous les aurons. Mais sommes-nous aussi prêts à dire oui à Dieu pour les déchirements de cœur, les persécutions, les crucifixions ?

Le « oui » de Marie contient d’emblée un risque inouï. Sans doute est-elle fort jeune quand elle est promise en mariage à Joseph – 13 ou 14 ans tout au plus, l’âge nubile pour l’époque.  Tomber enceinte alors qu’on n’est pas mariée signifiait alors la lapidation. Joseph l’aurait dénoncée qu’elle serait morte sous les pierres, la Vierge Marie. Elle prend un risque colossal à accepter une grossesse inexpliquée. Sa confiance est sans mesure. Nous-mêmes, dirions-nous aussi facilement « oui » à Dieu s’il s’agissait de mettre directement notre vie en jeu ?

C’est pourtant ce qu’il nous demande. A nous aussi. « Donne-moi ta vie », voilà ce que Dieu ne cesse de nous demander : « Donne-moi ta vie ». Il ne s’agit pas – je l’ai évoqué hier – de courir au martyre : Marie n’est pas suicidaire quand elle accueille l’incroyable demande divine. Elle fait juste pleinement confiance : « Qu’il me soit fait selon ta parole. » [Lc 1, 38]

Mettons-nous un peu dans sa peau. Que ce passe-t-il quand on accueille en son sein, la plénitude incarnée de l’amour de Dieu ? Que se passe-t-il quand on éprouve en soi la vie divine ? Que se passe-t-il quand on tressaille d’allégresse ? Avez-vous déjà éprouvé ce sentiment de l’extase, de bonheur absolu, de la joie qui emporte tout ? Avez-vous déjà eu le cœur qui tressaille d’allégresse ? Peut-être à l’occasion d’une rencontre amoureuse, d’une naissance, peut-être grâce au simple souvenir d’un moment de tendresse.

Vivre un moment la plénitude de l’amour, celle de la vie, c’est avoir l’âme qui exalte Dieu et l’esprit qui exulte ; c’est se sentir heureux pour l’éternité ; le cœur contemplant des merveilles. Avez-vous déjà éprouvé ce sentiment de joie qui confine à l’extase ? Dans votre vie à tous, j’espère qu’il y a eu de ces moments de plénitude – ne fussent que quelques instants – où le cœur, le corps, l’esprit et l’âme jubilent d’une joie profonde qui touche au divin.

Cette joie, cette plénitude de l’amour, il est possible de la vivre dans la seule relation avec Dieu. C’est essentiellement ça le message du Magnificat. Il est possible que notre vie spirituelle soit constellée de ces tressaillements d’allégresse qu’éprouvent celles et ceux – les mystiques – qui accueillent en leur chair, la vie de Dieu. Marie est la première mystique. Et nous mettre à sa suite, c’est avant tout dire oui à l’incarnation en nous de la vie divine. Comme à Marie, Dieu nous dit : « Donne-moi ta vie »  et « Par toi, que ma présence adviendra au monde » ; « Laisse-moi pleinement vivre en toi ».